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SECTION 1 – Mise en jeu de la responsabilité du souscripteur à l’égard du bénéficiaire ?

ADIAL

Les dispositions de l’article L. 132-12 du Code des assurances aménagent au profit du
bénéficiaire une action directe en vertu de laquelle il peut exiger de l’assureur l’exécution de
sa prestation, ou, le cas échéant, des dommages-intérêts à raison d’une faute qu’il aurait
commise, lui-même ou son agent.
Ainsi, une décision de la Cour d’Appel de Besançon (2e ch. civ, 17 avril 2007 – R.G. n°
05/00148) a admis que l’action directe justifie l’intérêt à agir en contestation des conditions de
rachat d’un contrat d’assurance-vie, si la personne qui agit en justice prouve être bénéficiaire
du contrat. (A défaut, elle n’a aucun droit d’agir pour contester la régularité ou la validité du
rachat par le souscripteur). Peut-on supposer par extension que le bénéficiaire puisse exercer
une action contre l’assureur fautif dans l’exécution de la clause d’arbitrage ?
Deux questions se posent : celle de l’intérêt à agir, qui, s’il existe, induit de s’interroger sur la
teneur du préjudice subi. Il convient, à notre sens, de distinguer la situation du bénéficiaire à
l’égard du contrat, selon qu’il aura ou non accepté le bénéfice du contrat.

§ 1 – Situation du bénéficiaire non acceptant

Par l’effet d’une fiction juridique d’origine légale, le bénéficiaire désigné au contrat au jour
du décès de l’assuré est supposé bénéficiaire dès le début de la vie du contrat115. Peut-il
légitimement tirer de cette fiction l’intérêt à agir en justice en raison de mauvais choix
d’arbitrage ?
L’on peut envisager qu’il cède son droit, même non fixé, c’est à dire sans qu’il ait été
formalisé par l’acceptation (qui le fige désormais). Cette hypothèse peut laisser penser que
son droit a une consistance dès avant le décès de l’assuré. Toutefois, dans la réalité, même le
cas d’une cession ne semble qu’une hypothèse d’école, et ce, justement parce qu’il ne reste
que potestatif : le souscripteur garde la liberté d’écarter à tout moment le bénéficiaire désigné
au profit d’un autre.
Le droit du bénéficiaire non acceptant n’est certain qu’à la date de la prestation, et donc quelle
qu’ait été l’allocation des actifs antérieurement. C’est la raison pour laquelle nous ne pouvons
qu’écarter l’hypothèse d’un recours contre le souscripteur. Le bénéficiaire non acceptant ne
pourra pas démontrer son intérêt à agir même pour des arbitrages malheureux qui auront pu
réduire sa prestation à néant. Et ce d’autant moins que la désignation bénéficiaire aura été
faite à titre libéral, c’est-à-dire sans contrepartie en faveur du souscripteur. Et d’autant moins
encore que le bénéficiaire aura pu ignorer pendant toute la durée du contrat avoir été désigné
comme bénéficiaire : il aurait d’autant moins de moyens de tirer argument de l’antériorité d’un
contrat dont il ignorait jusqu’à l’existence. Un préjudice indemnisable est difficile à concevoir
dans ce contexte.

§ 2 – Situation du bénéficiaire acceptant

Toute autre est la situation du bénéficiaire ayant accepté le bénéfice du contrat, selon un
formalisme désormais édicté par la loi, qui en tire également des conséquences en créant un
véritable statut au bénéficiaire acceptant116. Le droit du bénéficiaire est comme figé.
D’éventuel, il devient un droit certain, dont l’exercice demeure toutefois conditionnel : le
bénéficiaire est garanti de toucher la prestation, sous réserve que l’assuré décède pendant la
période du contrat.
Lorsque le contrat a été accepté, le souscripteur se voit interdire tout rachat ou avance sur le
contrat, ce qui vise à garantir la substance du droit au bénéfice. Peut-on en conclure que le
bénéficiaire pourrait reprocher au souscripteur d’avoir atteint la substance de son droit en
effectuant des arbitrages qui auront dévalorisé sa prestation ?
L’intérêt à agir du bénéficiaire acceptant découle du statut reconnu contractuellement et
aménagé par la loi. Mais qu’en est-il de l’existence d’un préjudice indemnisable ? Imaginons la
situation d’un bénéficiaire désigné à titre onéreux, un créancier que le souscripteur aurait
désigné au contrat et dont il aurait accepté de fixer les droits en agréant son acceptation.
L’absence de libéralité justifierait que le bénéficiaire subisse un préjudice dans la substance de
son droit, acquis en contrepartie d’une autre obligation.
Mais le raisonnement atteint ses limites dans la mesure où la consistance de ce droit est la
prestation d’assurance, telle que le contrat la prévoit, et à laquelle l’arbitrage ne déroge pas
dans ses modalités puisqu’il aura été aménagé conventionnellement. Autrement dit, le contrat
préexiste au droit du bénéficiaire, dont il ne tire pas plus de droits qu’il n’est prévu
contractuellement. Dès lors que la valorisation de la prestation est conventionnellement
modifiable, le bénéficiaire ne peut tirer argument ni de l’existence de la faculté d’arbitrage, ni
de son exercice, car il aura agréé les termes contractuels en acceptant le bénéfice.

115 Article L132-12 « […] Le bénéficiaire, quelles que soient la forme et la date de sa désignation, est réputé y
avoir eu seul droit à partir du jour du contrat, même si son acceptation est postérieure à la mort de l’assuré. »

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