L’influence des lignes directrices se retrouve à de nombreux niveaux. Premièrement, afin de préserver le bon fonctionnement du marché intérieur, seules sont autorisées les garanties et régimes de garantie dont l’accès est non discriminatoire, et qui sont basés sur des critères objectifs (63) . C’est ainsi que la Commission Européenne a imposé au gouvernement irlandais qu’il modifie son projet de garantie des obligations, afin qu’il ne couvre non pas seulement les six plus importantes banques irlandaises, mais tous les établissements financiers irlandais dont la taille est significative (64).
La Commission rappelle également qu’une aide doit être limitée dans le temps (c’est-à-dire, prendre fin dès que la situation économique le permet (65)) et dans son étendue. Ainsi, un système de garantie ne devrait pas aller en principe jusqu’à couvrir les dettes subordonnées (dettes dont le remboursement, en cas de liquidation, n’intervient qu’après celui des autres dettes dites privilégiées ; les créanciers subordonnés supportent donc un risque plus important de non-remboursement que les autres créanciers, ce qui justifie un taux d’intérêt plus élevé que celui des dettes privilégiées) car cela reviendrait à protéger des actionnaires ayant connaissance des risques engagés lors de tels investissements (66). La Commission a ici parfaitement conscience du danger d’un régime de garantie trop large, susceptible de contribuer au problème de l’aléa moral.
En outre, toute aide doit être proportionnelle, c’est-à-dire qu’elle doit être capable de parvenir efficacement à son objectif ; elle doit être proportionnée au problème posé, et conçue de manière à ce que les effets négatifs sur les concurrents (et notamment étrangers) soient minimisés. Afin de s’assurer que l’aide est limitée au montant strictement nécessaire, la Commission, dans la lignée de ses précédentes lignes directrices impose une contribution significative au bénéficiaire (67).
Enfin, et c’est d’un intérêt capital pour préserver le jeu concurrentiel, l’aide publique doit s’accompagner d’ajustements structurels mais aussi de contraintes quant au comportement que l’entreprise aidée devra avoir (68). La subordination de l’aide au comportement futur de l’entreprise à l’égard de ses concurrents, permet de s’assurer que ceux-ci ne seront pas placés dans une position concurrentielle défavorable.
Il est intéressant de noter que la Commission adopte une distinction entre les établissements sains dont les difficultés résultent de la pénurie de liquidités et les établissements caractérisés par des problèmes endogènes (mauvaise gestion des actifs, prise de risque excessive …). Elle préconise une différence de traitement selon que la banque soit saine ou non. L’aide accordée aux banques dont les problèmes sont endogènes, étant potentiellement plus néfaste pour la concurrence, elle doit satisfaire aux conditions normales applicables aux aides au sauvetage et plus particulièrement, s’accompagner d’une restructuration en profondeur et de mesures compensatoires (69). Cette distinction, qui semble pertinente au premier abord, a été abandonnée dans la communication sur les actifs dépréciés dans la mesure où elle contribuait à stigmatiser excessivement des institutions financière présumées non saines.
Pour terminer sur les apports « classiques » (dans le sens où ils s’inscrivent dans la lignée des lignes directrices de 2004) de la « communication concernant le secteur bancaire », on peut noter les indications se rapportant à la procédure de liquidation contrôlée des institutions financières. Celle-ci intervient dans trois situations : soit « après qu’une aide à la restructuration ait été accordée à une institution financière et qu’il soit manifeste que celle-ci ne pourra être restructurée de façon satisfaisante », soit « d’entrée de jeu »(c’est-à-dire , dès que l’aide est accordée), soit que la liquidation contrôlée représente « un élément d’un régime général de garantie, par exemple dans le cas où un État membre s’engage à entamer la liquidation des institutions financières pour lesquelles la garantie doit être activée ».(70)
Les principes sont similaires à ceux appliqués aux garanties : la liquidation est subordonnée à des conditions spécifiques afin ,évidemment, que les distorsions de concurrence soient minimisées mais aussi pour s’assurer que les actionnaires de l’institution financière ne bénéficient pas de l’aide accordée (idée de réduire au maximum l’aléa moral) (71). En application de ses principes, la Commission dans l’affaire Roskilde, n’éleva aucune objection car la phase de liquidation a été limitée à la période strictement nécessaire au bon déroulement de la procédure de liquidation et l’agrément bancaire retiré au plus tôt (72).
63 Communication concernant le secteur bancaire § 16 op. cit.
64 Décision de la Commission du 13 octobre 2008, affaire NN/48/2008 Irish Banks , JO C-312
65 Communication concernant le secteur bancaire § 13 op. cit.
66 Ibid. § 23.
67 Ibid. § 25-26.
68 Ibid. § 27-29.
69 Ibid. § 14, 33.
70 Ibid. § 43.
71 Ibid. § 43-50.
72 Décision de la Commission du 5 novembre 2008, IP/08/1633, Aides d’État: la Commission approuve l’aide du gouvernement danois en faveur de la liquidation de Roskilde Bank, disponible sur : http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/08/1633.
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