C’est notamment suite aux demandes du Conseil National de la Résistance que ce profond renouvellement sera amorcé, aboutissant à la loi du 30 octobre 1946 (I) et aux évolutions propres aux MP (I).
I. Le plan de Sécurité Sociale et la Loi du 30 octobre 1946
Le gouvernement provisoire de l’époque dirigé par le général DE GAULLE confia cette mission de réaliser le « plan de Sécurité Sociale » à un haut fonctionnaire du Conseil d’Etat, répondant au célèbre nom de Pierre LAROQUE(19), le 5 octobre 1944.
Il dirigera un groupe de travail, dont l’étude donnera vite lieu à l’ordonnance du 4 octobre 1945 : est alors prévue la création d’une « caisse unique » de Sécurité Sociale par circonscription, afin de permettre l’unité administrative du système.
Cette ordonnance énonce notamment que « la Sécurité Sociale est la garantie donnée à chacun qu’en toutes circonstances, il disposera des moyens nécessaires pour assumer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes. Trouvant sa justification dans un souci élémentaire de justice sociale, elle répond à la préoccupation de débarrasser les travailleurs de l’incertitude du lendemain ».
Cette ordonnance aboutit à la loi du 30 octobre 1946(20), marquant l’avènement du nouveau régime, et par la même occasion l’abrogation de la loi du 9 avril 1898, en vue de son insertion dans le système de Sécurité Sociale nouvellement mis en place.
Ce système contribuera également au développement de tout le pan relatif aux maladies professionnelles.
II. Le cas des maladies professionnelles
Rappelons-le, c’est en 1919 que la réalité de l’existence des maladies professionnelles est consacrée par la loi et donc intégrée dans le mécanisme d’indemnisation des AT.
Le procédé de reconnaissance et d’indemnisation est cependant différent. On le comprend parfaitement, compte tenu des caractéristiques inévitablement liées au mode de survenance d’un tel sinistre (de manière progressive et non pas soudaine).
Ont ainsi successivement été mis en place des « tableaux », recensant les maladies présumées être d’origine professionnelle. Si une pathologie figure dans un de ces tableaux annexés au Code de la Sécurité Sociale, elle sera donc présumée d’origine professionnelle. Ils établissent une présomption simple uniquement.
Loin d’être figés du fait du caractère évolutif de toute pathologie, de l’apparition de nouvelles infections, des découvertes scientifiques, ils sont donc régulièrement modifiés et complétés par décret au fil des avancements techniques et médicaux. De nouvelles grilles sont aussi périodiquement créées, venant compléter le panel des maladies déjà reconnues comme ayant une origine professionnelle.
À titre d’information, il existe actuellement 98 tableaux dans le régime général, tous annexés au Code de la Sécurité Sociale(21).
Une alternative est tout de même possible si les critères ne sont pas remplis pour bénéficier de cette présomption : la loi du 27 janvier 1993(22) prévoit une nouvelle procédure de reconnaissance du caractère professionnel et ce dans deux cas :
– Soit la maladie figure dans un tableau mais toutes les conditions ne sont pas remplies. Il est alors nécessaire d’établir que ladite maladie est directement causée par le travail habituel du salarié.
– Soit la maladie ne figure dans aucun tableau mais est stabilisée avec un IPP(23) supérieur ou égal à 25%. Il sera nécessaire de rapporter la preuve qu’elle est « essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime, et qu’elle a entrainé le décès de celle-ci ou une incapacité permanente ».
Le rôle du médecin amené à examiner le salarié est donc primordial dans cette procédure. Dans tous les cas, l’origine professionnelle ne sera reconnue par la Caisse Primaire qu’après avis motivé du « Comité Régional de reconnaissance des maladies professionnelles », dit CRRMP.
La Sécurité Sociale a donc bien continué à se développer après son avènement en 1946.
En outre, sa mise en place au milieu du siècle fut l’occasion rêvée pour rendre obligatoire l’assurance de l’employeur, dans le cadre d’un système de « solidarité nationale ». En prévention, des cotisations devront être versées au système national par les employeurs, afin d’anticiper l’indemnisation d’éventuels incidents relatifs au travail, et donc prévenir les coûts engendrés.
Ce système répondait ici encore à une logique spécifique : en échange de ces versements est instituée une substitution exclusive de l’employeur par les Caisses de Sécurité Sociale.
19 voir note 4 supra, page 8.
20 Loi n°46-2426 du 30 octobre 1946 sur la prévention et la réparation des accidents du travail et maladies professionnelles.
21 Voir l’Annexe II du CSS, tableaux des MP prévus à l’article R461-3. Le salarié « malade » doit présenter la symptomatologie correspondante à la pathologie inscrite dans la grille, l’énumération des symptômes étant limitative.
22 Loi n°93-121 du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d’ordre social, JORF n°25 du 30 janvier 1993 page 1576 , dont l’article 7 complète l’article L461-1 du Code de la Sécurité Sociale par 4 alinéas supplémentaires.
23 A noter que ce taux de 25% n’est applicable qu’aux maladies dont la première constatation est intervenue après le 18 avril 2002. Pour celles constatées antérieurement, le taux d’incapacité doit être d’au moins 66,66% (entrée en vigueur du décret du 18 avril 2002 n’°2002-543 relatifs à certaines procédures de reconnaissance des maladies professionnelles)