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Section 1 : L’obligation de sécurité

ADIAL

L’obligation de sécurité est une obligation d’origine jurisprudentielle (§1) qui a par la suite été consacrée dans la législation laquelle est particulièrement guidée par la volonté de protéger le consommateur (§2).

§1) Une création d’origine jurisprudentielle

L’obligation de sécurité a été reconnue en 1911 à propos du contrat de transport de personnes(18) et ne concernait pas à l’origine le contrat de vente(19). La consécration de cette obligation de sécurité de résultat a ensuite permis son extension progressive à d’autres contrats dont l’exécution était susceptible de porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens du cocontractant, notamment à des contrats portant à la fois sur des services et sur des biens. Par exemple, il a été admis que les hôteliers, restaurateurs et débiteurs de boisson sont soumis à une obligation de sécurité, laquelle concerne « aussi bien les locaux de l’établissement ou ses dépendances, que les boissons et aliments servis(20) ».

Ce n’est qu’en 1964 qu’une telle obligation a été énoncée en matière de vente de produits(21), les arrêts ultérieurs rendus par la Cour de cassation ayant confirmé cette position et précisé les contours de cette obligation. L’obligation de sécurité est notamment autonome et distincte de la garantie des vices cachés car elle ne nécessite pas l’existence d’un vice(22). Il convient de préciser qu’une telle obligation est tout à fait applicable en matière de vente de produits et matériaux de construction ; elle pèse donc sur le simple vendeur mais également sur le fabricant.

Dans un arrêt en date du 11 juin 1991, la Cour de cassation a défini l’obligation de sécurité comme celle qui « consiste à ne livrer que des produits exempts de tout vice ou de tout défaut de fabrication de nature à créer un danger pour les personnes ou pour les biens(23) ». Cependant, « la victime ne bénéficie pas d’une garantie de plein droit des dommages subis(24) » : la faute du fabricant vendeur ou du négociant n’a pas à être établie, mais la victime doit tout de même prouver la dangerosité du produit(25).

La Haute juridiction a également précisé que l’obligation de sécurité du vendeur est non seulement contractuelle (elle engage alors la responsabilité contractuelle du vendeur en vertu de l’article 1147 du Code civil(26)), mais aussi extracontractuelle(27).

Il est possible de s’interroger sur la persistance de cette obligation de sécurité autonome du fait de la transposition de la directive européenne du 25 juillet 1985 relative aux produits défectueux par la loi du 19 mai 1998(28). En effet, la Cour de Justice des Communautés Européennes a condamné la France le 25 avril 2002 en rappelant la vocation de la directive à « l’harmonisation totale des régimes de responsabilité du fait des produits défectueux dans les Etats membres » et en énonçant que seuls subsistent les régimes de responsabilité « reposant sur des fondements différents tels que la garantie des vices cachés ou la faute(29) ». La Cour d’appel de Bordeaux, dans un arrêt en date du 6 octobre 2006, semble admettre que cette obligation est vouée à disparaître(30).

A l’heure actuelle, aucun texte du Code civil ne fait référence à l’obligation de sécurité en matière de contrat de vente(31). Sa consécration législative a été opérée dans le Code de la consommation, ce qui est révélateur d’une volonté de protéger le consommateur.

§2) La législation guidée par la volonté de protéger le consommateur

L’obligation générale de sécurité est issue des lois Scrivner (10 janvier 1978) et Lalumière (21 juillet 1983) et est matérialisée à l’article L 221-1 du Code de la consommation, lequel dispose que « les produits et services doivent, dans des conditions normales d’utilisation ou dans d’autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présenter la sécurité à laquelle on peut s’attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes(32) ».
Les produits et services mis sur le marché doivent satisfaire à cette obligation de sécurité. Ceci vise bien évidemment les matériaux de construction. En cas de non-respect de cette obligation, les produits sont interdits ou réglementés.

Par la suite, l’ordonnance du 22 août 2008, qui a fait suite à la transposition de la directive du 3 décembre 2001, précise les critères permettant l’évaluation de la sécurité des produits ainsi que la manière selon laquelle est appréciée la conformité des produits par rapport aux normes en vigueur.

Toutefois, ces dispositions énoncent principalement des règles préventives et la victime qui souhaiterait engager la responsabilité civile du fabricant/négociant de matériaux de construction devra agir sur le fondement des articles 1386-1 et suivants du Code civil. Nous étudierons ce régime par la suite, il s’agit en effet d’un régime spécial de responsabilité.

Outre l’obligation de sécurité, les fabricants/négociants de matériaux de construction sont également soumis à des obligations de renseignement et de conseil.

18 Cass. Civ., 21 nov. 1911, aff. Zbidi, DP 1913, I , p.249, DP 1912, I, p.73
19 KULLMANN (J.), Lamy assurances, Editions Lamy, 2012, n°2268; VEAUX-FOURNERIE (P.) et VEAUX (D.), L’obligation de sécurité dans la vente, Juris Classeur, 2002, p. 3 ; CHAUMET (F.), Les assurances de responsabilité de l’entreprise, 5è ed. L’argus de l’assurance, 2011, p. 253.
20 VEAUX-FOURNERIE (P.) et VEAUX (D.), L’obligation de sécurité dans la vente, Juris Classeur, 2002, p. 5
21 Cass. 1ère civ., 20 octobre 1964, n°62-10.999, D.1965, jur., p.62, JCP G 1965, II, n°14150
22 Cass. 1ère civ., 16 mai 1984, n° 83-11.843, D.1985, jur., p.485, RTD civ.1985, p.179
23 Cass. 1ère civ., 11 juin 1991, n°89-12.748, Bull. civ. I, n°201
24 KULLMANN (J.), Lamy assurances, Editions Lamy, 2012, n°2268
25 Dictionnaire permanent, Editions Législatives, 14 janvier 2011, p. 3373
26 Dictionnaire permanent, Editions Législatives, 14 janvier 2011, p. 3373
27 Cass. 1ère civ., 17 janv. 1995, n°93-13.175, Resp.civ. et assur.1995, comm. n°123 et 131, D.1995, jur., p.350
28 CHAUMET (F.), Les assurances de responsabilité de l’entreprise, 5è ed. L’argus de l’assurance, 2011, p. 254
29 CJCE, 25 avr. 2002, aff. C-52/00, D.2002, p1670
30 CA Bordeaux, 2è ch., 2 oct. 2006, RG n°04/04174, Resp. et assur. 2007, comm.164
31 VEAUX-FOURNERIE (P.) et VEAUX (D.), L’obligation de sécurité dans la vente, Juris Classeur, 2002, p. 3
32 CHAUMET (F.), Les assurances de responsabilité de l’entreprise, 5è ed. L’argus de l’assurance, 2011, p. 254 ; KULLMANN (J.), Lamy assurances, Editions Lamy, 2012, n°2270

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