Immédiatement après le passage de l’ouragan Katrina en 2006, P. BUCKLEY, J DOROSHOW et B HAMDAN du « Centre pour la Justice et la Démocratie » et membres du AIR, ont établi un rapport en collaboration avec JR HUNTER, membre de la fédération des consommateurs d’Amérique. Ce rapport intitulé « The Insurance industry’s troubbling response to hurricane Katrina » met d’une part en évidence les dysfonctionnements des pouvoirs publics et des compagnies d’assurance dans la gestion des grandes catastrophes climatiques sur le territoire américain, et d’autre part, introduit un certain nombre de propositions afin de moraliser l’industrie de l’assurance.
Le rapport rédigé par le AIR fait état de la proposition du « Consumer Federation of America » de créer un moratoire des risques naturels. En effet, le 16 Septembre 2005, cette association envoya une pétition aux divers commissaires des assurances de Louisiane, du Mississippi et de l’Alabama, afin de recommander certaines actions qui pourraient protéger les assurés américains des dispositions prises par l’industrie de l’assurance au lendemain du passage de Katrina, et qui leurs seraient préjudiciables.
En effet, il avait déjà été constaté qu’après le passage de l’ouragan Andrews en 1992, certaines compagnies d’assurances telles que « Allstate Insurance Company » avaient refusées le renouvellement de centaines de milliers de polices d’assurances. Ces refus étaient alors justifiés par le fait que les habitations concernées étaient situées dans des zones à trop forts risques, et représentaient donc une menace financière pour l’industrie de l’assurance. Le AIR et le CFA pouvaient donc légitimement penser que des décisions similaires allaient être prises après le passage de Katrina en 2005.
Très peu de temps après l’envoi de la pétition, le « Département des Assurances de la Louisiane » a ainsi émis des règles urgentes de déontologie, qui visaient à s’appliquer à tous les assureurs établis en Louisiane et qui visaient à prohiber les résiliations abusives ou les refus de renouvellement de polices d’assurance dans les zones touchées par l’ouragan.
Toutefois, on ne peut que déplorer l’absence de création d’un véritable moratoire en tant que tel. L’établissement de règles déontologies est, certes, une avancée majeure pour l’industrie de l’assurance, mais il ne faut pas oublier que ces règles n’ont été prises que pour un seul état : la Louisiane. Là encore il apparaît que le fédéralisme américain représente un véritable frein à la mise en place de mesures concrètes et efficaces pour une modernisation de l’industrie de l’assurance et de la couverture des catastrophes naturelles.
Dans l’idéal, il conviendrait en effet de mettre en place des mesures nationales, ou à défaut, des mesures locales, mais qui concerneraient tous les états du Golfe du Mexique.
Par ailleurs, un des nombreux problèmes qui a fait suite au passage des ouragans aux Etats Unis est le fait que les assureurs ont tendance à utiliser ces phénomènes comme une excuse pour accroître injustement les tarifs de leurs polices. Dans la lettre envoyée le 16 Septembre 2005, le CFA demanda également aux divers commissaires en assurance des états touchés de geler les tarifs des cotisations, afin que le marché puisse rester compétitif. Alors qu’après le passage de l’ouragan Andrews, une telle hausse était plus ou moins justifiée par le fait que les compagnies d’assurance américaines étaient au bord de la faillite, une hausse des tarifs après le passage de l’ouragan Katrina était, en effet, vu d’un très mauvais oeil par les organisations de défense des consommateurs.
En effet, selon le CFA, la situation économique des assureurs en 2005 était plus que correcte, avec des provisions largement suffisantes pour couvrir une bonne partie des dommages. Un gel des tarifs des cotisations paraissait alors tout à fait justifié, afin que les propriétaires puissent continuer à s’assurer sans que l’industrie de l’assurance ne fasse de profits immoraux après la survenance de la catastrophe. Malheureusement, force fut de constater que la lettre envoyée par le CFA est demeurée sans réponse sur ce point.
Enfin, le AIR et le CFA recommandaient également, dans leur rapport, une véritable réorganisation du National Flood Insurance Program (cf. supra). Selon ces deux lobbies, l’ouragan Katrina a révélé qu’un nombre beaucoup trop élevé de structures étaient en réalité construites dans des zones à très fort risques, alors que le programme NFIP ne prend généralement pas en charge ces immeubles bâtis en zones à risques. En conséquence, un trop grand nombre d’américains ne peuvent pas être assurés pour le risque d’inondation, et ce malgré l’existence du NFIP qui est sensé représenter une alternative au marché de l’assurance habitation classique. De plus, selon AIR et le CFA, le NFIP permet aux compagnies d’assurance d’appliquer des tarifs beaucoup trop élevés pour certaines habitations, sans pour autant en assumer corrélativement les risques financiers. C’est pour cette raison que le CFA recommande une réforme des règles en matière de construction, ainsi qu’une véritable implication de l’Etat américain dans la prévention des risques.
Selon le rapport susmentionné, l’objectif final de ces deux lobbies serait que tous les propriétaires américains puissent bénéficier d’une couverture pour leur habitation, peu importe la zone dans laquelle elle est située, afin de mutualiser correctement les risques. Ces organisations recommandent également la systématisation des polices multirisques complètes sur les nouvelles constructions, qui seraient émises pour une période minimale de cinq ans, et qui pourraient éventuellement être cédées en même temps que l’immeuble. Enfin, le dernier objectif du AIR et du CFA est de convaincre les politiques américains de légiférer en matière de tarifs et de franchises, afin de les standardiser à une échelle nationale et de les appliquer à toutes les compagnies d’assurance du pays.
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