Envisager la notion de public n’est pas une tâche aisée, car une palette de sens et de nuances tend à rendre son utilisation ardue. Il convient d’ailleurs, comme le rappelle Jean-Pierre Esquenazi dans son livre Sociologie des publics(6), de manier ce mot dans son acceptation plurielle, afin de rendre compte de la diversité et de la complexité qui s’y rattachent. Étudier les publics de la culture, c’est s’intéresser aux expériences, aux appropriations de l’oeuvre, aux ressentis intimes et communs à un groupe, mais aussi aux raisons qui font que tel public jouit de telles représentations. Il s’agit en fait d’apposer un regard scientifique sur un « pacte de réception »(7), c’est-à-dire d’essayer de comprendre la relation oeuvre-publics, par le biais d’une analyse de sa forme(8). Les recherches en sociologie de la culture se concentrent la plupart du temps, sur l’analyse des publics à travers la réception d’une oeuvre culturelle. Ce point de vue orienté semble témoigner de l’instabilité de la notion si elle n’est prise qu’en tant que tel. En revanche, l’étudier par rapport à un objet précis relève d’une décision scientifique plus courante et souvent plus pertinente : elle permet en effet d’éviter de mêler des idées et des faits trop vastes et trop ambigus.
Avoir une problématique claire, un angle de vue formel, et un processus d’analyse propre nous permettra dans ce mémoire, d’apporter un certain nombre de clés d’analyse quant à la relation qui tend à exister entre les publics de fans et les objets culturels (ici les séries télévisées). Cette partie est particulièrement importante, car elle constitue le point de départ de la question à laquelle nous essaierons d’apporter une réponse : Il s’agira dans un premier temps, de définir ce que nous entendons par « fans », en étudiant les particularités du pacte de réception qui les lie à une oeuvre de culte. Comprendre une notion aussi complexe que celle-ci demande par ailleurs à ce que l’on s’intéresse aux représentations courantes qui s’entremêlent et qui, bien souvent, se contredisent. Enfin, nous nous intéresserons aux formes et aux styles audiovisuels qui à la télévision, intensifient ce rapport très fort entre les fans et l’objet culturel qui les fascine.
6 ESQUENAZI J.-P., Sociologie des publics, Paris, La Découverte, 2003.
7 Expression inventée par les écoles écoles de Prague et de Constance, à propos de la configuration relationnelle dans les théories esthétiques.
8 ETHIS E., Pour une po(ï)étique du questionnaire en sociologie de la culture, le spectateur imaginé, l’Harmattan, 2004.
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