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Section 1 – Le renforcement de la transparence au sein de la directive

27. La directive peut constituer l’acte approprié pour harmoniser les législations car elle unifie le droit tout en permettant aux Etats membres de procéder à des ajustements dans l’application, qui prennent en compte les circonstances et particularités nationales. Ainsi la proposition de directive va proposer des aménagements à plusieurs niveaux, notamment la participation et le contrôle des associés, les règles de fonctionnement de l’assemblée générale, l’utilisation des produits de droit d’auteur et produits financiers et la distribution des montants.

28. La participation des associés à la vie de leur société peut contribuer à son bon fonctionnement. Le droit commun des sociétés prévoit une articulation de l’exercice des pouvoirs entre divers organes sociaux dont la composition est plus ou moins large. Cette articulation permet de concilier l’objectif de participation de tous les associés et les impératifs d’efficacité de la vie économique. Ceci qu’il s’agisse d’un pouvoir de décision ou de contrôle car la qualité de l’information aux associés est déterminante.

Le triptyque décision, contrôle, information est consacré par la proposition de directive. Il permet d’accueillir les formes de gouvernance unitaire ou dualiste, avec conseil d’administration et conseil de surveillance. Il offre également la possibilité de déléguer certaines des compétences de l’assemblée générale(31).

29. Concernant les règles de fonctionnement de l’assemblée générale, la définition de ses pouvoirs est très détaillée. En effet l’assemblée générale est le lieu de rassemblement de tous les associés, elle a donc un rôle central dans le système de décision et de contrôle au sein de la société. Il lui est également reconnue un rôle prépondérant concernant les décisions les plus importantes, en particulier pour ce que concerne la nomination et la révocation des dirigeant, les statuts, les constitution de garanties et de sûretés, les règles de répartition, la politique générale d’investissement des produits de droit d’auteur, la politique de répartition des droits aux titulaires et les règles de prélèvement sur les produits de droits d’auteur(32). Conformément au principe de proportionnalité(33) la proposition de directive laisse aux Etats une marge de manoeuvre. Notamment pour ce qui concerne le caractère ponctuel ou permanent de la délégation, la détermination de l’organe compétent pour exercer cette compétence déléguée, l’objet de l’interdiction d’une délégation concernant la nomination des dirigeants.

30. Pour la gestion des produits de droits d’auteur, l’article 10.3 de la proposition de directive indique qu’exceptés leurs frais de gestion, les sociétés de gestion collective ne sont pas autorisées à utiliser ces produits de droits d’auteur pour leur propre compte(34). On peut prendre comme exemple d’utilisation autorisé celle de produits financiers, qui résultent principalement des délais entre perception et versement des droits, aux fins de couvrir les charges de gestion, répond en définitive aux intérêts des ayants droits en permettant de stabiliser, voire de diminuer les retenues statutaires. En effet les frais engagés par la société pour son développement bénéficient aux membres, mais les sociétés doivent reverser la plus rapidement possible les produits financiers aux ayants droits car le placement de produits de droits d’auteur peu diminuer de manière factice les frais de gestion.

31. Pour permettre une répartition plus rapide l’article 12.1 de la proposition de directive prévoit un délai d’un an(35). Mais en cas de difficultés objectives le texte prévoit des exemptions au respect de ce délai. L’article 12.2 ne prévoit aucune prescription pour les actions en réclamation des droits qui relèvent de la législation de chaque Etat membres. En France l’article L321-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose que les actions en paiement des droits perçus par ces sociétés civiles se prescrivent par dix ans à compter de la date de leur perception, ce délai étant suspendu jusqu’à la date de leur mise en répartition.

32. Dans son article 15.2 la proposition de directive énonce que les tarifs appliqués pour les droits exclusifs reflètent la valeur économique des droits négociés et du service fourni par la société de gestion collective. Dans son arrêt « Sena » du 6 février 2003(36), la Cour de Justice de l’Union européenne a considéré dans le considérant 37 que la rémunération équitable qui représente la contre prestation de l’utilisation d’un phonogramme commercial, en particulier à des fins de radiodiffusion implique que son caractère équitable soit analysé au regard de la valeur de cette utilisation dans les échanges économique. La notion de valeur dans les échanges a été reprise par les arrêts « Kanal 5(37) » et plus récemment par l’arrêt « Premier League(38) » qui vient préciser que pour être appropriée, la rémunération demandé par le titulaire de droits en contrepartie d’une autorisation d’exploitation doit être en rapport raisonnable avec la valeur économique de la prestation fournie. La Cour de justice se prononce à chaque fois sur la valeur des droits telle qu’elle se dégage aux yeux de l’exploitant et de son public.

33. Pour la résolution des litiges, l’article 35 prévoit que les Etats membres mettent en place un organe de règlement des litiges, indépendant et impartial. La proposition de directive suggère ainsi une instance qui viendrait agir avant d’entamer une procédure judiciaire. La disposition n’est pas tout à fait claire et il faut savoir si l’Etat pourra confier cette mission à une juridiction de droit commun ou s’il devra créer une juridiction spéciale. Les éléments proposés par la directive vont être sujets à discussion et font naître certaines interrogations.

31 Article 8 de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant : « la gestion collective des droits d’auteur et des droits voisins et la concession de licences multi-territoriales de droits portant sur des oeuvres musicales en vue de leur utilisation en ligne dans le marché intérieur. »
32 Article 7 de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant : « la gestion collective des droits d’auteur et des droits voisins et la concession de licences multi-territoriales de droits portant sur des oeuvres musicales en vue de leur utilisation en ligne dans le marché intérieur. »
33 Article 69 du Traité du le fonctionnement de l’Union européenne C83/47.
34 Article 10.3 de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant : « la gestion collective des droits d’auteur et des droits voisins et la concession de licences multi-territoriales de droits portant sur des oeuvres musicales en vue de leur utilisation en ligne dans le marché intérieur. »
35 Article 12.1 de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant : « la gestion collective des droits d’auteur et des droits voisins et la concession de licences multi-territoriales de droits portant sur des oeuvres musicales en vue de leur utilisation en ligne dans le marché intérieur. » Les États membres veillent à ce que les sociétés de gestion collective distribuent et paient régulièrement et avec diligence les montants dus à tous les titulaires de droits qu’elles représentent. Les sociétés de gestion collective procèdent à cette distribution et à ces paiements au plus tard douze mois à compter de la fin de l’exercice au cours duquel ont été perçus les produits de droits d’auteur, à moins que des raisons objectives, liées notamment aux déclarations des utilisateurs, à l’identification de droits ou de titulaires de droits ou au rattachement à des titulaires de droits des informations dont elles disposent sur des oeuvres et autres objets, ne les empêchent de respecter ce délai. Les sociétés de gestion collective procèdent à ces distributions et paiements avec exactitude, en réservant un traitement égal à toutes les catégories de titulaires de droits.
36 CJCE, 6 février 2003, 6ème chambre, affaire C-245/00, SENA.
37 CJCE, 11 décembre 2008, 4ème chambre, affaire C-52/07, Kanal 5 Ltd, TV4 AB contre STIM.
38 CJUE, 4 octobre 2011, grande chambre, affaires jointes C-403/08 et C-429/08, FAPL Ltd et al. Contre QC Leisure et al, et Karen Murphy contre Média protection Services Ltd.

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