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Section 2 : Application et conséquences sur le marché de l’assurance

L’environnement est une composante qui a subi de nombreuses évolutions dans sa prise en charge contractuelle aux travers des polices et notamment d’ASSURPOL (A), la mise en place de la LRE induit des changements contractuels et il devient légitime de s’interroger sur son degré obligatoire (B).

A- Environnement et contractualisation assurantielle

Dans le domaine des atteintes à l’environnement induites par des catastrophes de nature accidentelles – technologiques, ou graduelles – pollutions, les assureurs jouent un rôle majeur par la prise en garantie des conséquences pécuniaires des dommages idoines à ce type d’atteintes. Les garanties d’atteintes à l’environnement sont classiquement couvertes par le truchement des polices de responsabilité civile générale et dans les contrats d’assurance de dommages incluant la garantie du recours des voisins et des tiers. Jusque dans les années 1960, la plupart des contrats d’assurance de responsabilité civile ne faisaient pas de référence explicite aux dommages de pollutions, seuls étaient mentionnés les événements soudains, imprévus et extérieurs à la victime et à la chose endommagée. Le risque d’ordre catastrophique était clairement inclus dans le corps de texte des polices.

Progressivement, dès 1974, les contrats ont nommément exclus les dommages causés aux eaux, airs et les diverses formes d’atteintes à l’environnement, que ce soit les bruits, odeurs, radiations, rayonnement ou modifications de températures. Cependant, ces garanties restaient disponibles sur le marché de l’assurance en passant par des rachats d’exclusions. Les exclusions générales en l’occurrence étaient les dommages consécutifs à une action volontaire, à une défectuosité du matériel et des installations, au non-respect de la réglementation en vigueur. De plus, par essence, les dommages autres que corporels, matériels et patrimoniaux étaient exclus du champ d’application des stipulations contractuelles assurantielles.

Les coûts induits par les réclamations fondées sur de la pollution « graduelle »(218) sont exclus de la contractualisation assurantielle depuis le 1er janvier 1994.

En 1977, le marché de l’assurance a mis en place une structure originale de co-assurance et de réassurance en réaction à l’instauration du régime des ICPE(219) de nature agricoles ou industrielles. Il s’agit du dispositif ASSURPOL qui se nommait auparavant GARPOL. Les garanties sont acquises sur la base du fait générateur et couvrent expressément les conséquences pécuniaires des dommages résultant d’une atteinte à l’environnement non accidentelle. Le contrat proposé par ce pool s’intitule CARE(220) et couvre en outre les rejets polluant l’air, l’eau, le sol, mais également les nuisances telles que les odeurs, bruits, vibrations, rayonnements excédents la mesure des obligations ordinaires de voisinage. Le contrat CARE est une police de type multirisques avec une couverture de responsabilité civile, telle que décrite et des garanties de pertes pécuniaires(221) tels que les frais de dépollution. La souscription est très encadrée, notamment par le biais d’un questionnaire très précis et focalisé sur la prévention des risques sur les sites à prendre en garantie et un audit de risques est systématique pour chaque site.

B- La LRE et les adaptations contractuelles des polices d’assurance

La version 2009 du contrat CARE intègre les dispositions de la LRE de 2008. Il convient de souligner que ce n’est pas le volet de responsabilité civile qui a été étendu mais le volet des pertes pécuniaires par la mise en place d’un remboursement des frais mis à la charge de l’exploitant du fait de la LRE. En sus, dans cette version du corps de texte du contrat, les distinctions entre pollutions graduelles et accidentelles sont abolies, le qualitatif s’applique au dommage. La pollution incluse dans la garantie est immédiatement ou progressivement constatable. L’avenant au contrat-type de décembre 2012 étend la garantie aux « conséquences pécuniaires de la responsabilité civile de l’assuré en raison d’un préjudice écologique. » Pour l’instant, rien n’est indiqué quant à l’intégration de cette modification dans les contrats en cours. Elle pourrait être automatique ou au cas par cas. Quoiqu’il en soit, cet avenant témoigne de la volonté d’adaptation du marché de l’assurance aux évolutions juridiques majeures.

Par ailleurs, un autre type de contrats est disponible sur le marché de l’assurance, ce sont les contrats de responsabilité civile « atteintes à l’environnement ». Ils existent spécifiquement depuis 1974 et garantissent les conséquences financières de réclamations de tiers en raison de préjudices liés à une pollution accidentelle, résiduelle, continue, synergique, ou potentielle provoquée tant par des substances gazeuses, solides ou liquides que par les odeurs, bruits vibrations, rayonnements, lumières, électricité, radiations et changement de température ou tout autre phénomène causant ou contribuant à engendrer une pollution à l’environnement.

Demeurent inassurables en raison d’un défaut d’aléa, les pollutions chroniques inhérentes à des rejets ou émissions générés par le fonctionnement normal des installations, seuls sont pris en garantie les dommages fortuits. De même, les non-conformités ou défectuosités connues sont typiquement exclues. Ces derniers éléments relèvent clairement de la politique de gestion des risques de l’entreprise, politique accompagnée par l’Assureur, ce qui lui permet par effet mécanique de réduire les risques de survenance d’un sinistre mais également de mieux maîtriser ses engagements contractuels. L’assurance relative aux risques environnementaux, accidentels ou graduels, implique un certain degré d’ingérence légitime dans la politique de gestion des risques dans l’entreprise. La garantie accordée par le pool ASSURPOL est fortement prescriptrice de mesures de prévention des risques.

Enfin, compte-tenu des dernières évolutions juridiques présentées, il est légitime de se pencher sur la question de l’obligation d’assurance. L’assurance de ces risques ne revêt pas de caractère obligatoire pour le moment. Corrélativement, l’obligation d’assurance pour la responsabilité civile idoine aux risques d’atteintes à l’environnement serait une suite logique aux dernières évolutions présentées. Le caractère obligatoire de ce volet de responsabilité civile était prévu à l’origine dans divers textes internationaux, tels que la Convention de Lugano de 1993 et le Livre Vert de la Communauté Européenne de la même année. Malgré une position doctrinale en faveur de l’obligation d’assurance, le Livre Blanc de la Commission Européenne en date de l’an 2000 préconise une position facultative. A ce titre, la directive (222) instaurant le régime de responsabilité objective de responsabilité environnementale reste sur une position volontariste des entreprises en matière de couverture assurantielle de la responsabilité civile y afférant.

Les écueils induits par le régime des catastrophes naturelles et la responsabilité accrue des exploitants et entreprises en cas d’atteinte à l’environnement font peser un poids économique croissant sur le marché de l’assurance et par conséquent les capacités en présence peuvent s’avérer insuffisantes pour absorber les coûts liés à l’indemnisation d’un sinistre catastrophique, qu’il soit généré par un agent naturel d’une intensité anormale ou par un risque technologique.
Les assureurs et réassureurs tendent à trouver de nouvelles pistes de solutions qui tendent à redéfinir de manière durable leur rôle d’acteurs responsables et engagés contre le réchauffement climatique (Partie 3).

Les systèmes législatifs de réparation des risques naturels et technologiques ont permis une meilleure réparation des victimes, obligeant ainsi les assureurs à intervenir dans ce processus de réparation.

Au-delà de cette obligation, le secteur de l’assurance a pris l’initiative d’offrir des démarches et des produits au service du développement durable et ce, pour des raisons d’image et économiques.

218 Soit non accidentelle stricto sensu
219 Loi du 19 juillet 1976 énoncée aujourd’hui à l’article L.511-1 du code de l’environnement.
220 Contrat d’Assurance des Risques Environnementaux dans sa version de 2009 avec avenant modificatif de 2012.
221 Les frais couverts sont notamment les frais d’opérations préventives, les frais d’opérations ayant pour but d’éviter l’aggravation d’un sinistre survenu et garanti. Les pertes d’exploitation sont une extension proposée depuis 2010.
222 Directive européenne du 21 avril 2004 transposée en droit français par la LRE du 1er août 2008.

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