Key Account Manager chez Social Lab.
Social Lab est une agence spécialisée dans la stratégie du social média pour les
marques.
Ilaria Badjir : Qu’est-ce que le digital peut apporter aux marques ?
Peter Meyers : L’avantage avec le digital, c’est que les clients d’une marque, dès qu’ils
ont besoin d’une information, vont aller chercher la réponse à leur question sur le site
internet de la marque. Ils vont être influencés par les autres personnes des réseaux
sociaux qui ont liké une page. Le digital devient de plus en plus important, car c’est le
premier point de contact avec les clients d’une marque, mais aussi avec les nonclients
! Pour les marques de luxe, leurs produits sont beaux, donc le digital va
permettre leur visualisation. Car maintenant, les gens cherchent d’abord des produits
sur internet plutôt que d’aller en magasin, pour des raisons de rapidité et de facilité.
Les gens aujourd’hui veulent avoir l’information au moment où ils en ont besoin… Ils
ne vont donc pas attendre entre 9 et 18h qu’une boutique soit ouverte pour avoir leur
renseignement… Le digital est très important, car il peut répondre à tout moment aux
demandes des clients.
I.B : Les grandes maisons de luxe représentent une certaine durée dans le temps,
s’inscrire dans l’enjeu du digital est important pour leur permettre une plus grande
pérennité ?
P.M : Oui, car rester où tu es est égal à faire marche arrière, il faut suivre les
tendances… Les consommateurs sont rois, ce sont eux qui achètent ; donc si le
consommateur n’a plus l’impression que la marque suit les tendances, son image va
elle aussi faire marche arrière et rester « vieillotte ». Les personnes plus âgées qui ne
vont pas sur internet ne seront plus là demain et si rien n’a été fait pour attirer les
jeunes consommateurs vers la marque… Ils n’auront pas envie d’être associés à
quelque chose qui a une image vieillissante, ils iront forcement chez un conçurent qui
a pris la peine d’investir dans le digital…
I .B : Comment se bâtit l’identité d’une marque sur internet et les réseaux sociaux ?
P.M : Ce qui est très important avec les réseaux sociaux, avant de se lancer dans cette
aventure, il faut qu’une marque sache bien connaitre ses consommateurs : qui je veux
toucher et comment je peux les toucher ? Car chaque cible a une manière différente
de communiquer. On appelle le « Gif to get », on demande toujours quelque chose qui
a une valeur ajoutée aux consommateurs pour qu’elle puisse interagir avec la marque.
Il faut donc bien analyser quelle serait la valeur ajoutée de la marque pour un
consommateur et traduire ça en digital… Ça peut donner par exemple sur la page
Facebook d’une marque : donner la possibilité aux consommateurs de créer son
propre modèle de sac…
I .B : Est-ce qu’à terme le digital pourra remplacer tous les autres supports ?
P .M : Je dirais non, car il existe un mix média qui s’appelle le « Paid, Own & Earned » .
Le « Paid » correspond aux publicités faites dans les magazines, télévision, radio, etc.
Car on paye un certain service.
« Own » c’est tout ce que l’on possède : Chaine de magasins, site internet,
newsletter… Tout l’étalage que l’on peut faire.
Et « Earned » ce sont les gens qui parlent de ta marque : Forum , page Facebook, like…
Chaque partie de ce modèle a un certain poids dans le média mix et le digital ne
reprendra jamais tout sur lui parce que les autres seront toujours complémentaires.
Car les cibles sont multiples…
Mais quand tu communiques, le digital peut toujours venir s’associer, quand tu
retrouves une publicité dans un magazine, il est facile de transporter ça vers le digital.
L’inverse est plus dur, car il est plus cher de communiquer avec des médias « Above
the line ».
I .B : Vu les coûts réduits du digital, il permet une grande augmentation de la
visibilité d’une marque ?
P.M : Les informations communiquées par les médias above the line sont regroupées
par exemple dans un spot télévisé de trente secondes, une masse d’information à
saisir en une seule fois très rapidement. Tandis qu’avec le digital, tu peux prendre le
même message et le multiplier à l’infini !
I .B : Le digital risque-t-il de faire perdre l’image de prestige d’une marque de luxe ?
P.M : Les marques de luxe sont nécessaires pour permettre aux gens de rêver, de
s’évader…
Mais je ne crois pas que leur présence sur les réseaux sociaux va rendre l’image d’une
marque moins « élitiste ». Les valeurs restent similaires et le prix aussi ! Les réseaux
sociaux permettent de se connecter aux clients potentiels.
I .B : La nouvelle application qui fait fureur chez les marques de luxe : Instagram,
vous en pensez quoi ?
P .M : C’est un super bon outil pour les jeunes qui adorent prendre beaucoup de
photos…Mais Instagram reste encore peu intégré comparé à Facebook ou Twitter par
exemple. Je trouve que ce n’est pas encore très nécessaire d’être présent sur ce
réseau. Cependant, Marc Jacob est la marque qui communique le mieux pour l’instant
sur Instagram à échelle internationale.
I.B : L’interactivité peut être considérée comme la clé du succès du digital ?
P.M : L’interactivité, c’est le résultat d’avoir du contenu qui est bien ciblé, car tu auras
touché les bonnes personnes au bon moment. Il faut ouvrir la conversation avec les
internautes pour qu’ils puissent parler de ta marque positivement…Les réseaux sociaux
sont utiles aussi pour écouter lorsqu’il y a des mécontentements des clients envers la
marque. Et permettre à la marque de réagir et améliorer son produit !
I .B : Dior a récemment lancé son propre magazine on line, du contenu que l’on
retrouve uniquement sur internet et via les applications mobiles, le digital est donc
vraiment un acteur à part entière aujourd’hui ?
P. M : Aujourd’hui le « storytelling » est devenu très à la mode, les marques veulent
raconter des histoires.On crée tout un récit autour d’une pièce, comment est-elle faite,
tout le travail qu’il y a derrière la création… Les gens sont séduits et vont vers ce
contenu créatif et original.
I .B : L’avenir du digital, vous le voyez comment ?
P.M : Ca sera encore plus intégré dans la vie quotidienne des gens, il sera impossible
de vivre sans. Je me souviens en 1996 quand j’ai eu pour la première fois internet chez
moi, c’était incroyable ! Maintenant, si tu tombes en panne d’électricité et que tu n’as
plus la télévision, radio ou internet chez toi, tu te sens coupé du monde…
I .B : Le digital vient-il en réponse au déclin des supports papier ?
P .M : La presse reste encore super intéressante pour tout ce qui est interview de fond,
dossier spécial… Mais pour l’actualité, les gens vont la trouver sur internet, car c’est
beaucoup plus rapide.
Par exemple, tous les matins, je vais consulter le site internet du journal papier que je
pourrais acheter, mais que je ne fais pas ! Je vais sur le site web, car j’ai besoin de
savoir les choses rapidement, je n’ai pas le temps de parcourir un journal papier en
entier. Il faudra alors à l’avenir trouver le bon mix entre digital et média off line. L’off
line devra intégrer encore plus le on line. On appelle ça le 360 degrés.
I .B : La présence des marques sur le digital sous-entend un enjeu marketing ?
P.M : Oui, comme je l’ai expliqué, pour être présent sur les réseaux sociaux, il faut en
avoir une bonne connaissance… Connaissance que les marques ne maitrisent pas
encore assez, voilà pourquoi elles font appel à des agences comme nous pour
développer leurs stratégies, faire un « Content plan ». Cela aura plus d’impact et de
profit pour la marque que si elle le fait elle-même. Ce n’est pas facile pour une marque
d’être présente partout, car il faut beaucoup de budgets… Mais c’est à nous de dire
aux marques sur quels réseaux ou plateformes, elles doivent être présentes pour que
ça soit le plus avantageux pour elles.
On voit souvent que les pages, vidéos etc. renvoient vers l’e-shop de la marque. Le
digital est très intéressant pour calculer le retour sur investissement, contrairement au
média above the line. On peut toujours avoir une traçabilité, savoir combien de gens
ont visualisé la vidéo, combien ont cliqué sur le lien. Une campagne de publicité sur la
télé n’apportera jamais de chiffres aussi précis…
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