Parmi les décisions étudiées, huit réparent une atteinte à un attribut précis du droit moral.
Ainsi, quatre décisions concernent le droit à la paternité, trois le droit au respect de l’oeuvre et
une le droit de divulgation. Le montant des dommages et intérêts alloués est très variable,
ainsi pour les atteintes au nom, les sommes relevées vont de 1.000 euros66 à 46.000 euros(67).
Ne pas mentionner le nom de l’auteur, volontairement ou non peut donc couter très cher. De
façon encore moins surprenante, les montants alloués pour compenser les atteintes au respect
de l’oeuvre sont encore plus variables, du moins dans les décisions analysées par nos soins,
puisqu’ ils vont de la somme de 3.000 euros(68) à celle de 1.000. 000 euros(69). Quant à l’unique
espèce sanctionnant individuellement le droit de divulgation, la condamnation n’a ici non plus
rien de symbolique puisqu’elle s’élève à la somme de 38. 000 euros(70).
Comme nous le signalions plus tôt, onze des décisions étudiées font état de condamnations à
des dommages et intérêts sur le fondement d’atteinte au droit moral mais en considération de
plusieurs attributs. C’est donc des sommes globales qui sont allouées, sans qu’il soit possible
de savoir le « prix » donné à chaque atteinte(71). Ces sommes globales ne sont pas
nécessairement plus importantes que les sommes allouées à titre individuel, les moins
importantes relevées étant celles de 8. 000 euros. Dans une première décision(72), cette somme
répare une atteinte au droit au respect de l’oeuvre et une atteinte au droit de divulgation et dans
une seconde décision, le même montant répare simultanément une atteinte au droit au respect
de l’oeuvre et au droit au nom(73). La somme maximale globale attribuée pour des atteintes à
plusieurs attributs du droit moral est celle de 30. 000 euros pour une atteinte au respect de
l’oeuvre et au droit au nom(74).
Ainsi, sur cet échantillon de décisions, nous constatons que l’atteinte simultanée à plusieurs
attributs du droit moral n’aboutit pas nécessairement, loin s’en faut, à une allocation de
dommages et intérêts plus importante que lorsqu’un seul attribut est atteint. Tout va dépendre
naturellement de la gravité de l’atteinte portée(75).
66 Paris, 21 mars 2007 : RIDA, juill. 2007, p. 376.
67 Paris, 29 septembre 2006.
68 Paris, 5 mai 2000, « Sté Galerie de France c./ Jacques L’Hoir et autres » : RIDA, avr. 2001, p. 352.
69 Paris, 8 sept. 2004 : Légipresse 2005, n° 219, III, p. 25, note V. Varet. Dans cette décision, la Cour d’appel
n’énonce pas formellement qu’il s’agit d’une atteinte au respect de l’oeuvre mais en l’espèce, M. Luc Besson
invoquait la dénaturation des images de son film et la Cour fit droit à cette demande.
70 TGI Paris, 28 sept. 2001 : RIDA, avr. 2002, p. 453.
71 Une décision toutefois, réparant deux atteintes : une au respect de l’oeuvre et une autre au droit au nom,
distingue les sommes allouées à chaque titre : 8.000 euros dans les deux cas : Paris, 12 déc. 1995, « Société
Média RATP et autre c./ Gérard Scher et autre » : RIDA, juill. 1996, p. 372.
72 Paris, 20 sept. 1994 : RIDA, avr. 1995, p. 367.
73 Versailles, 5 nov. 1998, « Sté Arkadia c./ Jean-Pierre Leloir » : RIDA, avr. 1999, p. 367.
74 Paris, 11 juin 1997, « Consorts Lemaitre c./ Société Guerlain et autres » : RIDA, oct. 1997, p. 255.
75 Comme le remarque le Professeur F. Pollaud-Dulian, « ici, l’évaluation ne pouvant être objective, par
hypothèse, elle est généralement proportionnelle à la gravité de la faute, c’est à dire de l’atteinte au droit moral,
ce qui en fait surtout une forme de peine privée », Le droit d’auteur, Economica, 2005, n° 1336.
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