Le diagramme de Venn (cf. Méthodologie – figure 7) permet de se faire une bonne représentation de l’implication des institutions appartenant au dispositif.
Les groupes d’acteurs les plus impliqués dans le Codeter sont représentés le plus centre du cercle. Ces acteurs appartiennent au noyau directeur du Codeter, sensé organiser les réunions et mettre en oeuvre les décisions prises lors des plénières.
Le groupe le plus actif, du coté de la société civile, est celui qui est constitué par les syndicats des travailleurs ruraux (STTR), leur fédération (la Fetagri) et le Ceft-BAM.
Les STTR’ ont pour mission de représenter et de défendre les droits des travailleurs ruraux. Ils sont présents dans chaque municipalité du territoire BAM et disposent d’une base syndicale plus ou moins importante selon leur popularité et les actions qu’ils mènent. Ils ont aussi la responsabilité d’administrer les retraites des agriculteurs familiaux et, pour certains d’entre eux, également un rôle dans l’attribution des crédits ou la mise en place des politiques publiques qui s’appliquent au monde rural.
La Fetagri, fédération des STTR, représente les syndicats au niveau de l’Etat. Elle dispose d’une représentation régionale dont le siège est à Santarém.
Le Ceft-Bam est un centre de formation auquel sont affiliées de nombreuses organisations de l’ouest du Para (STTR, mouvements de femmes, associations de pécheurs, maisons familiales rurales -CFR’s-, radio communautaire…). L’articulateur territorial engagé par le Codeter fait également partie du Ceft-Bam. .
Une ONG, le Ceapac, participe également et oriente un certain nombre de ses activités dans une dynamique territoriale.
Du côté des organismes publics, Le Sagri est particulièrement impliqué dans le dispositif. L’Emater régionale se met à la disposition du Codeter et mobilise systématiquement ses antennes municipales. L’antenne régionale de la Banque d’Amazonie, chargée d’octroyer les crédits du programme Pronaf, est également souvent présente
Il faut souligner le caractère très politique des orientations des organismes régionaux. En effet, le gouvernement PT de l’Etat (2006-2010) a résolument mené son action en liaison étroite avec le gouvernement fédéral. Il a ainsi soutenu les programmes fédéraux comme le « territoire de la citoyenneté ». De même, le choix des responsables régionaux des organismes, qui sont en général des « postes de confiance » attribués par le gouvernement de l’État, a été fortement influencé par les leaders des mouvements sociaux, en particulier par les syndicats qui restent la voie la plus forte des mouvements sociaux. Ainsi, les responsables des organismes publics sont souvent proches des mouvements sociaux et partagent les mêmes idées et les mêmes orientations.
Cependant, le STTR de Santarém ne s’inscrit pas dans la ligne politique du groupe dominant, car il appartient à une autre tendance du PT que le courant dominant. Ainsi, ce syndicat qui représente un nombre important d’agriculteurs, se démarque des autres syndicats et s’oppose souvent aux orientations et à la méthodologie développées par le Codeter.
L’Embrapa, Centre national de recherche agronomique, plus neutre politiquement, est également actif dans le partenariat avec les autres organismes publics. L’Embrapa possède une antenne à Santarém destinée à assurer le relais avec les différents centres Embrapa du Brésil. Les Emater mobilisent beaucoup cette antenne pour identifier certaines maladies/ravageurs des plantes, pour s’inspirer des modèles de systèmes de cultures développés par l’Embrapa ou pour des partenariats dans la mise en place de parcelles expérimentales. Ce centre de recherche, via son antenne, met à disposition des semences améliorées et installe des projets intégrés dans la région (plantes médicinales, maraîchages…).
Les pêcheurs, nombreux sur le territoire, sont représentés par des associations municipales de pécheurs (« colonias de pescadores »). Il existe une association régionale des pêcheurs, appelée Mopebam, qui regroupe l’ensemble des associations de pêcheurs et met en place des projets concernant à la pêche.
Les pêcheurs disposent d’un secrétariat d’État spécifique (le Sepaq). Récemment, le ministère de la pêche a mis en place un forum destiné à regrouper les acteurs de la pêche, de manière à discuter directement les attributions des ressources émanant de ce ministère. Cette initiative est mal perçue, puisqu’elle s’oppose à la volonté de certains ministères de discuter et décliner les programmes fédéraux au niveau des territoires de la citoyenneté. Dans le territoire Baixo Amazonas, cette décision unilatérale semble amener ce groupe de la pêche, déjà peu actif dans le travail collectif, à se désolidariser complètement du dispositif Codeter. Cette évolution est préoccupante, car les pêcheurs, en plus de représenter un nombre important de personnes, représentent une grande partie des petits agriculteurs des zones de varzeas. Celles-ci sont déjà relativement marginalisées dans les programmes de développement et risquent, en s’isolant, de n’être plus soutenues que par le ministère de la pêche.
Un certain nombre d’institutions, qui ont une grande importance pour le développement du territoire, ne participent pas au Codeter:
Ainsi l’INCRA, Institut de la colonisation et de la réforme agraire est le centre de toutes les attentions n’y participe pas. Cette institution est responsable en effet de la démarcation et de la régularisation des terres dévolues à la réforme agraire (assentamento), sans lesquelles aucune action ne peut être entreprise. C’est aussi l’INCRA qui organise la mise en place de services tels que les routes, l’accès aux crédits à fond perdus, les écoles, l’électricité,…. Malgré son rôle déterminant dans le processus de développement du territoire et malgré les questionnements qu’il génère quant à son mode de fonctionnement (processus très lents), cet institut ne communique qu’à travers des réunions sporadiques regroupant toutes les organisations concernées par ces questions et agit en collaboration exclusive avec la Fetagri et avec les STTR, directement au niveau local.
Le programme Terra Legal est un programme fédéral également destiné à accélérer la régularisation des terres mais, cette fois-ci, en dehors des assentamentos et pas seulement pour l’agriculture familiale. Ce programme ne communique qu’à travers l’organisation de réunions publiques.
L’institut Chico Mendes (ICMbio) est l’organisme qui s’occupe de la gestion des zones protégées. Elle doit ainsi suivre l’utilisation durable des ressources à l’intérieur et autour de ces zones protégées. Des activités telles que celles d’une mine ou d’une entreprise forestière sont soumises à son contrôle, tout comme les activités d’extraction menées par des populations locales. L’ICMbio a mis en place des conseils dans les zones protégées, qui n’ont aucuns rapports directs avec le Codeter.
Une autre grande faiblesse du Codeter est le peu d’intérêt que lui portent les préfectures, ce qui freine beaucoup ses actions. En effet, un grand nombre de projets nécessitent la contribution des préfectures, que ce soit pour l’obtention des contres parties financières ou pour la bonne réalisation d’un projet (mise à disposition de moyens humains et matériels). De ce fait, peu de secrétaires municipaux de l’agriculture ou même de conseillers municipaux participent aux plénières du Codeter.
Un autre organisme dont la participation serait souhaitable pour un meilleur fonctionnement du Codeter est la Caisse Economique Fédéral (CEF). Celle-ci est responsable de l’ultime contrôle des projets et de la mise à disposition des ressources financières pour leur exécution. La CEF est censée aider le porteur de projet à bien finaliser sur le plan administratif le dossier. Mais, pratiquement, celle-ci communique peu et ne donne que des informations très succinctes sans réel souci d’accompagnement.
Une autre insuffisance du Codeter est la faible représentation des indigènes et des Quilombolas (communautés formées par les descendants des esclaves noirs fugitifs) qui constituent pourtant des publics prioritaires du « territoire de la citoyenneté ». Le GCI-cita (groupe indigène) et la Foqs (fédération des Quilombolas de Santarém) font en principe partie du noyau directeur du Codeter, mais ne participent en réalité que très peu aux réunions.
Le GCI-Cita est peu actif du fait de son manque de ressources financières. Il ne représente que quelques communautés indigènes de Santarém et n’a pas de contact avec les indigènes des autres municipalités qui, pourtant, occupent de grandes surfaces au nord du territoire BAM. Ainsi, très peu de liaisons sont établies avec ces communautés indigènes. L’organe public responsable de l’appui à ces communautés, la Funai, qui le pourrait, ne participe jamais au Codeter.
La Foqs, quant à elle, ne participe plus du fait de la non-prise en compte de ses projets. Mais, de la même manière que la Cita, malgré la volonté de création d’une fédération plus large, cette organisation n’a pas de liens avec les autres fédérations de Quilombolas tel que l’ARQMO d’Oriximiná. Ainsi, la représentation de ces deux catégories de population est faible.
Enfin, les organisations de producteurs, les plus bénéficiaires des projets validés et connaissant le mieux les conditions de production, ne participent pas au Codeter, ce qui réduit la bonne adaptation des projets à la réalité et leur appropriation par les bénéficiaires. Ainsi l’Aprusan, qui regroupe un nombre important d’agriculteurs de Santarém, est le bénéficiaire d’un projet du Codeter sans paraître en connaitre les tenants et aboutissants. Certaines de ces organisations, liées aux STTR, sont néanmoins représentées telle que la Cirama.
De leur côté, les institutions de recherches comme l’IPAM (Institut de recherche sur l’Amazonie) ou l’UFOPA (Université Fédéral de l’Ouest du Para) participent de façon épisodique du fait des contraintes de financements et de la faible disponibilité de ses responsables.
Le gouvernement de l’État du Para a mis en place une « planification territoriale participative » (le PTP), sensée favoriser la remontée des demandes émanant des communautés et exercer un contrôle social sur le gouvernement (via les conseillers du PTP). Cette démarche aurait pu être un outil efficace pour le Codeter et avoir une réelle contribution au développement territorial mais ce programme a agi en parallèle du Codeter ne participant que sporadiquement à celui-ci et en présentant les demandes directement aux instances de l’Etat.
Enfin, les nouveaux participants ont souvent du mal à comprendre les règles du jeu et ce contexte complexe, ce qui rend difficile leur implication active dans le Codeter.
Ainsi, le Codeter, malgré son rôle et sa volonté de fédérer toutes les institutions engagées sur le territoire souffre encore d’insuffisances et de faiblesses pour répondre aux défis du développement territorial :
– Participation partielle des organismes/programmes gouvernementaux importants pour le développement du territoire
– Représentation faible de certaines catégories de la population.
– Peu de participation des organisations de producteurs existantes.
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