L’augmentation de la fréquence des événements météorologiques et climatiques extrêmes au cours de ces dernières années a suscité une attention particulière de la communauté scientifique et des responsables politiques dans différents pays. L’Organisation Météorologique Mondiale (OMM) dans un communiqué de presse publié le 2 juillet 2003 note que dans le monde entier, les phénomènes météorologiques et climatiques atteignent des niveaux records. Les dernières évaluations scientifiques laissent penser que l’élévation générale des températures due aux changements climatiques pourrait entraîner une augmentation de la fréquence et l’intensité des phénomènes extrêmes (IPCC, 2002). Ce sont aussi autant de dé s à la modélisation scientifique et également ce à quoi l’humanité devra faire face tout au long de son existence.
Les événements extrêmes tels que les sècheresses, les inondations, les vagues de chaleur, les mouvements de masse, etc., sont des épisodes au cours desquels le temps s’écarte fortement de sa moyenne à long terme, bien au-delà des fluctuations qu’il subit d’ordinaire dans un lieu et pendant une saison donnée. Ils peuvent aussi être définis comme des événements dont la probabilité est inférieure à 10 %, c’est à dire ayant une faible probabilité d’apparition et par conséquent rares, dont les estimations sont le plus souvent fondées sur des sentiments que sur des faits (Hita et al, 2008).
Les événements extrêmes ont des impacts dévastateurs sur la société (par exemple le 19 septembre 2009, des inondations dans la ville de Douala faisant des pertes en vies humaines et des dégâts matériels importants ; la canicule de 2003 en Europe avec des milliers de morts à travers la France, l’Espagne, la Suisse et l’Italie ; le Tsunami en Asie en 2004 ; les Ouragans Katrina, Rita et Wilmo en 2005 en Amérique ; les tempêtes de l’hiver 1999 et février 2010 en France et plus récemment les inondations dans les villes du Sénégal, Niger, Burkina-Faso et du Togo en septembre 2009 ; et de graves inondations en Espagne en Février 2009). Si une anticipation n’est pas faite, aussi bien du côté des chercheurs que des responsables politiques, des vagues de chaleur ou des précipitations encore plus intenses et longues, conduiront dans le futur à des impacts encore plus dévastateurs sur la société, ceci à cause d’un probable changement climatique lui-même résultant de l’activité humaine en majeure partie (Rapport du GIEC, 2001). C’est donc dans le souci de prévenir l’humanité des conséquences néfastes de tels événements qu’il est important de comprendre leurs fréquences et leurs intensités a n de déterminer leurs durées de retour et prévenir la population à se protéger.
A ce jour, la communauté scientifique n’a pas encore réussi à développer une théorie spatio-temporelle multivariée qui puisse complètement modéliser les événements extrêmes et plus précisément la distribution des valeurs extrêmes provenant d’un système complexe comme le climat. Par conséquent prévoir ces phénomènes de façon précise est un objectif scientifique majeur.
Les événements météorologiques et climatiques extrêmes ont déjà fait l’objet de plusieurs études ces dernières années. Les auteurs qui se sont intéressés à ces événements montrent que la théorie des valeurs extrêmes (TVE) par le biais de ses modèles (Coles., 2001), fournit un meilleur cadre d’analyse au détriment de celui du théorème de la limite centrale (TLC) plus préconisé pour l’étude des tendances centrales des distributions. Gillelland et Katz (2006) ont montré que la statistique des valeurs extrêmes peut être utilisée pour étudier les phénomènes extrêmes en météorologie et la variabilité climatique, notamment l’estimation des niveaux de retour des températures extrêmes dans les localités de Port Jervis (New York) et Sept-Iles (Québec). Dans la même lancée Naveau et al. (2005), ont montré que la TVE peut fournir des réponses appropriées à un éventail de questions liées aux extrêmes climatiques. Pour étudier les évènements extrêmes certains auteurs ont considéré deux modèles d’extrapolation statistique, relevant de la théorie des valeurs extrêmes, dans un cadre stationnaire asymptotique (Coles., 2001), c’est-à-dire sur des données univariées et supposées stationnaires. Ces deux approches sont . (i) Block maxima method (BM) ou méthode des maxima par bloc, qui s’appuie sur un découpage des données en blocs, dont les maxima sont supposés distribués selon une loi d’une famille connue sous le nom de Generalized Extremes values (GEV). (ii) Peacks-Over-Threshold method (POT) ou méthode de dépassement de seuil, qui modélise la distribution des valeurs extrêmes dépassant un seuil donné suivant une famille de la loi dénommée Generalized Pareto Distribution (GPD). Ces deux modèles reposent sur des théorèmes de convergence mathématiquement équivalents.
Greene et al. (2009), ont utilisé avec succès le modèle POT pour déterminer les temps de retour de probables sécheresses dans le Sahel, Benoit et al.(2006) ont utilisé les modèles BM et POT pour l’estimation des hauteurs extrêmes de houle en quatre points (le plateau continental, la côte Ouest du Cotentin, le Havre et l’Ile d’Yeu) par extrapolation statistique. Allant dans le même sens, Katz et al. (2002) ont utilisé ces modèles pour illustrer les caractéristiques typiques des extrêmes en hydrologie, notamment en estimant la distribution maximale annuelle des précipitations journalières de la localité de Fort Collins et également pour l’estimation des pics annuels de crues de la Potomac River aux USA.
Dans le présent travail, nous nous proposons d’utiliser les deux modèles évoqués précédemment pour étudier les événements extrêmes liés aux températures et précipitations à Douala au Cameroun. L’objectif principal de notre travail sera d’estimer les niveaux et les durées de retour des températures et des précipitations extrêmes. Pour l’utilisation de ces modèles la notion de durée de retour à laquelle est associée le niveau de retour s’impose, dans la mesure où elle permet d’évaluer le caractère prédictif des modèles. Nous procéderons à l’estimation des paramètres des modèles et la détermination des niveaux de retour auxquels sont associés les intervalles de confiance pour des périodes de retour données.
Nous subdivisons notre travail en trois chapitres . Le premier, présente un aperçu sur les événements météorologiques et climatiques extrêmes, en s’appuyant sur le Rapport de l’OCCC publié à Berne en septembre 2003. Nous dresserons également un état des lieux de ces événements au Cameroun. Le deuxième chapitre sera consacré à la présentation des données et les méthodes utilisées. Dans le dernier chapitre, nous appliquons les modèles aux données de températures moyennes et de pluviométries mensuelles à Douala.
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