Souvent, should est utilisé dans des complétives introduites par that et traduit ainsi le
subjonctif français. C’est le cas lorsqu’il est employé dans des contextes directifs, et il sera
alors radical (it is important that you should tell you mother what happened), ainsi que dans
des contextes appréciatifs, souvent introduits par des adjectifs (It is strange that, it is natural
that, etc.). Prenons trois exemples :
1. I thought it strange he should get up and dress so late.
2. It is intolerable that a child should be so ill-mannered.
3. She could not bear it that the bride should arrive, and no groom.
Dans les trois cas, should permet d’exprimer un jugement en mettant la proposition à distance.
La relation S – P ne va pas de soi pour l’énonciateur, c’est pourquoi on attribue au modal une
valeur contrefactuelle, portée par l’opérateur -ED (on dit également que should indique une
non-congruence). L’idée de norme est donc toujours présente avec l’emploi de should, qui
montre que la réalisation de la relation prédicative a ou aurait un certain effet sur
l’énonciateur, selon l’adjectif ou la formule choisis. Ainsi, en 1, l’actualisation de la relation
a surpris l’énonciateur qui utilise l’adjectif strange, et
l’association de shall et -ED souligne l’étonnement de la part de I. De même, dans l’exemple 2,
c’est l’adjectif intolerable qui marque le jugement de l’énonciateur face à l’éventuelle
réalisation de la relation ; que cette dernière soit actualisée ou
reste hypothétique, l’impression serait la même, et shall permet d’introduire une idée de norme
d’après l’énonciateur, tandis que -ED porte la valeur de contrefactualité. La phrase 3 donne un
autre exemple de jugement cette fois indiqué par l’expression cannot bear au prétérit. Même
si le procès est actualisé, should est employé, non pas pour signaler une hypothèse ou par
concordance des temps, mais pour mettre à distance le propos afin d’introduire l’opinion de
l’énonciateur. Des explications similaires de la valeur de should sont possibles dans des
contextes qui ne sont pas nécessairement appréciatifs, mais cette fois purement hypothétiques,
tout en gardant la notion de contrefactualité et de norme de should :
4. ‘Dancing in public with a troop of country hoydens – suppose we should be seen!’
Cette phrase ne contient pas réellement de jugement ou d’appréciation, mais l’idée de norme
contenue dans should est pleinement perceptible ; la relation prédicative ,
malgré son rejet de la part de l’énonciateur, est vue comme hypothétique, comme le souligne
le terme suppose ; sa réalisation ne va pas de soi.
Si l’idée de norme est présente dans tous ces emplois de should, alors la notion de logique
inhérente à la modalité épistémique est également liée ; l’énonciateur aura sa propre idée de la
norme, c’est pourquoi tel ou tel événement lui apparaîtra ou non comme logique.
Ainsi, les modaux +ED ne signifient pas nécessairement que le contexte est passé ; ils
peuvent simplement ajouter une valeur aux modaux Ø, tout comme ils peuvent se trouver
dans des récits au passé, par souci de concordance des temps (les narrations se faisant
généralement au passé en anglais). Dans chaque cas, il s’agit du plan sur lequel les modaux se
trouvent qui change ; il est de l’ordre du fictif avec -ED. L’extrait qui suit offre un aperçu de la
gradation des modaux +ED :
I walked fast through the room: I stopped, half suffocating with the thoughts that rose
faster than I could receive, comprehend, settle them – thoughts of what might, could,
would and should be.
Comme nous l’avons vu pour les modaux simples, l’ordre croissant de la probabilité des
chances de la réalisation d’un évènement est comme suit : may, can, must, will/shall. Ici,
l’ajout de -ED dans chaque cas vient confirmer cette échelle. Néanmoins, habituellement,
should est de l’ordre du vraisemblable et devrait se situer entre could et would. Le fait qu’il
soit après le modal exprimant la certitude (would) s’explique par le fait que, comme nous
l’avons vu avec les contextes appréciatifs, should comporte davantage de subjectivité (cf.
notion de norme aux yeux de l’énonciateur). C’est pourquoi le placer en dernière position
accentue l’implication de l’énonciateur. Bien que tous les modaux montrent ici une évaluation
subjective, should permet de souligner davantage la prise de position.
Si l’énonciateur souhaite procéder à une évaluation présente d’un fait passé, le modal
ne portera aucune trace. Le fait qu’il soit simple ou avec -ED n’aura que pour seuls effets ceux
précédemment évoqués : l’évaluation en elle-même est mise sur un plan fictif.