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Section 2 – Rejet de la faute dolosive par la jurisprudence récente

ADIAL

La construction doctrinale qu’est la distinction entre les fautes intentionnelles objective et
subjective est sérieusement mise à mal par les arrêts les plus récents. Ainsi, en 2005, la
Cour de cassation a cassé un arrêt d’appel ayant retenu la faute intentionnelle à l’égard
d’un architecte qui avait commis toute d’une série de fautes telles que le non-respect des
règles de l’art à de multiples reprises, des erreurs de conception entraînant de
nombreuses malfaçons(92). Il a été reproché aux juges du fond de ne pas avoir caractérisé
la recherche du dommage par l’assuré, condition sine qua non de la qualification de la
faute intentionnelle. Les haut-juges ont aussi écarté la faute intentionnelle de l’assuré qui
avait livré en connaissance de cause des biens non-conformes aux normes de sécurité.
Selon la Cour, la recherche du dommage faisait défaut(93).

Plus récemment, en 2010, la jurisprudence est revenue à une conception stricte de la
faute intentionnelle. En effet, le 30 mars 2010(94), la Cour de cassation n’a pas admis que la
faute d’un architecte soit qualifiée d’intentionnelle, quand bien même celui-ci avait
délibérément fait édifier une maison sans respecter les conditions prévues par le permis
de construire. En conséquence, celle-ci dû être démolie. Par ailleurs, le 1er juillet 2010(95), la
Cour est intervenue à nouveau pour casser un arrêt qui avait retenu la faute intentionnelle
d’un assuré qui avait livré des produits défectueux à son client, lui causant ainsi un
préjudice, alors qu’averti du vice dont les produits étaient affectés, le débiteur n’a rien fait
pour les prévenir ou remplacer le matériel.

Enfin, cette solution a été confirmée par deux nouveaux arrêts en 2011. Le premier arrêt
remonte au 2 mars et dans cette affaire, un architecte n’avait pas respecté les conditions
du permis de construire délivré. Il a donc été pénalement condamné à remettre le bâtiment
en conformité. La Cour d’appel a alors condamné l’assureur de responsabilité
professionnelle à indemniser le sinistre. Son pourvoi sera rejeté : « la faute relevée ne
suffisait pas à caractériser la volonté de M. X… de créer le dommage, la cour d’appel, qui
n’avait pas à répondre à un moyen relatif à l’absence d’aléa que ses constatations
rendaient inopérant, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ». Cette
solution a ensuite été confirmée par un autre arrêt du 29 mars : en l’espèce un
entrepreneur et un architecte étaient à l’origine de nombreuses malfaçons. Les haut-juges
s’en sont tenus à leur dernière jurisprudence, estimant qu’il n’était pas établi par l’assureur
que les négligences de l’assuré avaient été intentionnellement commises afin de
provoquer le sinistre. Ainsi, selon la Cour, l’assuré « n’a pas sciemment supprimé l’aléa du
contrat »(96). Ces arrêts sont particulièrement intéressants car il mettent expressément en
avant la notion « d’aléa », preuve que cette notion ne peut pas être érigée en condition de
la faute intentionnelle.

L’autonomie de la faute dolosive semblant se heurter à de trop nombreuses difficultés, il
apparait jouable de se tourner vers une solution intermédiaire, celle-ci consistant à
présumer la recherche du dommage dès lors que l’assuré en avait nécessairement
connaissance.

92 Cass. 2e civ. 9 nov. 2005, n°04-11.856, RGDA 2006, p. 632, note J. Kullmann ; Cass. 3e civ., 29 janv. 2008,
n°07-10.747, RGDA 2008, p. 378, note J.-P. Karila et C. Charbonneau.
93 Cass. 2e civ., 20 mars 2008, n° 07-10499, RGDA 2008 p. 326, note J. Kullmann
94 Cass. 3e civ., 30 mars 2010, n°09-12.652 et n°09-13.307, RGDA 2010, p. 685, note J. Kullmann.
95 Cass. 2e civ. 1er juill. 2010, n°09-10.590, RGDA 2010, p. 685, note J. Kullmann.
96 Cass. 3e civ. 2 mars 2011, n°09-72.744 et Cass. 3e civ. 29 mars 2011, n°09-16.749, S. Abravanel-Jolly,
Maintien regrettable d’une conception unitaire de la faute intentionnelle, Actuassurance 2011, analyse, n°18.

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