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Section 2 : Divers projets de réformes, bien souvent laissées lettres mortes

Après le passage des ouragans Katrina et Rita, les gouverneurs des états touchés ainsi que le gouvernement fédéral ont eu une grande prise de conscience. Un certain nombre des dispositifs mis en place à l’époque avaient montrés leurs défaillances et il était donc urgent de mettre en place des réformes. Un florilège de propositions ont donc vu le jour, que ce soit pour régler les problèmes concernant la prévention des grandes catastrophes, que pour améliorer la prise en charge de ces risques par les compagnies d’assurance.

Afin de tenter de réduire les coûts des sinistres liés aux ouragans, l’état du Mississippi vota une loi au mois de Mars 2011 afin de créer le « Mississippi Windstorm Mitigation Coordinating Council », dont les membres sont chargés d’établir diverses recommandations en matière de prévention, et notamment en matière de construction afin de rendre les habitations du Mississippi plus robustes face aux ouragans.

A l’échelle nationale, et toujours en matière de prévention, c’est le projet de réforme de la FEMA qui fit beaucoup plus de bruit. Ce projet de réforme baptisé « FEMA Reoragnization legislation in the 109th Congress » et établit en Juin 2006 sous la direction de Keith BEA et de Henry HOGUE, a permis de mettre en avant un certain nombre de changements nécessaires à une meilleure prise en charge de la période pré et post catastrophe, par l’agence fédérale américaine.

Le projet de réforme de la FEMA prévoyait notamment que cette agence redeviendrait un cabinet indépendant, dont le directeur aurait la possibilité de contacter le Président des Etats Unis afin que ce dernier puisse déclarer l’état d’urgence et ce, à tout moment. Ce projet visait également à multiplier les exercices de préparation aux évènements catastrophiques de type ouragans, un peu sur le modèle de l’exercice Pam, mais de manière plus systématique. Le projet de réforme de la FEMA visait également un grand nombre de nouvelles mesures, notamment en ce qui concerne la réorganisation interne de l’agence, la création d’un budget indépendant, ainsi que des efforts en matière de communication. Toutefois, force fut de constater que ce projet ne fut jamais voté, puisque la FEMA reste toujours aujourd’hui une agence insérée au sein du « Department of Homeland Security ».

Par ailleurs, un certain nombre de projets de réforme ont surgi concernant le problème de l’accès à l’assurance, et notamment celui de la tarification des polices d’assurance habitation.

En avril 2011, le gouverneur de l’Alabama, Robert BENTLEY, créa une commission de sept membres afin d’étudier ce problème de la montée des tarifs de l’assurance habitation et de proposer des solutions pour que cette assurance devienne plus abordable pour les citoyens américains. Cette commission fut en réalité créée en raison de la pression des propriétaires des zones côtières, qui souhaitent que les assureurs rendent publiques leurs données de sinistralité et notamment les données sur les primes payées par les souscripteurs en fonction de leur code postal. Les compagnies d’assurance, en revanche, craignaient que ces données publiées soient sujettes à une mauvaise interprétation. Là encore, force est de constater que l’activité de cette commission reste, pour le moment, très discrète et n’a pas apporté de réponses concrètes au problème des tarifs appliqués par les compagnies d’assurance.

De plus, et concernant le fameux problème de l’indemnisation des sinistres après le passage d’un ouragan mêlant le vent et les inondations, le gouverneur du Mississippi (Roger WICKER) déposa un projet de loi baptisé « Coastal Act »(102) dans lequel figurait un certain nombre de formules scientifiques permettant d’établir, après expertise, quel pourcentage des dommages étaient causés par le vent, et quel autre pourcentage était causé par l’eau. Outre ces formules mathématiques, le Costal Act prévoyait surtout d’insérer une garantie contre les effets du vent dans les polices d’assurance habitation fédérales telles que celles proposées par le NFIP. Toutefois, l’administration Obama indiqua dès l’émission de cette idée qu’ils ne supporteraient pas un tel projet, car cela rendrait le programme du NFIP bien trop coûteux.

Enfin, et concernant le National Flood Insurance Program, nous ne pouvons que saluer l’adoption de la loi promulguant sa prolongation et votée en Juin 2012 par le Congrès(103). En effet, la prolongation de l’action du NFIP jusqu’en 2017 par l’administration Obama indique non seulement que ce programme est globalement salué par les propriétaires américains, mais surtout qu’il reste une alternative indispensable aux citoyens de ce pays qui, faute de pouvoir souscrire une garantie inondation proposée par le gouvernement américain, ne seraient tout simplement pas couverts pour ce risque en raison de la tarification inabordable appliquée par les compagnies d’assurance privées.

Nous ne pouvons que déplorer que le florilège de propositions de réformes susmentionnées n’aient, dans l’ensemble, pas vu le jour. Nous pouvons également remarquer qu’un grand nombre d’entre elles ne proposaient que des solutions appliquées à l’échelle d’un état. Or, il semble que ce soit le gouvernement fédéral américain qui doive se saisir du problème de la prévention de catastrophes naturelles et de la tarification des contrats d’assurance habitation afin de trouver des solutions à l’échelle nationale et de réduire les disparités entre les résidents des états fédérés.

Cette difficulté à proposer des mesures concrètes et efficaces au niveau national par l’administration américaine illustre donc bien que le handicap majeur des Etats Unis reste celui du fédéralisme. De plus, il faut ajouter au problème du fédéralisme celui de la culture américaine qui, contrairement à la France où la socialisation du risque et l’intervention de l’Etat est très fréquente, reste un Etat très privatisé dont les problèmes relatifs au marché libre et concurrentiel de l’assurance doivent être solutionnés par les acteurs de ce marché.

102 Consumer Option for an Alternative System to Allocate Losses.
103 Biggert Watters Flood Insurance Reform Act, 6 Juin 2012.

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