Il s’agit de procédés par lesquels les entreprises financent elles mêmes l’assurance des
risques inhérents à leur exploitation. Dans notre contexte, l’exploitant conscient que son
entreprise va générer ipso facto des pollutions diverses, commencera par mettre en place un
processus de gestion des risques (risk management process). Ceci aura pour but premier
d’identifier et évaluer de façon précise les risques de pollution que l’activité est susceptible de
générer, notamment leur probabilité de survenance, leur fréquence et leur gravité. Une
deuxième étape consistera à l’analyse des possibilités de prévention des risques, ou à défaut
de réduction de leurs conséquences dommageables si ceux-ci ne peuvent être évités. A l’issue
de cette analyse, l’exploitant sera à même de savoir s’il dispose de moyens suffisants pour
contrôler les risques de dommages environnementaux inhérents à son activité.
Le processus de gestion des risques demande des analyses minutieuses et poussées. En
général, l’exploitant fera recours à des experts et auditeurs spécialisés. Une fois les analyses
techniques faites, l’exploitant pourra évaluer le coût en assurance dont son exploitation a
besoin, en fonction de ce que propose le marché pour ce type de risque. Suffisamment armé,
et en fonction de ses possibilités financières, il pourra donc décider de recourir à l’assurance
par le transfert de ses risques résiduels à un tiers, ou alors opter pour l’auto-assurance.
L’auto-assurance est une technique de gestion des risques qui permet de calculer des
montants de prime qui seront conservés au sein de l’entreprise pour payer des sinistres futurs,
partiellement ou non assurés par ailleurs. L’entreprise qui s’auto assure n’aura pas à verser
des primes d’assurance à un tiers. Elle va gérer le montant de ces primes en interne en
prévision de ses sinistres futurs. Certaines entreprises, en général des grands groupes
industriels iront plus loin en créant de véritable société d’assurance au sein du groupe pour la
couverture des risques environnementaux et autres risques divers inhérents à l’activité du
groupe et de ses filiales. Ces sociétés s’appellent les captives d’assurance. La captive est une
filiale du groupe avec une mission exclusive d’assurance. Elle exerce la même fonction qu’un
assureur direct classique c’est-à-dire, souscrit les risques de preneur d’assurance qui sont ici
les sociétés du même groupe. Les sociétés captives sont de plus en plus nombreuses (plus de
4400 dans le monde)(53). En Europe, leurs principaux lieux d’implantations sont Dublin et le
Luxembourg.
La création de captives d’assurance présente beaucoup d’avantages notamment,
l’optimisation des bénéfices d’une politique de prévention et de gestion active des risques en
interne, la mutualisation des risques du groupe, et aussi et surtout, l’accès direct au marché de
la réassurance. Comme nous le savons, seules les entreprises d’assurance sont susceptibles de
faire réassurer les risques qu’elles couvrent par une société de réassurance, les entreprises et
exploitants, n’ayant pas la possibilité d’y recourir directement. Ainsi, créer une compagnie
captive au sein d’un groupe est un moyen de contourner cette exigence, pour avoir accès à la
réassurance.
Ces dernières années, l’on voit se développer des alternatives à la réassurance
classique, à la suite des catastrophes naturelles et technologiques, ceci par ce que les (ré-)
assureurs classiques ne disposent pas de la capacité nécessaire pour couvrir certains scénarios
catastrophiques, ce même malgré la constitution de pools. La principale alternative est la
titrisation. Selon une étude réalisée par la fédération française des sociétés d’assurance
(FFSA)(54), le capital des compagnies d’assurance non-vie américaines s’élevait à 200 milliards
de dollars en l’an 2000, soit 1% de la capitalisation sur le marché financier américain la même
année. Les (ré-) assureurs avaient donc tout intérêt à se tourner vers le marché financier pour
trouver la solution à leur problème de capacité financière, notamment en transférant les
risques souscrits à ce qui est appelé « véhicule de titrisation ».
L’article L310-1-2 du code des assurances définit le véhicule de titrisation comme
« une entité juridique, dotée ou non de la personnalité morale, autre qu’un organisme
d’assurance ou de réassurance, qui supporte des risques d’assurance qui lui sont cédés par un
organisme d’assurance ou de réassurance et qui finance en totalité l’exposition à ces risques
par l’émission de parts, d’actions, de titres de créances ou par un autre mécanisme de
financement, dont les droits à remboursement sont subordonnés aux engagements de ce
véhicule envers l’organisme lui ayant transféré des risques ». Schématiquement, ces véhicules
de titrisation au fonctionnement très encadré, jouent le rôle de réassureurs pour les captives
d’assurance, les assureurs et les réassureurs classiques. Ils représentent aujourd’hui une
véritable solution au problème de capacité du marché pour la couverture du dommage
écologique et sont appelés à se développer durablement. La nature y a tout à gagner.
Comme nous l’avons envisagé ci-dessus, l’assurance du dommage écologique ne cesse
de se développer. Les enjeux financiers étant importants, on a dans un premier temps assisté à
la constitution de pools pour résoudre les problèmes de capacité du marché à couvrir ce type
de risques. C’est le cas d’Assurpol qui s’est imposé pendant longtemps comme l’assureur
historique dans ce domaine. Mais ces dernières années, des assureurs étrangers sont entrées
sur le marché français de la couverture du risque environnemental et proposent des produits
intéressants pour la couverture du dommage écologique. De plus, des procédés autres que des
techniques d’assurance connaissent un essor dans cette matière (sûretés classiques, mesures
de prévention, techniques de garantie financière, titrisation, etc), avec le dessein d’une
couverture plus adéquate de ce risque particulier.
53 Selon une étude réalisée par Zurich, http://www.zurich.com
54 Arthur Charpentier – FFSA/ Direction des Etudes, Statistiques et Systèmes d’Information : Titrisation de
risques catastrophes : Les Cats Bonds, Septembre 2002, p1