1.1 Etat des lieux du tourisme mondial
1.1.1 Contexte économique et social du tourisme mondial
Le tourisme continue d’augmenter de manière significative depuis plus de 10 ans. Selon OMT(3), nous sommes passés de 700 millions de touristes dans le monde en 2002 à 900 millions en 2009, la prévision étant de 1600 millions en 2020. Cette forte augmentation quantitative s’accompagne d’une évolution importante dans les pratiques du tourisme.
Tout d’abord, en particulier dans des pays comme la France, l’âge moyen du voyageur a augmenté. D’après les derniers chiffres de l’INSEE(4), les plus de 50-70 ans représentent 23% de la population. De manière générale, cette tranche d’âge possède non seulement un pouvoir d’achat plus important, mais aussi de temps pour en profiter. On peut donc penser que les attentes de cette population touristique sont différentes. Cette volonté de différenciation dépassent les seuls seniors, la mass-customisation de biens et de servies étant devenue une réalité marketing de grande ampleur ces dernières années.
Sur le plan conjoncturel, le monde a subi ces dernières années un certain nombre d’évènements qui ont déstabilisé les acteurs du tourisme. Nuage de cendre, 11 septembre, Fukushima, tsunami, révolution arabe… Il semblerait que les risques géopolitiques, sanitaires et aériens augmentent, ce qui tend à déstabiliser financièrement les grands acteurs du tourisme mondial.
Les coûts des voyages sont aussi très fortement pénalisés par la hausse des cours du pétrole. Les frais de carburants sont ainsi passés de 13% en 2006 à 35% en 2008(5). La plupart des compagnies aériennes ont répercuté les hausses de prix sur le vol, à l’exception de certaines compagnies low cost qui ont réussi à atténuer cette hausse en minorant les services à bord.
La crise économique qui accompagne le monde depuis plusieurs années a eu pour effet de changer les priorités des voyageurs de deux façons. De manière assez évidente, le critère de prix est devenu primordial dans les choix des voyageurs. On a donc vue une très forte augmentation des offres à bas cout. Le voyageur qui est aussi un consommateur est donc parti à la chasse aux bonnes affaires.
« Les consommateurs ont pris conscience au travers de cette crise de leur rôle d’acteur et de leur pouvoir dans le système économique, et réclament aujourd’hui un nouveau rapport de forces, largement facilité par l’évolution d’Internet » (DGCIS, 2010: 9)(6)
Un autre effet, peut-être moins attendu de la crise, est un retour des valeurs d’éthiques, de respect de l’environnement, de contacts authentiques, de relations marchandes plus équitables. Certes, ces valeurs ne sont pas nouvelles, mais il semblerait que la crise ait agi comme un catalyseur pour amplifier ces nouvelles formes de consommation et de citoyenneté. Le terrain semble donc propice pour le développement du sur mesure où des préoccupations telles que l’hospitalité prennent plus d’importance.
1.1.2 Influence d’Internet sur le tourisme
La principale cause de la mutation du marché du tourisme est sans aucun doute Internet. Comme il semble que son action touche à la fois l’organisation du tourisme et le touriste, il est important d’en faire un état des lieux pour mesurer ses impacts.
Cet outil né dans la fin des années 90 a tout d’abord permit de mettre le monde à disposition de l’internaute. Chaque destination touristique peut désormais être explorée « virtuellement ». Il en résulte un intérêt croissant pour la découverte du monde et donc le tourisme.
Dans ses débuts, le réseau proposait une vision figée des produits touristiques qui se rapprochait plus d’un catalogue en ligne. Sa plus-value résidait uniquement dans la diffusion de produits touristiques en se passant des coûts d’éditions classiques. Depuis, l’information est devenue beaucoup plus riche et une multitude de services est accessible directement, sans intermédiaire. L’offre et la demande sont alors connectées au plus court.
Si l’on tape sur le moteur de recherche le plus connu « voyager au Brésil», c’est-à-dire la recherche la plus basique qu’il soit, nous aurons déjà accès à des agences de voyages, des sites d’informations, des forums, (cf. Figure 1) :
Figure 1 : Résultat Google – Voyager Brésil7
En creusant un peu, et sachant que les utilisateurs sont de plus en plus à l’aise dans cet univers sans fin, une bonne partie de ce qui permet de préparer un voyage peut être trouvée assez facilement.
Pour y voir un peu plus clair dans les possibilités du web dans le tourisme, il est nécessaire de lister toutes les apports du web pour préparer un voyage:
Sites de réservation en ligne
Il existe un nombre très important de centrales de réservations tel que http://www.kayak.fr, opodo.fr, http://www.easyvols.fr/, http://booking.fr… A noter que si certains de ces sites sont au départ spécialisés dans un type de réservation, comme par exemple Booking spécialisé dans la réservation d’hôtels, ils ont étendu leurs offres sur les secteurs les plus profitables que sont la réservation de vols, d’hôtels et de voitures. On en parlera plus loin dans la longue traine. Au total, en 2011, ce sont 12,5 millions de français qui ont réservé leur séjour ou une partie de leur séjour en ligne, c’est-à-dire 42% des vacanciers français(8).
Sites d’informations
Le web regorge de sites informatifs sur tous les types de tourismes. Sur la recherche précédente, on trouve en première page au moins deux sites : http://linternaute.com et le site du ministère des affaires étrangères. En allant un peu plus loin, on trouvera un certain nombre de blogs amateurs ou professionnels sur le Brésil en général ou sur des destinations plus précises du pays.
Sites communautaires
Depuis quelques années, la composante communautaire est devenue de plus en plus importante. Cet aspect « échange » peut prendre plusieurs formes comme Facebook, les forums dédiés au tourisme ou les avis d’internautes.
Sites spécialisés
La démocratisation du web a permis à des services en ligne très spécialisés de prendre leur envol. On pense par exemple AirBnB(9) qui permet de trouver des chambres d’hôtes dans le monde, ou CouchSurfing(10) qui permet de loger chez l’habitant pour les vacances. Source d’informations idéale pour les vacanciers à la recherche d’hospitalité…
Sites des locaux
Les activités touristiques de toutes sortes sont désormais accessibles directement en ligne. Elles peuvent même être assistées par des plateformes spécialisées qui leur fournissent un outil clé en main de réservation à mettre sur leur site, par exemple booking.com.
Avis en ligne
Une grande majorité des sites propose des avis en ligne. Toutes les prestations pouvant être contestées ou critiquées en temps réel de façon virale, les professionnels sont contraints à une veille constante de leur « e-réputation ». En 2011, selon le Baromètre 2012 du Cabinet Raffour Interactif, 72% des Français préparant un voyage ont lu les avis en ligne et 64% d’entre eux déclarent qu’ils en tiennent compte dans leurs choix. Ce type d’information est une mine d’or pour préparer un voyage sur mesure. Un bon exemple est le site TripAdvisor(11).
Ce tour d’horizon des possibilités offertes par Internet dans le domaine du voyage permet de mieux comprendre comment le web a participé aux changements dans la manière d’envisager et de construire le voyage.
1.1.3 Les acteurs du tourisme
Le contexte économique mondial associé à l’évolution des pratiques sur Internet a amené à des changements de comportements chez les touristes. Les professionnels du tourisme ont aussi évolué pour s’adapter aux bouleversements du marché. Le schéma (cf. Figure 2) montre les interactions entre les différents acteurs du tourisme :
Avant
Actuellement
Figure 2 : Les interactions entre les professionnels du tourisme. Source : de l’auteur
Dans un premier temps, la vente et la conception de voyage se déroulaient selon un circuit sans réelles alternatives. Les touristes allaient voir l’agence de voyage qui lui vendait des séjours. Elle se chargeait en général de la réservation du vol avec GDS(12) et utilisait les compétences des tours opérateurs pour la conception des séjours. Les tours opérateurs étant en France, ils concevaient le produit touristique en s’appuyant sur un réseau d’agences réceptives localisées dans le pays de destination. Ces dernières s’occupaient donc de toute la partie logistique sur place incluant notamment l’hébergement et les transports.
Depuis, les acteurs historiques sont restés avec les attributions d’origines, mais les relations ont quelque peu changé. D’une part, les tours opérateurs qui étaient au départ de simples producteurs de voyage ont peu à peu pris en charge la relation directe avec les touristes et les agences de voyage ont commencé, dans une moindre mesure, à produire leurs séjours directement avec les agences réceptives. Les rôles de ces deux acteurs sont donc en train de fusionner.
D’autre part, et il s’agit probablement du bouleversement le plus important en terme d’impact, Internet s’est immiscé dans tout le processus de conception de voyage. Il est devenu à la fois un outil pour les professionnels historiques mais aussi un nouveau canal à exploiter par ce qu’on appelle des « pure players »(13) permettant d’accéder directement aux services réceptifs locaux. D’après une enquête 2010 du Journal du Net(14), 91% des voyageurs français s’informent avant d’aller en agence et 35% des voyageurs réservent en ligne.
Les acteurs historiques tels que les tours opérateurs profitent du nouveau canal Internet puisque leur chiffre d’affaires est désormais réalisé à 12% sur le web(15). Mais ce sont les nouveaux acteurs en ligne, les « pure players », qui en profitent pour prendre une place croissante dans le marché, en particulier sur les prestations de base que sont le transport et l’hébergement. Internet en tant que source d’information pose aussi un problème aux agences et tours opérateurs. En effet, d’après eux, il n’est pas rare que le client réserve lui-même son voyage en ligne après avoir récupéré toutes les renseignements utiles auprès du commercial de l’agence.
La concurrence entre tous les acteurs, anciens et nouveaux, s’est donc intensifiée. Les acteurs historiques ne luttent pas avec les mêmes armes et sont donc à la recherche d’un nouveau souffle.
1.2 L’émergence du tourisme sur mesure
1.2.1 Prestation de service sur mesure
Un produit sur mesure est par définition adapté aux spécificités de l’acheteur. Dans le cas de prestations dans un secteur de grande ampleur, on peut s’appuyer sur la notion paradoxale de « mass-customisation » :
« Un processus par lequel les firmes appliquent les technologies et méthodes de management pour produire de la variété au produit et de la personnalisation à travers une flexibilité et une capacité de réponse rapide ». Le but est de « produire suffisamment de variété afin que pratiquement tout le monde puisse trouver exactement ce qu’il désire à un prix raisonnable ». (Kotha, 1995)(16).
Dans cette définition, la personnalisation de masse n’est pas un produit totalement personnalisé dans le sens où il n’est pas entièrement conçu pour un client, mais plutôt issu d’une démarche de flexibilité suffisamment importante pour s’adapter à la demande.
C’est ainsi que les tours opérateurs sur mesure fonctionnent, en prêtant un caractère unique à une offre qui ne l’est pas complètement. La conception du voyage est malgré tout qualifiée de sur mesure car elle est faite conjointement avec le client. Dans les faits, le voyageur demande un devis de voyage avec un certain nombre de critères de destination, de prix et d’activités. L’opérateur sur mesure lui répond en se basant sur des produits existants déjà prêts, qu’il adapte pour s’approcher le plus possible des critères du client. La force des tours opérateurs sur mesure est d’avoir conçu des produits très adaptables, autour d’un processus informatisé performant et des vendeurs parfaitement au fait des spécificités de la destination17. Il en résulte que le voyageur ne se retrouve pas avec un séjour figé, mais bien un voyage dont il aura choisi les dates, les lieux et les activités.
En résumé, il faut retenir que le tourisme sur mesure est une sorte de compromis entre l’industrialisation du voyage et la prise en compte individualisé des envies du voyageur.
1.2.2 Place du service sur mesure dans le marché du tourisme
Le tourisme sur mesure consiste à s’adapter au besoin du voyageur. A l’opposé du tourisme de masse qui s’appuie sur un nombre limité de destinations et des prestations correspondant aux envies supposées du plus grand nombre, le tourisme sur mesure doit donc proposer une grande quantité de choix à un nombre de voyageur plus faible.
Le tourisme ayant longtemps été synonyme de voyages organisés, comment peut-on expliquer l’apparition et surtout l’explosion du tourisme sur mesure ? La théorie de la longue traine apporte des explications intéressantes sur ce qui s’est passé tout en nous donnant une vision de l’avenir.
La théorie de la longue traine a été développée par Chris Anderson en 2009 dans son livre « The long tail ». En résumé, cette théorie permet de décrire une partie d’un marché où sont vendus de nombreux produits, chacun en petite quantité.
Dans une vision traditionnelle, le marché se focalise sur la petite quantité des produits qui concentrent la plus grande partie des bénéfices. On parle souvent dans ce cas de la règle des 80/20 (ou la loi de Pareto), c’est-à-dire qu’un marché produit 80% de ses bénéfices sur 20% des produits qu’il distribue. Les 80% des produits restants sont alors délaissés car ils représentent trop d’efforts pour des marges réduites, voire inexistantes. Bien sûr, la proportion des 80% dépend du métier, et elle est dans beaucoup de cas proche de 90%.
Quoiqu’il en soit, cette loi permet de modéliser un bon nombre de situations.
Un marché représenté par le modèle de la longue traine est assez différent car il étale ses bénéfices sur un nombre beaucoup plus important de produits. Ainsi, même si un certain nombre de produits concentrent toujours une partie importante du chiffre d’affaires, ce dernier tente d’exploiter une succession de niches qui, finalement, méritent qu’on s’y attarde.
Avec le temps, dans un marché régi par le modèle de la longue traine, la traine (ici représentée en jaune), à tendance à s’allonger et à s’épaissir au détriment de la tête (ici montrée en rouge).
Ci-dessous, (cf. Figure 3), une représentation comparée des deux modèles permettant de mieux comprendre la différence des modèles :
Figure 3: Modèle 80/20 et Longue traine. Source : Anderson, 2009.
D’après Chris Anderson, la longue traîne est générée par trois forces : La démocratisation des outils de production, la baisse des couts de consommation due à la démocratisation de la distribution, et la connexion entre l’offre et la demande. Or nous constatons aujourd’hui, principalement depuis l’arrivée d’Internet dans le secteur du tourisme conjuguée à la mondialisation :
• La démocratisation des outils de production : les sites proposant des prestations touristiques se multiplient. Les professionnels du tourisme intègrent des outils de conception de voyage performant pour réduire leurs coûts de production (cf l’exemple de Comptoir des Voyages dans le chapitre suivant).
• La baisse des couts de consommation due à la démocratisation de la distribution : L’heure est aux offres low cost favorisées par une baisse des couts liés aux progrès technologiques offerts par Internet.
• La connexion entre l’offre et la demande : comme vue précédemment, il est aisé de trouver n’importe quelle information ou avis sur une destination touristique et de réserver soit même. De plus, le nombre de services touristiques disponibles est de plus en plus important, en accord avec une demande qui se diversifie.
Le nombre de prestations touristiques qui se multiplient constitue la traine, et de leur côté, les trois grands services de base que sont le transport aérien, les chaines d’hôtel et la location de voiture, composent la tête.
L’un des principes de ce modèle étant que la traine doit continuer à s’épaissir, on peut estimer que le voyage sur mesure, qui agrège un certain nombre des services de la traine, va continuer à croitre et que si la rentabilité va continuer à se concentrer sur certains services historiques, il est à parier qu’il existe de nombreuses niches dans le sur mesure à ne pas négliger. Les possibilités liées à la personnalisation du voyage sur mesure peuvent donc amener à des offres économiquement viables.
1.2.3 Le FIT, la principale cible du marché du voyage sur mesure
Ci-dessous (cf. Figure 4) extrait de DGCIS – « Nouvelles perceptions de la valeur des offres touristiques »(18), représente de manière condensée l’échelle d’importance de ce qui peut constituer une offre touristique.
Figure 4 : Le nouveau contrat de base de l’offre touristique. Source : DGCIS, 2010
Cette pyramide a été construite par la DGCIS à l’issue d’une enquête conjointe auprès de professionnels du tourisme et d’un panel de clients, accompagnée d’un travail de recherche critique sur les travaux liés à l’évolution des comportements sociaux et touristiques.
L’objectif annoncé de la DGCIS était de fournir une approche opérationnelle aux professionnels du tourisme. Il en ressort que le milieu du tourisme a beaucoup évolué du fait d’évènements conjoncturels, économiques et structurels. C’est donc une période propice aux changements et à l’innovation. La figure 4 montre que les bases de l’offre touristique reposent particulièrement sur des notions pratiques telles que le prix et la sécurité. Le prix, en particulier parce que la crise économique touche les touristes, et la sécurité parce que c’est un instinct de base.
En partant du principe que ces prestations sont aujourd’hui garanties par la plupart des acteurs du tourisme, il faut maintenant s’attarder sur les étages supérieurs de la pyramide.
Il apparait qu’ils relèvent plus de l’humain : « Dimension personnalisé de la prestation », « personnalité de l’offre », « co-production », « thématisassions » qui sont autant de termes qui regroupent l’idée de prendre le contrôle du voyage. Ces mots s’intègrent parfaitement dans l’univers du tourisme sur mesure, ce qui explique le succès de ce dernier.
Cependant, il est vrai que le tourisme sur mesure n’intéresse pas tout le monde, il reste même assez minoritaire dans le tourisme en général car il s’adresse à un public prêt à s’investir un minimum dans son voyage. Parmi ce type de profiles, il en existe un particulièrement intéressant, communément référé comme FIT par les opérateurs touristiques.
Le terme FIT « Free Independent Traveler » est utilisé par les acteurs du tourisme sur mesure pour définir le voyageur autonome. La définition(19) est vaste mais elle recouvre les caractéristiques suivantes :
• Il a généralement plus de 35 ans et possède une solide expérience de touriste.
• Il a des revenus légèrement supérieurs à la moyenne et préfère voyager en petit groupe ou en couple.
• Il s’éloigne le plus possible de tout ce qui peut ressembler à du tourisme de masse.
• Il est en recherche de nouvelles expériences hors des sentiers battus.
• Il est très informé grâce aux NTIC et bien souvent participe à la transmission des informations (avis, réseaux sociaux).
Le FIT ne pratique pas le séjour balnéaire. Sa philosophie du voyage l’amène à recherche des expériences de voyage ou il pourra découvrir les beautés de sa destination mais aussi ses habitants. Comme il sait qu’il ne trouvera pas ce qu’il cherche dans les agences traditionnelles mais que, en même temps, il ne souhaite pas non plus partir complètement à l’aventure, il se tourne volontiers vers des structures qui l’accompagnent dans son voyage, tout en lui laissant une liberté de choix et de mouvement.
Comme le montre le Tableau 1(20), même si le FIT est attaché à son indépendance en tant que voyageur, il n’a pas des caractéristiques identiques selon son pays d’origine. Ainsi les Français aiment sortir des sentiers battus tandis que les Américains préfèrent les activités grand public. Les Français restent attachés aux sources d’informations traditionnelles là où les Américains, les Allemands et les Britanniques semblent plus habitués à utiliser Internet.
Tableau 1 : Traits caractéristiques des voyageurs indépendants – Source: PhoCusWright
Le FIT est aussi caractérisé par la manière dont il perçoit le voyage. La figure 5(21) indique que le désir de visiter la destination et l’expérience personnelle sont les deux premières raisons du choix d’une destination. Cela montre que le FIT voyage aussi pour l’expérience et les découvertes qu’il va en tirer. Ce qu’il considère qu’il ne trouvera pas dans le tourisme de masse.
Figure 5 : Facteurs d’influence dans le choix d’une destination
Toutes ces caractéristiques font du FIT un profil particulièrement intéressant pour les tours opérateurs sur mesure. Opportunité, certes, mais également défi commercial. Etant particulièrement informé et autonome, le FIT sait qu’Internet peut lui fournir directement ce qu’il cherche pour un meilleur prix. Toutes les informations sur la destination sont disponibles en grande quantité, il peut trouver ses billets et son hébergement en ligne avec en supplément les avis des internautes pour l’aider à faire le bon choix. Enfin, il peut lui-même faire le planning de son séjour en louant une voiture sur place.
Le défi des tours opérateurs est donc de mettre en avant un savoir-faire singulier pour simplifier la création du voyage, le sécuriser et trouver les meilleures prestations. Pour le FIT ces prestations doivent inclure le meilleur du voyage et de la découverte : beauté, authenticité, hospitalité…
1.3 Les tours opérateurs face à la demande française
« Individuals do not seek satisfaction from products, from their actual selection, purchase and use. Rather satisfaction stems from anticipation, from imaginative pleasure-seeking. People’s basic motivation for consumption is not therefore simply materialistic. It is rather that they seek to experience in their imagination. » (Urry, 1990 : 13)
Urry indique ici que le tourisme ne relève pas simplement de la consommation. L’imagination, la représentation qui est faite d’un voyage est très importante dans la définition des besoins du touriste. Les tours opérateurs sur mesure en France cherchent à construire une expérience touristique autours des attentes des clients. La question se pose donc de connaitre la nature de la demande française.
1.3.1 Tours opérateurs sur mesure en France
Historiquement, l’organisation de voyage était assez simple. Des agences de voyages recevaient des touristes pour leur vendre des séjours, elles s’occupaient des billets d’avions et vendaient des packages créés par des tours opérateurs, lesquels allaient chercher les meilleures offres sur place auprès des agences réceptives. En résumé, nous avions donc trois acteurs qui agissaient les uns après les autres comme intermédiaire entre le voyageur et les prestations touristiques :
• Les agences réceptives : recherche et vente des prestations touristiques locales,pour les tours opérateurs.
• Les tours opérateurs : création des séjours pour les agences de voyages.
• Les agences de voyages : vente des voyages au client.
Comme on a pu le voir précédemment, l’arrivée d’Internet et de la crise ont profondément modifié le secteur. Pour de nombreux acteurs, cela s’est transformé en crise du tourisme.
L’agence de voyages Fram, par exemple, a vu son déficit en 2011 atteindre une valeur de 23 millions (en augmentation de 71% par rapport à l’année précédente). Thomas Cook, le géant Britannique, a annoncé dernièrement des pertes de 1 milliard d’Euro(22).
Cela devient d’autant plus compliqué pour les acteurs historiques qu’ils ont été rejoints par des nouveaux acteurs qui émettent des voyages :
Les tours opérateurs :
Les tours opérateurs, en règle générale, s’en sortent plutôt bien. Contrairement aux agences de voyages, ils sont connectés directement avec les réceptifs locaux. Ils ont bien compris que, même si de plus en plus de touristes peuvent organiser leur propre voyage, ils ont encore besoin d’une structure rassurante, particulièrement les familles et les personnes âgées. Leur plus-value se situe donc plus dans les conseils et la qualité du service rendu.
C’est la raison pour laquelle beaucoup de tours opérateurs se sont répartis sur plusieurs segments spécialisés ou ils pourront être plus efficaces vis-à-vis des voyageurs.
Les « pure players » web :
Les e-voyagistes (Opodo, eDreams, Expedia, etc.) mettent à disposition des voyageurs une gamme très étendue de voyages, présentée par thèmes et par destinations, à des prix négociés au plus bas. Ils ont des coûts structurels très faibles et gèrent des volumes énormes sans engagement vis-à-vis des prestataires. S’ils sont à l’origine de la baisse des prix, ils n’en supportent pas les coûts, ce qui crée une grosse pression sur toute la chaine de production.
L’émission de voyages en France est devenue extrêmement concurrentielle avec deux types d’acteurs : d’un côté Internet, qui vend du voyage avec un minimum de services, à bas prix et en très grande quantité ; de l’autre, les tours opérateurs qui accompagnent la vente de voyages de leurs traditionnels savoir-faire en matière de services. Les agences de voyages sont mises en difficulté parce qu’elles ne parviennent pas à se positionner face à ces nouveaux concurrents.
Parmi les tours opérateurs qui s’en sortent bien, les servies « sur mesure » sont les plus en forme puisque de manière générale, ce type de tourisme augmente de 10 à 15% par an. On peut le voir (cf. Figure 6(23)) avec la croissance des principaux tours opérateurs sur mesure à destination du Brésil.
Figure 6 : La croissance des principaux tours opérateurs
Les stratégies de développement sont différentes mais tous ont choisi le tourisme sur mesure. Le constat actuel est que les tours opérateurs travaillent cependant tous avec les mêmes circuits de réceptifs et ont donc beaucoup de mal à se différencier sur le fond. Ils sont donc à la recherche de nouveautés originales.
1.3.2 Cas de Comptoir des Voyages
Comptoir des Voyages, où j’ai réalisé mon stage de fin d’étude, est un cas intéressant pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il fait partie d’un groupe qui comprend plusieurs tours opérateurs thématiques. Ensuite, il représente très bien le tourisme sur mesure, dont il a fait sa marque de fabrique, et réussit à progresser dans une période difficile pour le tourisme en général.
Le Groupe Voyageur du Monde, dont fait partie Comptoir des Voyages, a commencé en 1979 par une activité touristique de long courrier. L’entreprise est rachetée en 1996 par Jean-François Rial et Alain Capestan. Ces derniers, cherchant à se démarquer de la concurrence, ont l’idée de mettre en place le concept de « voyage sur mesure ». C’est un succès puisque que le Groupe décline aujourd’hui son savoir-faire autour de plusieurs marques :
• Terre d’aventure : Spécialisation dans la randonnée et le trekking.
• Nomade Aventure : Rachetée en 2005 par Voyageur de monde, la marque offre des prestations simples avec confort basique pour des touristes qui recherchent le tourisme sportif.
• Grand Nord Grand Large : Tour opérateur spécialisé dans les voyages de découverte dans les régions polaires.
• Mer et Voyages : L’entreprise a été initialement créée en 1992 par Françoise de Tailly sur un concept de voyage en cargo.
• Chamina Sylva : Spécialiste de randonnées individuelles couvrant la France et une bonne partie de l’Europe.
• Comptoir des Voyages : Spécialiste du voyage sur mesure dans le monde entier.
• Voyageur du Monde : Spécialiste du voyage sur mesure fournissant un service plus haut de gamme.
• Allibert trekking : une des plus importantes entreprises du secteur de la randonnée, du trekking et des voyages en pleine nature, qui a récemment rejoint le Groupe Voyageur du Monde.
Toutes ces marques opèrent sur un tourisme le plus éloigné possible du tourisme de masse.
Chaque marque cible une niche différente, à l’exception de Comptoir des Voyages et Voyageur du Monde qui proposent les mêmes services. La présence des deux tours opérateurs sur le même segment permet au Groupe de mieux s’adapter à la forte croissance de ce secteur.
Comptoir des Voyages, créé en 1987, est un tour-opérateur spécialiste du voyage en individuel sur mesure. L’objectif est de pouvoir proposer aux clients des itinéraires répondant à leurs attentes à un tarif accessible. L’entreprise a comme slogan : « Le voyage sur mesure atout prix », c’est-à-dire, que le tour opérateur prépare le voyage adapté à la demande du client en proposant les gammes de prix qui conviennent au budget avancé par le client.
Pour répondre aux besoins exprimés par les clients, comme le besoin de proximité, le besoin d’être rassuré, le besoin de conseil et le besoin d’information, Comptoir des Voyages s’organise autour de comptoirs qui représentent chacun une destination, un pays ou une zone géographique.
Comptoir des Voyages vend des voyages incluant le transport aérien et les prestations sur place. Le tour opérateur est en relation avec de nombreux réceptifs locaux qui s’occupent de l’hébergement, de la restauration et / ou des activités de divertissement. L’étendue de son réseau de réceptifs est primordiale car c’est grâce à cela qu’il peut composer un voyage avec le client.
De manière générale, l’entreprise doit se démarquer de deux types de concurrences : les agences de voyages et tours opérateurs qui vendent des séjours à la carte et parfois des séjours sur mesure, et les agences en lignes qui proposent des prestations de plus en plus complètes.
Pour répondre à cette concurrence, Comptoir des Voyages mises sur deux atouts majeurs : son réseau de réceptif, qui est suffisamment important dans toutes les destinations couvertes pour créer des offres sophistiquées au plus proche des demandes des clients ; son système informatique, structuré et riche, grâce auquel les devis peuvent être réalisés rapidement malgré l’exigence de personnalisation, ce qui permet un gain de productivité suffisant pour conserver un bon rapport qualité / prix.
Comptoir des voyages cherche à être présent sur Internet car c’est un outil de communication majeur, en particulier auprès des FIT. C’est aussi et surtout devenu un outil de prospection dont la part est de plus en plus importante. C’est d’autant plus important qu’il s’agit aussi de positionner face à concurrence en ligne.
Les comptoirs sont répartis et personnalisés par destination et offrent une proximité avec le client. L’objectif est de le rassurer tout en lui montrant le côté spécialiste du comptoir qu’il a choisi. Ce positionnement est extrêmement important car c’est ce qui permet de montrer de la plus-value face aux offres concurrentes.
Le tour opérateur priorise l’immersion dans le mode de vie des populations visitées en proposant une approche originale et authentique de la destination, tel que des hébergements chez les habitants, des moyens de transport locaux, et tous les opportunités pour que le voyageur se trouve en contact étroit avec la communauté locale.
Pendant le temps que j’ai passé chez ce tour opérateur, j’ai constaté que malgré son succès, Comptoir des Voyages continue de chercher à progresser sur les prix tout en offrant des différentiels par rapport à la concurrence. Il m’est aussi paru clair que le différentiel est à rechercher du côté des prestations touristiques, dans leur qualité et dans leur diversité. Cela passe par la recherche permanente de nouveaux réceptifs dans les pays de destination avec des formules toujours plus proches des attentes des clients.
1.3.3 Etude de la demande française
Pour comprendre la nature de la demande touristique française en général, et pour le Brésil en particulier, j’ai retenu trois sources d’informations :
a) Une étude de la DGCIS
b) Une analyse des avis en ligne de voyageurs
c) Une enquête auprès des professionnels du tourisme
d) Etude de la DGCIS
La DGCIS a émis un rapport en février 2010(24) dans lequel elle analyse l’évolution du comportement des Français en termes de consommation touristique. Il en ressort que la crise économique, conjointement à la révolution des NTIC, a provoqué une prise de conscience des consommateurs. Les principaux éléments de changement sont les suivants :
• Les gens sont à la recherche de relations sociales, de contacts harmonieux et altruistes. Certaines expériences, tels que le troc, le covoiturage, ont tendance à se substituer aux offres marchandes classiques.
• Il y a une tendance au dénigrement des offres de masses pour privilégier le qualitatif.
• Certaines valeurs éventuellement contradictoires sont mises en avant : personnalisation, humanisation, juste prix.
• Il émerge un besoin de s’impliquer d’avantage dans la construction de ses vacances, c’est à dire d’être « l’acteur de ses vacances ».
• Il existe un besoin de partage à caractère local de la destination qui passe par la rencontre avec les gens et leurs modes de vies.
Ce que met en évidence cette étude, c’est tout d’abord l’envie de voyages personnalisés, sur mesure, afin de ne pas être fondu dans la masse. Il est alors question de payer le juste prix, en fonction de la prestation choisie, et non plus un prix imposé de manière opaque par des intermédiaires uniquement axés sur une offre industrialisée.
Cette étude met aussi en évidence la rencontre comme étant un critère de satisfaction important du consommateur. Le touriste veut, dans certains cas, dépasser le stade de simple consommateur. Il souhaite partager des valeurs sur son lieu de destination et se sentir accueilli sur place. En un mot, il est en attente d’hospitalité.
b) Analyse des avis en ligne
L’étude de la DGCIS peut être complétée par une analyse directe des attentes des voyageurs eux-mêmes. Pour cela, en sélectionnant le Brésil, j’ai extrait et analysé les avis en ligne sur les sites des tours opérateurs sur mesure.
Segment : Les sites des tours opérateurs choisis sont : Evaneos, Terres de Charme,Comptoir des Voyages, Planetveos. L’analyse porte sur 111 témoignages.
Méthode : J’ai extrait 13 indicateurs clés de satisfaction dans les témoignages, que j’ai ensuite compilés par témoignage. Un indicateur est renseigné quelle que soit la nature, positive ou négative, des propos communiqués en ligne.
Indicateurs clés mesurant les opinions en ligne de clients des tours opérateurs.(cf. Figure 7).
Figure 7 : Les intérêts de voyageurs
Comme les avis des voyageurs sont postés sur le site de l’entreprise qui a vendu le voyage, les avis concernent à la fois le ressenti sur leurs expériences mais aussi un retour sur les promesses des tours opérateurs sur mesure.
On note, sans surprise, que les thèmes liés à l’organisation du voyage, l’hébergement et le transport font partie des remarques les plus récurrentes (un avis sur deux). En faisant du service après-vente pendant mon stage chez Comptoir des Voyages, j’ai d’ailleurs pu constater que l’organisation du voyage fait partie des principales préoccupations en recueillant quelques retours négatifs de clients. Cela concernait en particulier les problèmes d’attentes aux transferts.
En revanche, la nourriture est très peu citée. Cela provient probablement du fait que ce service n’est pas ou peu directement fourni par les tours opérateurs, l’internaute ne juge donc souvent pas utile d’en parler.
Les avis concernant la destination Brésil (paysage, visite, guide) prennent aussi une bonne place (environ un avis sur trois), en particulier les guides dont la qualité de contact est particulièrement citée, en négatif :
« Il a fallu râler pour avoir un commentaire en français. Guide connaissant bien la forêt mais un peu feignant et surtout intéressé par la Caipirinha.(25) »(26).
Ou bien en positif :
« Nous saluons la compétence et l’amabilité des guides locaux, notamment à Brasilia ou nous recommandons tout particulièrement Madame Maria Ines (journaliste polyglotte) qui nous a fait découvrir sa ville avec passion »(27).
Dans ce dernier exemple, on note l’intérêt de la passion, c’est-à-dire que la prestation de guide a été fourni avec « le cœur » et que, de tout le voyage, c’est ce qui a le plus marqué le voyageur.
Quant à la partie « relation humaine », elle est surtout concentrée sur l’accueil qui est cité dans presque un avis sur deux. Les notions d’authenticité et de contacts locaux sont assez peu citées. Cependant, lorsque c’est le cas, les avis sont très enthousiastes et semblent relever le niveau général du voyage :
« La guide exceptionnelle : français remarquable, grande érudition, gentillesse, désir de faire partager sa ville. Elle nous fait (avec notre accord) plusieurs visites supplémentaires pendant les “temps libres” prévus au programme. Le chauffeur, qui ne parlait que le portugais, à tout de même réussi à communiquer avec nous à force de gentillesse (…). »(28)
A priori, les touristes s’attendent à être reçus avec attention et gentillesse. Quand ils vivent cette expérience, ils trouvent cela normal, n’ayant rien d’exceptionnel. Dans la recherche faite sur les opinions des voyageurs qui sont rentrés du Brésil, on remarque que la manière dont ils ont été reçus n’affecte pas beaucoup la perception générale de la destination, ni le degré de satisfaction. Cependant, quand il y a une expérience inattendue, qu’elle soit bonne ou mauvaise, elle devient importante sur la satisfaction du client.
c) Enquête auprès des professionnels du tourisme sur mesure
Enfin, pour compléter cette étude sur les besoins des clients Français, j’ai interrogé les tours opérateurs et les agences réceptives sur la manière dont elles perçoivent les attentes des clients. J’ai extrait les mots clefs ressortant de l’enquête qualitative sur les deux terrains pour les représenter sous forme de tableau et de graphique dont les résultats sont analysés ci-après.
Tableau 2 : La sensibilité du client français vis-à-vis de la qualité du service réceptif
Le tableau 2 montre que, lorsqu’il s’agit de la qualité de service, les professionnels accordent autant d’importance au côté relationnel (réceptivité, relation humaine, authenticité) qu’au côté pratique (information, animation). C’est probablement l’une des spécificités du tourisme sur mesure.
Figure 8 : Les caractéristiques du client d’aujourd’hui
La figure 8 montre que les clients du tourisme sur mesure sont perçus comme étant informés 46% et exigeants à 27%. Ce niveau d’exigence est surtout remarqué par les agences réceptives à l’image de ce témoignage :
« C’est certainement une clientèle plus exigeante que la moyenne.»(29)
(Lucas Davis-Master Receptivo à Belo Horizonte). Cela coïncide avec le profile FIT décrit précédemment.
Figure 9 : Les voyageurs et tourisme durable
Le tourisme sur mesure étant associé à la notion de nature, il paraissait intéressant de savoir si les clients s’intéressent au tourisme durable. D’après les professionnels, seuls 18% montrent un intérêt (cf. Figure 9). Cette proportion est cependant considérée comme en croissance.
Tableau 3 : Les attentes des clients français sur la destination Brésil
En ce qui concerne les attentes selon les agences de voyages, on remarque sur le Tableau 3 que la clientèle française cherche plutôt des expériences uniques et authentiques sur la destination Brésil. Les principales attentes sont le dépaysement, la rencontre avec la population et une « ambiance brésilienne ». Par ailleurs, les Français apprécient la sympathie et la convivialité des Brésiliens.
Ces différentes études et enquêtes montrent que dans le tourisme sur mesure de nombreux critères sont importants pour le voyageur. Il y a tout d’abord la découverte des beautés géographiques et humaines spécifiques au Brésil dans un rythme de voyage qu’ils ont établi sur mesure. Tout cela avec un niveau d’exigence élevé vis-à-vis de la qualité du service. Mais il y a aussi l’importance de se sentir bien reçu, ce que l’on qualifie en général d’hospitalité, qui prend de plus en plus de place dans la satisfaction client. Il est donc important que les acteurs du tourisme sur mesure, qui dans le marché du tourisme sont les plus à même d’adapter évoluer leurs offres, étudient avec attention cette composante humaine de leur métier.
1.4 Tourisme réceptif au Brésil
1.4.1 Brésil, atouts et faiblesses en tant que destination touristique
Chiffres clés(31)
Langue : Portugais
Nombre d’habitants : 192 millions (estimation, IBGE, 2010)
Monnaie : Real (BRL)
Décalage horaire : – 3h en été, – 5h en hiver (par rapport la France)
Climat : équatorial, tropical à su-tempéré selon les régions
Contexte
L’OMT a révélé un nouveau record au début 2011. L’activité touristique a augmenté de 4,4%, le continent sud-américain a montré les meilleures performances (15%), soit trois fois la moyenne mondiale. Dans la même période, le Brésil a enregistré une croissance de 11,7% (cf. Figure 10).
Figure 10 : Arrivés Internationales au Brésil
Actuellement, avec le développement économique, l’augmentation du pouvoir d’achat et un taux de change favorable, on assiste à l’émergence de la classe moyenne dans le tourisme.
De plus, les événements majeurs comme la Coupe du Monde de Football en 2014 et les Jeux Olympiques en 2016 à Rio de Janeiro contribueront à la mise en avant du Brésil dans le monde. Il faut aussi souligner les principales actions du Ministère du Tourisme brésilien ces dernières années :
• Assouplissement des accords bilatéraux en ce qui concerne l’entrée des étrangers dans le pays.
• Facilitation des procédures de délivrance des visas.
• La consolidation du Mercosur(32) comme un marché important pour le Brésil.
• Renforcement de la stratégie visant à promouvoir le Brésil à l’étranger.
• Consolidation du Brésil en tant que destination pour les événements internationaux.
Avec environ 191 millions d’habitants, le Brésil est l’une des économies les plus dynamiques dans le monde. En 2011, le pays est devenu la sixième économie, selon le dernier rapport du CEBR(33). Cinquième plus grand pays sur terre, et le plus grand pays d’Amérique du Sud, le Brésil est une passerelle vers d’autres grandes attractions sud-américaines, telles que les Andes, la Patagonie et le Macchu Pichu. Il fait frontière avec presque tous les pays d’Amérique du Sud: Surinam, Venezuela, Guyane française, Colombie, Uruguay, Argentine, Paraguay, Bolivie et Pérou.
Destination
L’une des principales caractéristiques du Brésil est sans doute sa forêt, avec la plus grande biodiversité végétale au monde, environ 1,5 millions d’espèces, y compris les vertébrés, les invertébrés, les plantes et les micro-organismes, qui représentent environ 10% des espèces existantes sur la planète(34).
L’écotourisme au Brésil est en hausse, grâce à ses grands espaces sauvages, sa grande diversité faunique et d’écosystème, de longues lignes côtières avec de magnifiques plages, un système extensif de parcs nationaux et d’unité de conservation, le tout en permettant la pratique de la plupart des formes d’écotourisme et des sports d’aventure.
La diversité du Brésil concerne aussi sa culture très vaste avec ses costumes, fêtes traditionnelles, folklore et arts culinaires.
Principaux atouts du pays
Une étude de la demande internationale au Brésil35, commandée par le Ministère du Tourisme brésilien, en partenariat avec Embratur à l’Institut de la Fondation de la recherche économique (FIPE), donne un certain nombre d’éléments chiffrés sur les attentes de touristes au Brésil.
• Un étranger sur trois indique que le voyage a dépassé ses attentes.
• Parmi les voyageurs, 41,6% viennent pour le loisir, 23,3% pour des événements d’affaires ou congrès.
• Dans la catégorie des voyages de loisirs, les Etats les plus recherchés sont, dans l’ordre, Rio de Janeiro, Santa Catarina, Paraná, Sao Paulo et Bahia. Sur le même registre, les villes les plus visitées sont Rio de Janeiro, Foz do Iguaçu, Florianópolis, Sao Paulo, Salvador et Buzios.
• 96% des visiteurs ont exprimé le désir de revenir au Brésil.
• 65% des touristes qui visitent le Brésil n’ont pas de recours aux services d’agences de voyages.
• Les sujets les plus mieux évaluées, sont : l’hospitalité (98%), la nourriture (96%), les restaurants (95%) et les hôtels (94%). Les guides touristiques, les taxis et les animations aussi ont obtenu de bonnes notes.
• Les sujets les moins bien notés sont : le prix (60% seulement considéré comme positif), les autoroutes (66,4%), le téléphone et Internet (73,8%) et la signalisation (76,5%).
Les résultats de cette recherche ont mis en avant qu’après la beauté naturelle, la culture, le climat, c’est l’hospitalité qui a marqué le plus de touristes interrogés. Il est donc important de comprendre comment une culture hospitalière peut être une valeur ajoutée déterminante d’un produit touristique. Notre conviction est que l’hospitalité est recherchée comme une opportunité de provoquer de nouveau des relations chaleureuses et affectives qui rassemblent les personnes mais qui ont eu tendance à se déliter.
Principales faiblesse du pays
En ce qui concerne les points à améliorer dans le pays, selon la recherche, Indice de compétitivité des destinations touristiques National(36) :
• Les services médicaux d’urgences ne sont pas à la hauteur.
• De nombreuses destinations n’ont pas encore les toilettes publiques en quantités suffisantes dans le voisinage des attractions touristiques.
• Les infrastructures de transports, et notamment les transports publics, ne sont pas suffisants.
• Il y a un manque de guides professionnels parlant des langues étrangères sur certaines destinations.
• Les informations touristiques sont trop rarement disponibles dans les langues étrangères.
• Certaines activités touristiques sont gérées de manière trop informelle.
• La grande majorité des destinations ne soutiennent pas la valorisation du patrimoine culturel. Il faut faire évoluer la législation pour promouvoir le patrimoine culturel.
Ce manque de professionnalisme se retrouve aussi dans mon enquête auprès de beaucoup d’acteurs du tourisme au travers des témoignages d’agences réceptives :
« Il faut présenter une bonne qualité ainsi que la disponibilité dans la prestation de service, mais il faut encore améliorer et investir dans la qualification de la main-d’oeuvre. »(37), souligne par exemple Safira Taguatar Turismo à São Luis.
Le Brésil possède des qualités propres, tant par la diversité de son patrimoine naturel, artistique et culturel, que par la convivialité de son peuple. Cependant, la croissance touristique est probablement limitée par l’absence d’infrastructures de qualité. Cette carence concerne à la fois les infrastructures touristiques comme les centres d’accueil et d’informations, mais aussi les infrastructures de base comme l’assainissement, l’accessibilité, la mobilité urbaine, les transports ferroviaires.
1.4.2 Perception de l’hospitalité au Brésil
De manière assez unanime, l’ambiance brésilienne est souvent représentée par la joie, la sympathie, la musicalité, la cordialité, la sensualité, le sourire et l’hospitalité. Les Brésiliens étant fiers de recevoir des étrangers dans leur pays, ils manifestent leur hospitalité au travers de milliers de petits gestes.
Dans « The Hospitality and Courtesy in Brazil: the country perceived by foreigners », Carlyle Tadeu Falcão de Oliveira et Paulo Emílio Matos Martins (2009) font référence au colloque sur la Culture Brésilienne de l’Hospitalité en 2006 à Sao Paulo. Durant cet évènement, une définition a été donnée par de nombreux touristes étrangers qui visitent le Brésil : « Un peuple fraternel, affectueux, spontané, cordial, authentique, joyeux, généreux, fêtard et bruyant»38. Par ailleurs, les entrepreneurs du secteur de l’hôtellerie étranger, qui ont participé au colloque, ont indiqué que la convivialité et la chaleur humaine étaient dans la manière brésilienne d’être et qu’elles constituaient un grand différentiel réceptif.
Pour renforcer cette idée de l’hospitalité en tant qu’atout culturel des Brésiliens, les auteurs font référence au sociologue Holanda: « (…) La contribution brésilienne à la civilisation sera la cordialité – nous donnerons au monde “l’homme cordial”. L’hospitalité, la générosité, vertus si vantées par des étrangers qui nous visitent, représentent, en effet, un trait qui définit le caractère du brésilien (…) » (1997 : 146)(39)
Ces différentes descriptions de l’hospitalité brésilienne correspondent à une définition très vaste de l’hospitalité dans le langage courant, qui regroupe la cordialité, l’accueil, la réception dans un pratique volontariste. Cette définition au sens large sera affinée dans la deuxième partie de ce mémoire. En ce qui concerne le Brésil, on peut analyser l’hospitalité selon deux approches : la perception de l’hospitalité au Brésil par les étrangers et le « jeitinho brasileiro ».
a) Perception de l’hospitalité au Brésil par les étrangers
Si les professionnels du tourisme au Brésil sont résolus à mettre en avant « l’hospitalité brésilienne », on peut s’interroger sur la perception de cette hospitalité par les étrangers.
Selon les recherches effectuées par la CNT – SENSUS, la recherche mondial,(40) le Brésilien est considéré comme heureux, amical, fiable et dévoué dans presque tous les pays dans le monde. Ci-dessous (cf. Tableau 4 et 5) les notes accordées au Brésil :
Tableau 4 : L’Hospitalité – CNT Sensus – Brazil total
Tableau 5 : L’Hospitalité – CNT Sensus – World total
On notera cependant que les différences de perception sont assez nombreuses selon les pays. Globalement, les plus réceptifs à l’hospitalité brésilienne sont l’Europe et le Moyen Orient. Il est assez difficile d’expliquer l’origine de ces disparités d’opinions. On peut émettre l’hypothèse qu’en fonction des cultures l’informalité liée à l’hospitalité brésilienne puisse poser des problèmes. A moins que ce soit les faiblesses structurelles et la qualité parfois défaillante du service dans le tourisme qui affectent négativement la perception de l’hospitalité. Ces problèmes structurels sont d’ailleurs mis en avant par une étude du SENAC en 2002. Elle indique clairement un faible niveau de professionnalisme lié à des lacunes dans la pratique des langues étrangères ou dans les bases des services commerciaux.
b) Le « jeitinho brasileiro »
Comment parler de l’hospitalité brésilienne sans parler de la principale caractéristique connue du Brésilien : le « jeitinho brasileiro » ? Il n’existe pas de traduction littérale à proprement parler. On pourrait parler de « la manière brésilienne » qui est à la fois une manière d’être et un arrangement. Le « jeitinho » brésilien est une manière d’être, permettant de contourner les obstacles et de briser le coté impersonnel de la bureaucratie, en privilégiant une solution cordiale du problème. En quelques mots, une sorte de « système D » institutionnalisé, fait de débrouillardise et d’astuce, où bienveillance, insouciance, connivence, et bonne volonté sont censées triompher de l’adversité.
Si ce « jeitinho » peut être considéré comme négatif, car encourageant la ruse, le déni des lois, ou le rejet du formalisme, il est aussi considéré comme porteur de dynamiques positives, comme la créativité, l’improvisation, la résolution de problèmes (Barbosa, 1992).
Cette caractéristique brésilienne a comme particularité de trouver des solutions pour tout simplifier et rendre la relation moins impersonnelle. En considérant l’hospitalité dans un univers plus large, on peut penser que l’invité, même s’il est accueilli par un établissement commercial, veut vouloir vivre cette relation de proximité et de facilité autorisée par le « jeitinho » brésilien.
L’hospitalité à la brésilienne met aussi en avant un paradoxe supplémentaire dans l’hospitalité touristique. Cette hospitalité que l’on peut qualifier d’informelle fait la réputation du Brésil mais peut aussi générer un sentiment d’inhospitalité selon des critères formels comme l’accueil dans le l’hôtellerie, le service client ou ce qu’on appelle communément l’étiquette. Dès lors, si un manque de formation est constaté au regard du professionnalisme des structures d’accueil touristiques au Brésil, peut-on pousser vers une amélioration des critères formels sans endommager ou détruire l’hospitalité Brésilienne ?
Comment concilier l’hospitalité informelle du Brésil avec la formalisation nécessaire pour sa mise en oeuvre dans une prestation touristique ?
1.4.3 Agences réceptives brésiliennes
Les agences réceptives ont pour fonction première de recevoir les touristes sur place et de les orienter vers les services touristiques. On parle en général de réceptif, agence locale ou agent local, représentant local ou DMC – Destination Management Company. Elles établissent des partenariats avec des prestataires de services touristiques locaux et créent des packages pour les touristes ou pour les agences qui émettent le voyage.
Dans leurs relations avec les tours opérateurs, leurs principales missions concernent la recherche de solutions d’hébergement, des activités, les lieux de restauration et les transferts. Les réceptifs cherchent donc à proposer un maximum de solutions pour satisfaire aux différents critères des tours opérateurs. Leur force réside donc dans leurs contacts sur place.
En ce qui concerne les transferts, c’est une activité particulièrement importante au Brésil en raison de la faiblesse des infrastructures de transport local et des préjugés sur l’insécurité qu’ont beaucoup de touristes vis-à-vis du Brésil. D’ailleurs, certaines agences possèdent leur propre flotte de bus, vans ou voiture, car cette activité est devenue centrale pour eux.
En dehors de ces services de bases, les agences proposent aussi des circuits avec ou sans guides. En fonction des régions, il s’agit de visites, de randonnées ou d’attractions locales particulières. Toutes ces activités ne sont en général pas assurées par les agences réceptives, mais par des prestataires spécialisés, qui fournissent guides spécialisés, matériel, circuit, etc. Les agences réceptives ont donc une activité d’accueil et de conseil qu’elles effectuent de manière plus ou moins poussé en fonction du rapport qualité prix qu’elles proposent.
La plupart du temps, les agences réceptives travaillent pour le compte de tours opérateurs ou d’agences de voyages. En fonction de la nature du partenariat, l’agence réceptive s’occupe de l’organisation du voyage, de l’assistance au voyageur et de l’accueil des touristes. Dans le cas du tourisme sur mesure, il arrive bien souvent que le tour opérateur se contente d’organiser le vol, le transfert et l’hébergement et redirige le touriste vers l’agence réceptive sur place pour les activités touristiques. Les produits vendus peuvent alors faire l’objet d’une commission pour le tour opérateur, tout dépendant de la nature du contrat passé.
En termes d’accueil, les niveaux sont aussi très variables. Cela va du simple SMS de bienvenue envoyé à l’atterrissage jusqu’à qu’au suivi complet du séjour avec parfois une vraie démarche d’hospitalité. Certains tours opérateurs, comme le tour opérateur Voyageurs du Monde, peuvent aussi faire appel à leurs « concierges » qui viendront compléter le service du réceptif pour fournir un support complet au voyageur.
Il arrive aussi que l’agence soit une représentante officielle locale d’un tour opérateur ou d’une agence de voyage. Cela permet au tour opérateur d’investir plus sur certaines destinations pour gagner des parts de marchés.
Enfin, les agences réceptives peuvent trouver directement leurs clients. Ce n’est pas très courant, à la fois parce qu’un réceptif a du mal à gagner un volume de client suffisant, surtout lorsqu’on parle de touristes étrangers. Ensuite, parce que ce type de relation commercial B2C(41) n’est pas forcément très rentable pour un réceptif qui se voit obligé de traiter directement avec le client. Cela amène souvent beaucoup de problèmes et prend beaucoup de temps, surtout pour les petites structures.
Au Brésil, les agences réceptives sont principalement localisées à Rio de Janeiro et dans la région Nord-Est, ce qui correspond à la demande des principales destinations brésiliennes (Annexe 1). La règlementation du pays impose qu’une agence soit enregistrée auprès du Ministère du Tourisme et qu’elle exerce son activité conformément aux normes et recommandations établies par cet organisme. C’est en particulier elle qui est responsable de la sécurité de ses clients. De manière générale, les agences réceptives sont de petites structures. Certaines agences réceptives, globalement les plus grosses, sont aussi agences de voyages.
Les offices du tourisme en générale ont des caractéristiques d’agences réceptives. Dans le cas du Brésil, on parle de « Escritório Brasileiro de Turismo » plus connu comme l’EBT.
L’EBT est présent dans des divers marchés tels que, l’Allemagne, l’Espagne, les Etats-Unis, la France, l’Italie, le Japon, le Portugal, le Royaume-Uni, l’Amérique du Sud et le Mexique. Son rôle principal est de promouvoir et de faire connaître le tourisme brésilien dans le marché international, offrant des alternatives qui contribuent à la consolidation de l’image du pays en tant que destination touristique attractive et compétitive(42).
Pour savoir davantage cerner l’action et l’organisation de l’EBT, j’ai rencontré la responsable d’EBT en France, Madame Beltrão, à l’Ambassade brésilienne à Paris. Selon elle, Embratur(43) est l’organisme responsable de toute la promotion marketing du tourisme au Brésil. Et son travail se restreint uniquement à aider les touristes par le biais de conseils.
L’EBT n’ayant pas de bureau public, les touristes en France qui souhaitent se renseigner sur le Brésil sont contraints de prendre rendez-vous par email. Selon Madame Beltrão, l’EBT en France n’est pas encore structuré et n’a même pas de documentation à offrir au voyageur prend rendez-vous. Pour le client Français qui souhaite se renseigner sur le Brésil, Internet et les agences de voyages sont des sources infiniment plus simples et plus pratiques.
En ce qui concerne l’EBT au Brésil, il est présent sous forme de petits centres d’informations touristiques, installés aux principaux points de transit touristiques, comme les aéroports. Cependant ses taches sont limitées à répondre aux questions des touristes. Il n’y a pas d’activité de vente ou de conseils personnalisés. En résumé, cela montre que le professionnalisme du Brésil dans le tourisme est encore débutant.
1.4.4 Les agences réceptives, clefs de voute du tourisme sur mesure
« Auparavant, nous nous contentions du service de conseil avant le voyage, sur lequel nous sommes très forts, avec des spécialistes de plus en plus pointus par région sur les pays programmés, mais cela ne suffit plus. Nous devons offrir le même service pendant et après le voyage… On ne peut pas exister en tant que voyagiste si on n’a pas une valeur ajoutée très pertinente pour le client.(44)» Entretien avec Jean-François Rial
– Voyageur du Monde
Jean-Francois Rial, PDG du groupe Voyageur du Monde, résume ici les points clefs du tourisme sur mesure : apporter de la valeur ajoutée avant, pendant et après le voyage. Dans l’offre des tours opérateurs sur mesure, les agences réceptives apportent leur participation à cette valeur ajoutée dans l’avant et le pendant.
« L’avant », parce que grâce à son réseau de services, elle peut proposer les meilleurs produits touristiques, qui seront ensuite conseillés par les spécialistes du tour opérateur.
C’est l’agence réceptive qui fournira donc les expériences inusitées que le concurrent n’aura pas. « Le pendant », parce que c’est elle qui est responsable, sur place, du bon déroulement du voyage. Elle peut assurer l’accueil des touristes pour les sécuriser dès leur arrivée. Elle garantit la qualité des transferts et de l’hébergement, et celle des activités touristiques. Enfin, c’est elle qui va contribuer à transmettre un sentiment d’hospitalité à la fois dans son propre suivi du voyage mais aussi via ses choix de prestataires de services touristiques.
Finalement, en dehors de son activité commerciale, le tour opérateur a pour mission de donner l’état d’esprit général du voyage. Il est ensuite dépendant des agences réceptives qu’il aura choisies. C’est ce que résume Anita Besson de l’agence Matueté à Sao Paulo : « L’agence réceptive est une des pièces clef dans la création de voyages car s’il échoue, tout tombe à l’eau »(45).
Le tour opérateur termine sa prestation en gérant l’après voyage, qui consiste à discuter avec le client pour savoir si tout s’est bien passé, ce qui va lui permettre de maintenir une relation avec le voyageur mais aussi recueillir ses impressions sur la prestation de l’agence réceptive. Le tour opérateur agit donc comme le chef d’orchestre, c’est à lui de décider ce qui est important entre le prix, la qualité du service, l’hospitalité.
Cette approche idéaliste du tourisme sur mesure est à confronter avec la réalité des terrains touristiques. Que ce soit pour le touriste qui cherche à organiser son voyage tout seul, ou pour le tour opérateur sur mesure, l’objectif est de trouver les agences réceptives qui répondent aux critères suivants :
– Bonne prise en charge du voyageur
– Prestations touristiques de bonne qualité et si possible originales
– Les meilleurs prix
Pour les agences réceptives, il s’agit aussi de se positionner face aux attentes des émetteurs de voyage.
La relation entre les tours opérateurs et les agences réceptives étant cruciale, je les ai questionnés sur leurs attentes réciproques au cours de l’enquête qualitative. L’extraction des mots clefs dans leurs réponses donne le résultat suivant (cf. Tableau 6) :
Tableau 6 : La relation entre les tours opérateurs et les agences réceptives
Pour les tours opérateurs, le contact de proximité avec les clients, la qualité des offres, le suivi, le professionnalisme, les activités insolites et bons prix sont les principaux besoins.
Ce que résume assez bien Anne-Carole Coupin, de Comptoir des Voyages Amérique Latine :
« La disponibilité du réceptif pour nos clients ; son adaptation aux éventuels aléas (climatiques par exemple) ; la justesse des services avec un bon choix des agents locaux pour assurer les services ; une offre large de services et excursions ; un bon contact avec le client sur place (sms de bienvenue ou un appel), car ils sont la représentation de Comptoir des Voyages localement ; de bons prix, aussi ! »
Les agences réceptives attendent des agences émettrices plus de rapidité et une meilleure transmission des informations. Elles souhaitent un partenariat basé sur la confiance qui dépasserait le statut de sous-traitant.
On remarque donc des difficultés dans le fonctionnement entre ces deux maillons de l’organisation du voyage. Les tours opérateurs attendent plus d’efficacité, d’originalité, de suivi pour le bon prix, tandis que les agences réceptives veulent plus de moyens pour offrir les prestations attendues. C’est un rapport commercial entre ces deux groupes où l’instauration d’un rapport gagnant-gagnant semble essentielle.
1.5 L’hospitalité comme critère d’attractivité dans le tourisme sur mesure
Sous l’impulsion d’Internet et de la crise financière, le tourisme a évolué de manière significative. Une partie de plus en plus importante des voyageurs, à la fois plus informés et aussi plus sensibles au sens du voyage, souhaitent prendre le contrôle de ses séjours. Les tours opérateurs sur mesure l’ont bien compris et peuvent s’appuyer sur les agences réceptives, acteurs majeurs de la mise en oeuvre des voyages sur mesure, pour atteindre des marchés de niches. Le voyage ayant pris par ailleurs une signification différente, plus ouverte sur la rencontre d’un pays et de ses habitants, l’hospitalité est donc devenue un critère important que les professionnels du tourisme doivent prendre en compte. Dans ce domaine, le Brésil peut compter sur une forme d’hospitalité latente qui lui est spécifique.
« Dans une économie tirée par le secteur immatériel, l’hospitalité devient un des critères déterminants de l’attractivité des lieux. Hospitalité qui révèle certainement des images ludiques, des souvenirs de vacances et du travail local d’équipement et d’esthétisation des lieux, mais qui va au-delà car localement, le lien social a été travaillé par l’accueil et la présence coutumière de l’autre …. Dans cette hospitalité, il y a donc du réel, une saisie imaginaire et une ambiance. Une situation naturellement attractive pour l’individu autonome et créatif contemporain. » (Viard, 2000: 120).
Dans ce texte, qui résume assez bien le contexte du tourisme sur mesure, Jean Viard, considère l’hospitalité comme « un des critères déterminants de l’attractivité des lieux », en particulier pour « l’individu autonome et créatif ». C’est précisément ce qu’ont montré la plupart des enquêtes : l’hospitalité est un élément de satisfaction important pour le voyageur plus autonome, en particulier le FIT.
3 Organisation Mondiale du Tourisme.
4 http://www.insee.fr.
5 Etudes Eurostaf. Disponible sur : < http://www.veilleinfotourisme.fr/publication-en-ligne-de-l-etude-surles-mutations-et-restructurations-des-operateurs-francais-du-voyage–39823.kjsp > (Consulté le 04/06/2012).
6 Nouvelles perceptions de la valeur des offres touristiques, Février 2010. Étude disponible sur : http://http://www.veilleinfotourisme.fr/nouvelles-perceptions-de-la-valeur-des-offres-touristiques-quelsimpacts-pour-les-operateurs–60049.kjsp. (Consulté le 09/05/2012).
7 Consulté le 13/07/2012
8 Baromètre 2012 du Cabinet Raffour Interactif : Site : http://www.raffour-interactif.fr
9 http://www.airbnb.fr.
10 http://www.couchsurfing.org.
11 http://www.tripadvisor.com
12 Global Distribution Systems.
13 Un pure player est une entreprise dont l’activité est menée exclusivement sur Internet.
14 Disponible sur : http://www.journaldunet.com/cc/10_tourisme/tourisme_marche_fr.shtml (Consulté le 20/07/2012).
15 Ibidem.
16 Cité par Merle, 2005.
17 Le fonctionnement des tours opérateurs sur mesure sera abordé plus loin dans la partie « Tours opérateurs sur mesure en France ».
18 Op. cit.
19 Source : http://veilletourisme.ca/2011/02/10/marche-fit-mieux-connaitre-cette-clientele-autonome/.(Consulté le 05/06/2012).
20 Ibidem.
21 Ibidem.
22 Source : Zone de turbulences pour les grands tour-opérateurs – Le Monde.fr | 26.07.2012, par Audrey
Garric. Disponible sur : < http://www.lemonde.fr/economie/article/2012/07/26/zone-de-turbulence-pour-lesgrands-tour-operateurs_1737407_3234.html >. (Consulté le 27/07/2012).
23 Création auteur – Source : http://www.verif.com.
24 Op. cit.
25 Boisson brésilienne alcoolisée.
26 L’avis sur le site Planeveos.
27 Ibidem.
28 Ibidem.
29 Traduction auteur : É sem dúvida uma clientela mais exigente.
30 Traduction auteur : « O Brasil está muito caro pelo nível de serviço que oferece. Porém, os clientes franceses gostam muito da simpatia e receptividade dos brasileiros. ».
31 Données issues du site : http://www.mfe.org/index.php/Portails-Pays/Bresil.
32 Marché commun du Sud.
33 Centre for Economics and Business Research.
34 Source : http://www.agencia.cnptia.embrapa.br.
35 Estudo de demanda internacional no Brasil. Source : < http://www.turismo.gov.br/> – 10/10/2012. Disponible sur : <http://www.turismo.gov.br/turismo/o_ministerio/publicacoes/cadernos_publicacoes/38EstudoDemandaInternacional.html. >. (Consulté le 06/05/2012).
36 Traduction auteur : Índice de Competitividade do Turismo Nacional – Rapport Brésil 2010 / Luiz Gustavo Barbosa Medeiros (Organisateur – Ministère du Tourisme, de 2010 et le plan national du tourisme 2007/2.
37 Traduction auteur : « Apresentar com uma boa qualidade quanto a disponibilidade e também quanto a prestação de serviços, mas ainda precisa de melhoria e investimento na qualificação de mão de obra. ».
38 Traduction auteur : « Um povo irmão, afetivo, espontâneo, cordial, autêntico, alegre, generoso, festeiro ebarulhento. ».
39 Traduction auteur : « A contribuição brasileira para a civilização será a de cordialidade – daremos ao mundo o “homem cordial”. A lhaneza no trato, a hospitalidade, a generosidade, virtudes tão gabadas por estrangeiros que nos visitam, representam, com efeito, um traço definido do caráter do brasileiro (…). ».
40 Traduction auteur : Pesquisa Mundial – 15/08 a 10/10/2001. Disponible sur : <http://www.cnt.org.br/Paginas/Pesquisas_Detalhes.aspx?p=6>. (Consulté le 12/06/2012).
41 B2C : Business to Consumer décrit une relation commerciale entre un professionnel et un particulier, en opposition à B2B (relation entre professionnel).
42 Source : http://www.turismo.gov.br.
43 Source : http://www.turismo.gov.br/turismo/o_ministerio/embratur
44 Source : Tourhebdo 06 MAI 11 Hebdomadaire Paris OJD : 3963.
45 Traduction auteur : « O prestador de serviço é uma das peças chaves na montagem de uma viagem pois se ele falhar tudo pode ir por agua abaixo ».