Appelé également le « paraphragiat » (Levin et Marshall, 1993, cité par Etter et Merhout, 2007, p.95), c’est une stratégie d’écriture que Howard (1999, xvii), décrit comme « Coping from a source text and then deleting some words, altering grammatical structures, or plugging in one synonym for another »(36)
C’est une espèce de réecriture-assemblage où l’étudiant emprunte des passages dans différentes sources et tâche de les recoller ensemble en y opérant des modifications tels que, oter les adjectifs ou les remplacer par leurs synonymes, ajuster les temps verbaux et/ou encore ajouter ou supprimer des mots ou groupe de mots. C’est « une paraphrase un peu trop collée au texte original » (Notre traduction) (Balingit, 2009, p.4)
Certes, elle est considérée par la communauté universitaire comme une pratique plagiaire inéthique, condamnable et punissable, à l’instar d’autres formes de plagiat. (Howard, 2000) Toutefois, nombre de chercheurs dont (Howard, 1999 ; Eilola et Selber, 2007 ; Angelil-Carter, 2000 ; Chandrasoma, Thompson et Pennycook, 2004), rejettent cette vision standardisée et étriquée du plagiat dont les étudiants payent le prix ; et lui trouvent à contrario des portées positives.
(Howard, 1995) Chandrasoma et al., 2004, p.171), suggèrent que le plagiat doit être reconsidéré en terme « d’intertextualité transgressive et non-transgressive » et, le patchwriting peut justement être classé sous la catégorie de l’intertextualité nontransgressive.
La raison en est que l’étudiant y fait recourt non pas par intention de triche mais plutôt par manque de confiance en sa propre voix dans un contexte de conventions académiques qui ne lui est pas encore familier. Paxton (2007, cité par Lankamp, 2009), fait écho à la même idée car, il a trouvé lui aussi que les étudiants débutants trouvent énormément de difficultés à incorporer leurs voix dans leurs écrits et, préfèrent par conséquent, emprunter littéralement de leurs sources à qui ils confèrent l’argument d’autorité.
Aussi, Howard (1994), propose-elle le patchwriting comme est une opportunité pédagogique. L’étudiant use de cette stratégie comme étape transitoire vers l’appropriation de la convention et formes linguistiques et discursives d’un champ disciplinaire donné. C’est une forme développementale d’engagement intertextuel qui facilite l’apprentissage notamment pour les « novices », qui ne sont pas rompus à l’exercice de l’écrit académique ou ceux dont la langue d’apprentissage n’est pas la langue mère.
(Howard, 1999, p.7), se basant sur la théorie du dialogisme de Bakhtine qui « […] nie la possibilité que quelqu’un puisse posséder le langage », pose le patchwriting au coeur du processus d’écriture et trouve normal et nécessaire de se baser sur les mots des autres pour retrouver les siens. Le concept du patchwriting se situe dans le prolongement des concepts poststructuralistes d’ « intertextualité » et du « sujet-en-procès » de Kisteva.
L’intertextualité est un entrecroisement de plusieurs discours, car comme l’explique kristeva (1969, p.146), « […] tout texte se construit comme une mosaïque de citations », une confluence de plusieurs voix et pensées qui forment une polyphonie, et le « […] sujet qui en est le produit ne peut être qu’un sujet-en-procès, en redéfinition incessante et interminable ».
(Gleize, 2005, p.87) Ainsi, si le patchwriting est empli de voix des autres, il est néanmoins symptomatique de quelqu’un qui se cherche et se bat pour comprendre. (Howard, 2002) Picorari (2003, citée par Maxim, 2009), trouve que c’est une étape réelle et nécessaire dans le processus de maturité scripturale de l’étudiant. Par conséquent, Howard (1995), en appelle à une reconsidération des politiques des universités en matière de plagiat pour y introduire et y faire tolérer le concept de plagiat positif tel que le patchwriting. L’objectif en est « […] d’aider les étudiants à en maximiser l’usage Intellectuel pour qu’après le dépasser ». (Ibid., p.796)
Hu (2001), la rejoint dans ce sens, quand il suggère que les nouveaux venus dans une communauté universitaire ne devraient pas être jaugés à l’aune des mêmes standards qui régissent tous, et que les attentes vis-à-vis de leurs écrits devraient progresser parallèlement à leur maturité relative à l’écriture académique. Par ailleurs, il appelle à distinguer entre l’écrit littéraire et l’écrit scientifique, dans le sens où ce dernier use régulièrement du patchrwriting qui, ne peut faire aucun tort, puisque comme le dit Myers (1998, p.9), la « science n’est pas organisée de manière à produire des travaux de littérature originaux…il y’a une différence entre voler la science et voler la syntaxe ».
L’écrit académique n’est pas chose acquise pour l’étudiant, le cheminement de transformation d’un étudiant « outsider » à un étudiant « insider » est un processus qui n’est ni facile ni rapide. (Nelms, 2007) C’est pour cette raison que le patchwriting n’est pas tant un plagiat intentionnel qu’ « un effort de passer d’un état d’ousider à un état d’insider » (Notre traduction) (ibid. p.7)
36 Nous traduisons : copier un texte d’une source, y supprimer quelques mots, en altérer le structure grammaticale et y interchanger les synonymes.