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Section 1 : Une opportunité business

L’environnement et le développement durable au-delà de leur définition sociétale sont de nouveaux secteurs économiques. Les énergies renouvelables et les produits moins énergivores comme les vélos et véhicules électriques sont nouveau sur le terrain de jeu économique. Le climat, plus précisément la lutte contre le réchauffement climatique est une opportunité de croissance et de rentabilité pour les entreprises. L’assurance innove afin d’accompagner le développement de ces produits (A) d’une part et redéfinit ses garanties afin d’intégrer ces nouveaux produits et les nouvelles normes qui les encadre (B).

A- Accompagner le développement de nouveaux produits

Les énergies renouvelables ne représentaient en 2012 8 % de la consommation intérieure brute d’énergie en France, loin de l’objectif des 12 %(282). Le secteur des assurances a, pour autant, fait le nécessaire afin de s’adapter à ces nouveau biens et services et propose à ses assurés, grands risques comme particuliers, des produits d’assurance novateurs et incitatifs aux comportements vertueux.

Dans la continuité des engagements pris avec la Charte pour une assurance responsable de janvier 2009, les produits d’assurance sont une dimension de la prise en compte du secteur des enjeux climatiques. En proposant des couvertures pour des produits et biens de consommation ayant une empreinte carbone moins importante, l’assurance contribue aux côtés de ses assurés à la lutte contre le réchauffement climatique. En 2010, 136 200 véhicules hybrides et gaz de pétrole liquéfié et 2 400 véhicules électriques étaient dénombrés dans le parc automobile français.(283)

L’assurance propose des produits plus adaptés et des primes réduites pour l’acquisition de bien dits « propres ». La GMF offre le contrat « Bio-bonus » qui garantit une réduction de 5% sur le montant de prime appelée si le sociétaire assure un véhicule de moins de cinq ans avec des émissions de moins de 115g de CO2 par km parcouru. AXA se positionne avec des produits très détaillés dans le domaine : et offre des réductions de primes allant jusqu’à 50% en cas d’utilisation de véhicules hybrides, électriques ou GPL. Il s’agit de formules très innovantes. La première, intitulée « Libre voiture » est proposée en partenariat avec le loueur UCAR pour l’acquisition d’une véhicule en leasing et pour toutes locations de courte durée annexe. La seconde formule est un peu plus classique, il s’agit d’une assurance kilométriques, le « forfait 8000 km » qui permet d’obtenir des réductions de prime par rapport aux contrats plus classiques. Allianz offre trois formules kilométriques (4 000, 7 000 ou 9 000 km) permettent une économie jusqu’à 25 % du tarif auto tout en conservant les mêmes garanties et services qu’en kilométrage illimité. Si les assurances kilométriques ne sont pas nouvelles, elles permettent in fine de réduite l’empreinte carbone car l’assuré s’engage, sous contrôle de l’assureur, à utiliser son véhicule pour effectuer une distance en-deçà du seuil prédéfini au contrat. Une surprime, pénalité contractuelle, est alors appliquée en cas de dépassement du seuil, assurance obligatoire pour le volet de responsabilité civile, la déchéance ne pourrait pas être appliquée de manière sociétale.

En habitation, Swiss Life propose une assurance Multirisque habitation, couplant une garantie dommages aux biens et responsabilité civile, qui vise, en sus, à couvrir le particulier producteur d’énergie solaire, photovoltaïque ou éolienne contre les dommages corporels, matériels et immatériels susceptibles de survenir à l’occasion du raccordement de l’installation au réseau public ou imputable au fonctionnement de l’installation ainsi que les réclamations de tiers. AXA, de son côté propose une police dédiée aux équipements « Développement Durable » que sont les panneaux solaires, pompes à chaleur (géothermie) et éoliennes. Cette police, le « Pack Energies Nouvelles » est une assurance de choses qui permet l’indemnisation des biens précités. La police prévoit également un remboursement de frais supplémentaires par le truchement du Chèque Vert(284), si les équipements indisponibles suite à un sinistre et que l’assuré doit avancer les frais d’un moyen de chauffage dans l’attente d’un remplacement ou d’une réparation des biens.

Pour les professionnels du secteur énergétique renouvelables, Allianz France offre une gamme très développée de produits dédiée aux entreprises « Allianz Energies Renouvelables ». Il s’agit d’une déclinaison de contrats « multirisques » destinée aux exploitants d’installations photovoltaïques, et notamment les installateurs de panneaux photovoltaïques lorsque ces derniers sont intégrés au bâti pour leur fonction de production d’électricité destinée à la revente ; cette offre est également destinée aux exploitants d’éoliennes terrestres ou de centrales hydroélectriques, dédiées exclusivement à la production d’énergie électrique. La police est innovante car elle couvre les dommages subis par l’installation ainsi que les pertes d’exploitation en résultant et la responsabilité civile. De plus, dans le cadre de travaux de bâtiment(285), la multirisque a l’avantage de garantir le maître d’ouvrage de l’installation de panneaux photovoltaïques en cas de bris interne et de pertes pécuniaires consécutives au bris garanti, en complément de la garantie Dommages-Ouvrage(286).

L’assurance incite aux comportements vertueux de ces clients. Par exemple, la GMF propose depuis 2008, le contrat « Eco- pass »au sein de sa gamme de produits «responsables »(287). Ce produit est destiné aux sociétaires, agents de la fonction publique qui empruntent les transports en commun en plus de véhicule personnel. Il s’agit d’une mesure incitative car les primes sont réduites de 10% pour les sociétaires de la cible. Les risques d’accident de la circulation couvert sont diminués si le véhicule assuré n’est pas utilisé et que les transports en commun, à l’empreinte carbone plus faible, lui sont substitués. Dans la même logique Swiss Life, a lancé en en 2008, un produit d’assurance auto pour garantissant une réduction de 10% sur le tarif en affaire nouvelle pour les « véhicules propres »(288). La Parisienne, du Groupe PROTEGYS propose un contrat d’assurance « automobile écologiquement responsable » qui propose également des réductions tarifaires aux assurés détenteurs d’un pass Navigo ou d’un abonnement Vélib.

Tous ces nouveaux produits favorisent la pénétration des biens et services conformes aux enjeux du développement durable. La part des énergies renouvelables et des produits à empreinte carbone limitée se trouve favorisé par la politique légale et réglementaire qui fixe des objectifs principalement calendaires de mise en conformité avec les enjeux de développements durables de certains domaines. L’assurance, une fois de plus doit innover et redéfinir ses garanties et engagements contractuels en réponse aux mutations de l’environnement.

B- Redéfinition des garanties

Afin de favoriser le développement de la politique de lutte contre le réchauffement climatique et de contribuer à un meilleur taux de pénétration des biens et services orientés vers le développement durable, la législation évolue. Sous l’impulsion européenne, les pouvoirs publics français ont décliné un corpus de normes innovantes pour les immeubles comme le DPE(289) ou la RT 2012(290). Sous ces acronymes, sont définies de nouvelles normes de conformité bâtimentaire impératives et l’assurance doit redéfinir ses garanties notamment pour les polices de « construction » à savoir Dommages-Ouvrage et Responsabilité Décennale et en assurance habitation. Le diagnostic de performance énergétique est un certificat à valeur informative quant à la consommation énergétique d’un logement.

Il est obligatoire depuis le 1er janvier 2006 pour toutes transactions immobilières qu’il s’agisse d’une acquisition ou d’une location. Il est issu d’une volonté européenne. La directive européenne du 16 décembre 2002(291) relative à la performance énergétique prévoit l’instauration de « certificats de performance énergétique » obligatoires au sein des Etats membre. Elle a été transposée au sein de la loi (292) du 9 décembre sur la 2004 sur la simplification du droit et au travers de l’ordonnance du 5 juin 2008(293) sur la construction. S’il doit, pour être valable, être réalisé par une entreprise agréée, il n’a qu’une valeur informative, il ne tient pas le vendeur ou le loueur si les performances énergétiques prévues au DPE ne sont pas atteintes ou respectée. Afin d’inciter à la rénovation énergétique, les assureurs ont adapté leur garantie et incluent des références au DPE. En revanche, compte-tenu du caractère non-engageant de ce certificat, il n’est pas un critère de tarification. Par exemple, la GMF a introduit des références au Diagnostic de Performance Energétique dans son contrat de multirisques habitation « Eco-pass » et s’engage à une réduction de prime allant jusqu’à 5% sur 5 échéances si le logement assuré fait l’objet d’un bilan A, B, ou C soit une faible consommation énergétique. La MAAF propose 40€ de réduction à tout sociétaire souscripteur du contrat de multirisque habitation « Tempo habitation » faisant réaliser un DPE volontairement, ce qui va au-delà de la simple adaptation contractuelle et incite à des comportements vertueux des particuliers. Les produits d’assurance de responsabilité civile professionnelle couvrant les diagnostiqueurs ont prévue désormais des références au DPE et prévoient la couverture des réclamations de tiers(294) en cas de diagnostic erroné.

Dans la même logique, un vaste chantier de rénovation thermique a été décidé par les pouvoirs publics français dans le cadre des orientations retenues par les lois Grenelles I et II. Ce cadre législatif est le fondement de la mise en place des principes de réglementation thermiques 2012, dites RT 2012. La Loi Grenelle 1 du 3 Aout 2009, implique dans son article 4 que la RT 2012 a pour objectif de limiter la consommation d’énergie primaire des bâtiments neufs à un maximum de 50 kWhEP/ (m² par an) en moyenne. Cet objectif doit s’accompagner au sens de la loi d’une « évolution technologique et industrielle significative pour toutes les filières du bâti et des équipements, d’ un très bon niveau de qualité énergétique du bâti, indépendamment du choix de système énergétique, et d’un équilibre technique et économique entre les énergies utilisées pour le chauffage et la production d’eau chaude sanitaire. »(295) Ces objectifs sont le but des principes de la RT 2012 qui est place depuis le décret de 2012(296).

Elle s’applique à tous les permis de construire déposés à partir du 1er janvier 2013 pour l’ensemble des typologies de bâtiments neuf (tertiaire, habitation, mixte…). Ces bâtiments doivent désormais répondre à des « obligations de résultats minimums » par un label nommé BBC(297) qui regroupe le besoin climatique, la consommation d’énergie primaire, et le confort en été du bâtiment. La RT 2012 fixe des obligations de performances énergétiques et s’impose aux assureurs par le biais de la responsabilité civile décennale. Les bâtiments construits doivent être conformes aux exigences de basses consommations énergétiques, à défaut l’impropriété de la construction peut être soulevée. Hervé Leblanc de la SMABTP explique que c’est l’un des raisons qui fait que les assureurs souhaitent dissocier la performance de la notion de responsabilité décennale(298). La SMABTP (299)propose d’ailleurs une garantie visant à l’obtention du label Bâtiment Basse Consommation énergétique (BBC).

Cette garantie s’applique à l’achèvement des travaux, à défaut d’atteinte du niveau de performance énergétique auquel le constructeur s’est engagé afin de répondre exigences du label. Cette garantie est une garantie de pertes financières qui permet t le paiement des frais de dépose, repose et remplacement des ouvrages exécutés et/ou des éléments d’équipement installés dont les immatériels consécutifs ou bien le remboursement du préjudice subi par l’acquéreur. Par ailleurs, Gras Savoye est en cours d’élaboration d’une garantie financière annexe se rapprochant d’une caution(300) qui pourrait intervenir sur dix ans après la réception de l’ouvrage. Police parallèle à la responsabilité civile décennale, la garantie de dommages-ouvrage devra également faire le fruit d’adaptations et les clauses-types seront sujettes à modifications « de limiter les recours inopportuns à des expertises » selon Hervé Leblanc de la SMA BTP. Le courtier Verspiren a choisi de rejoindre en janvier 2013, l’Institut Français pour la Performance des Bâtiments qui se positionne en faveur d’une construction durable et naturellement produite par le secteur de la Construction. Cet Institut est une consultance mutualisée entre de grands acteurs du monde de l’immobilier, de la construction, de l’industrie et de l’énergie. Cette posture renforce l’image de partenaire de long terme du courtier envers le secteur de la Construction.

Les évolutions législatives dédiées à la lutte contre le réchauffement climatique permettent la mise en en place de nouveaux biens et services. L’assurance s’adapte en modifiant ses usages et ses garanties contractuelles. Mais elle doit également se renouveler afin d’un apparaitre comme un acteur de l’économie nationale voire internationale, responsable et innovant pour une meilleur prise en considération de l’impact du climat sur les activités humaines. On constate sur le marché l’apparition de produits très innovants comme l’assurance soleil et un changement de positionnement. Les assureurs sont devenus des acteurs actifs de la lutte contre le réchauffement climatique et l’essor du développement durable. ( Section 2)

282 http://www.alternatives-economiques.fr/energies-renouvelables–le-retard-francais_fr_art_1134_57748.html
283 Source : buzz Assurance « Développement durable et assurance » http://www.buzzassurance.com/fr/buzzgroup/buzzgroup_developpement_durable et Insurance Information Institute
284 http://www.lechequiervert.fr/
285 Au sens de l’ordonnance du 8 juin 2005
286 Régie par les articles L.242-1 et suivants du code des assurances.
287 http://www.gmf.fr
288 http://www.swisslife.fr
289 Diagnostic de performance énergétique
290 Rénovation thermique 2012
291 globale du bâtiment.
Article 7 de la Directive n° 2002/91/CE du 16 décembre 2002 sur la performance énergétique des bâtiments – Certificat de performance énergétique
1. Les États membres veillent à ce que, lors de la construction, de la vente ou de la location d’un bâtiment, un certificat relatif à la performance énergétique soit communiqué au propriétaire, ou par le propriétaire à l’acheteur ou au locataire potentiel, selon le cas. Le certificat est valable pendant dix ans au maximum. Pour les appartements ou les unités d’un même immeuble conçues pour des utilisations séparées, la certification peut être établie sur la base:
— d’une certification commune pour l’ensemble de l’immeuble lorsque celui-ci est équipé d’un système de chauffage commun; ou
— de l’évaluation d’un autre appartement représentatif situé dans le même immeuble.
Les États membres peuvent exclure du champ d’application du présent paragraphe les catégories visées à l’article 4, paragraphe3.
2. Le certificat de performance énergétique du bâtiment inclut des valeurs de référence telles que les normes et les critères d’évaluation en usage, afin que les consommateurs puissent comparer et évaluer la performance énergétique du bâtiment.
292 Loi n°2004-1343 du 9 décembre 2004
293 Ordonnance n°2005-655 du 8 juin 2005 relative au logement et à la construction
294 Le DPE doit être effectué par et aux frais de l’acquéreur ou du bailleur. L’acheteur et le Preneur sont donc tiers par rapport au diagnostiqueur professionnel.
295 Loi Grenelle I du 3 Aout 2009.
296 Décret n° 2012-1269
297 BBC : Bâtiment à basse consommation énergétique
298 Argus de l’assurance http://www.argusdelassurance.com/acteurs/une-reglementation-qui-donne-des-sueurs-froides.54106
299 http://wwwsmabtp.fr
300 Branche 15, article R.321-1 du code des assurances

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