Tout au long de ma formation, j’ai privilégié des stages auprès d’enfants et d’adolescents,
publics vers lesquels je pense me diriger par la suite. Cependant, il me semblait nécessaire d’avoir
une expérience de la psychopathologie adulte, expérience que j’ai pu trouver dans mon dernier stage
professionnel de M2.
Mon lieu de stage est un Centre Médico-Psychologique (CMP) situé à Grenoble et rattaché
au Centre Hospitalier Alpes Isère (CHAI). Le CMP Lanteri Laura a ouvert ses portes en 2010 suite
au regroupement de deux anciens CMP des quartiers Condé et Villeneuve. Les CMP donnent la
priorité aux personnes ayant des difficultés financières de par le remboursement de la diversité des
soins proposés. Ainsi, la population actuelle comporte essentiellement des patients nécessitant au
moins deux types de soins (psychiatriques, infirmiers, et/ou psychologiques), ce qui est
caractéristique de pathologies relativement envahissantes. La politique de plus en plus affirmée de
regroupement du CHAI implique une file active en hausse face à laquelle le personnel soignant ne
peut actuellement plus répondre comme il le souhaiterait. Une ambivalence a pu naître chez les
soignants quant aux initiatives créatrices qu’ils pouvaient avoir. Certains ont le désir de construire
une nouvelle activité ou un autre mode de prise en charge plus adapté à chaque patient mais le
temps ne le permettant pas, chacun a aujourd’hui tendance à effectuer avec les patients un travail
individuel basé sur l’efficacité et la prise en charge du plus grand nombre. C’est dans ce contexte,
avec une équipe soudée mais surchargée, que j’ai commencé mon stage avec un projet d’atelier en
développement.
Dans mes stages précédents, j’ai pu participer à des groupes de psychodrame analytique avec
des enfants. Cette expérience fut riche en enseignements et m’a montré que certains enfants
pouvaient, via la mise en mouvement du corps dans un groupe stable, mettre au travail leur
problématique propre. Il m’est apparu que certains enfants que l’on qualifiait d’intenables, sans
contenance, pouvaient retrouver au fil des séances une peau psychique leur permettant de ne plus
déborder laissant alors la place pour une réelle relation avec un autre. Cependant, dans les différents
groupes auxquels j’ai pu participer, je me questionnais toujours quant à la stabilité de ce phénomène.
En effet, il me semble que la mise en mots et la mise en sens conscientisée de ce qu’y se passe à la
fois en soi et autour de soi, est ce qui permet une réelle intégration et un changement davantage
durable. Or, dans ces groupes, les enfants, souvent trop excités par le jeu du psychodrame, ne
pouvaient entrer dans la phase de dialogue post-jeu. Le jeu, bien que souvent associé à l’âge
immature de l’enfance, est toujours présent et nécessaire à la vie psychique de l’adulte. Il prend
simplement d’autres formes. A nous, psychologues, de trouver lesquelles.
Il me tenait à coeur de pouvoir, pour ma dernière année de formation, développer mon propre
projet dans sa globalité. Il aurait été intéressant de pouvoir le faire émerger directement de la
clinique du terrain. Or, les contraintes pratiques de mon stage ne m’ont pas permis de prendre le
temps de mieux connaître au préalable la population concernée. Dans mon propre désir de création,
je voulais proposer une activité dont je connaissais personnellement les effets ; c’est ainsi, il me
semble, que l’on entre le mieux en relation. Quelle que soit la visée objectivante de la position de
psychologue que l’on cherche à atteindre, on implique toujours de soi-même dans la relation, le tout
est d’en être conscient et de savoir s’en servir pour communiquer. La pratique artistique a toujours
été pour moi une source d’apaisement, d’affirmation de soi et de communication. Parmi les
différentes pratiques que je pouvais avoir, l’écriture me paraissait ici la plus appropriée. Elle est un
jeu car elle a ses règles et elle offre aussi une multitude de possibilités en ce qui concerne la création
et la manipulation de notre imaginaire insoupçonné. L’écriture, en ce qu’elle implique le corps à
corps avec la feuille ou le stylo permet de travailler sur la contenance sans l’éventuel envahissement
de la pensée d’une excitation corporelle trop intense. Malgré mon manque d’expérience dans
l’animation d’atelier d’écriture – je n’ai jamais observé, ni participé à ce type d’atelier – ma confiance
personnelle en ce médiateur et en ses effets thérapeutiques m’a poussée à monter ce projet et à le
mener à bien.
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