Les déchets peuvent être abordés de manière différente en fonction de leurs propriétés. Leur classification peut notamment se faire en fonction de leur état physique (solide, liquide, gazeux), de leur provenance (déchets ménagers, déchets industriels, déchets agricoles), de leur traitement (primaires, secondaires, ultimes) ou encore de leur dangerosité (déchets inertes, déchets banals, déchets spéciaux).
De façon intuitive, l’être humain, comme les animaux, dépose ses déchets à l’écart de ses lieux de vie, pour des raisons diverses, parmi lesquelles existent des préoccupations d’ordre sanitaire (protection contre les odeurs, les parasites, les atteintes physiques et les infections).
En effet, au sens strict du terme, la gestion rationnelle des déchets urbains consiste à évacuer les ordures en dehors de la ville car leur dépôt dans des zones habitées pollue l’environnement et détériore la qualité de la vie. Malheureusement la mise en décharge pose problème dans les pays du Sud.
Toute matière organique d’origine animale ou végétale sera tôt ou tard, en fonction des conditions physico-chimiques telles que la température et l’humidité, colonisée par des microorganismes. Ils y trouveront matière à se nourrir et se développer tout en produisant des gaz et des substances ayant un effet négatif (substances toxiques et/ou inhibitrices des effets attendus) sur le milieu environnant. Dans une décharge, les phénomènes qui se développent, suite à la biodégradation de la matière organique, seront d’autant plus complexes que le volume de déchets sera hétérogène.
La décharge non contrôlée met en présence des déchets de nature diverse (matières faiblement ou rapidement biodégradables, matières plastiques, métaux, verres et céramiques) et des populations mixtes de microorganismes endogènes (qui proviennent des déchets, de l’atmosphère environnante ou du sous-sol de la décharge). L’hétérogénéité, la présence de matières biodégradables et l’influence des paramètres externes, tels que la pluviométrie et la température, sont à l’origine de processus chimiques, physiques et biologiques s’influençant réciproquement et engendrant des flux de gaz et de liquides (20). Les liquides issus d’une décharge sont communément appelés lixiviats. Les gaz, quant à eux, sont qualifiés de biogaz. Les microorganismes étant responsables de la plupart des modifications des propriétés physico-chimiques des lixiviats et du biogaz, on assimilera souvent la décharge non contrôlée à un réacteur biochimique, ou bioréacteur. Les flux entrant dans cette décharge correspondent à l’entrée d’eau ainsi qu’à l’apport de déchets durant le déversement des déchets. L’eau, élément ayant la plus grande influence sur l’évolution des déchets, est issue de trois sources principales : le ruissellement arrivant à la décharge, des précipitations, l’eau constitutive des déchets.
Les lixiviats ou liquides de percolation de la décharge sont chargées bactériologiquement et surtout chimiquement de substances tant minérales qu’organiques. Ils peuvent se mélanger aux eaux de surface comme aux eaux souterraines et donc constituer un élément polluant tant par leur aspect quantitatif que qualitatif (éléments écotoxicologiques). L’eau traversant la couche de déchets va se charger en substances polluantes telles que la matière organique soluble résultant de l’activité biologique de la décharge non contrôlée, des constituants inorganiques comme les métaux lourds (provenant notamment des piles) et des germes qui peuvent être dangereux pour la santé et l’environnement. Il est difficile de prévoir avec précision la composition des lixiviats car elle dépend de la nature des déchets, du volume des précipitations, ainsi que du stade de dégradation atteint. Le plus grand risque lié à la production de lixiviats est la contamination de la nappe phréatique. Cela aurait pour conséquence de polluer les puits d’eau de consommation et donc de priver la population d’un élément vital à sa survie. Signalons également que la pollution des réserves d’eau potable par des micro-organismes pathogènes est susceptible de provoquer des épidémies.
En ce qui concerne le biogaz, sa composition en molécules majeures (méthane, gaz carbonique, oxygène et azote) est très variable et dépend notamment de l’âge de la décharge et de la composition des déchets. Outre ces composants majeurs, le biogaz véhicule également une multitude de substances organiques. La nature de ces produits est très variée : aldéhydes, cétones, alcools, composés aromatiques, composés halogénés et composés organosulfurés. L’origine de ces substances est également très variée: d’une part les processus particuliers de dégradation biologique et/ou chimique de certains déchets et d’autre part le largage de gaz provenant de la mise en décharge de déchets les contenants : frigos, solvants, aérosols, etc. Leur part dans la production de biogaz est faible et leurs proportions relatives sont très variables. Toutefois, il est important de noter que plusieurs de ces composés sont relativement nocifs. Globalement, les risques liés au biogaz peuvent être séparés entre risques pour les humains (toxicité des substances traces, asphyxie pour les populations riveraines, explosion du méthane, incendies) et risques de pollution de l’atmosphère (les gaz majeurs sont des gaz à effet de serre).
Outre ces aspects techniques, il existe d’autres nuisances provenant des décharges non contrôlées ayant un impact environnemental souvent moindre que le biogaz et les lixiviats, mais dont les conséquences sur la vie socio-économique sont plus facilement discernables. L’impact visuel des décharges d’ordures, couplé avec le problème des odeurs. L’activité de stockage des déchets entraîne également toute une série de parasites tels que les animaux errants, qui sont une source de nuisance pour la population.
II.1.1 Les Effets des déchets sur la Santé
Les décharges non contrôlées ainsi que certains sites d’accumulation des déchets représentent un danger pour la santé de la population riveraine. Parmi les risques sanitaires qui peuvent en dérouler et les nuisances qui leur sont liées, on relève :
– Prolifération des rongeurs et des insectes : les déchets, avant fermentation, constituent la nourriture principale des rats agents directs ou indirects de propagation de graves maladies : (peste, fièvre, etc.). Ils sont aussi des pôles d’attraction pour les mouches et autres insectes, vecteurs passifs de germes et de virus.
– Emanations de gaz toxiques (méthane, hydrogène sulfureux, etc.), d’odeurs nauséabondes et de germes qui prolifèrent dans les poussières d’ordures.
– Pollution des ressources en eau : les déchets risquent de contaminer les nappes d’eau souterraines et/ou les eaux superficielles lorsqu’ils sont déposés sur des terrains non aménagés. Des germes pathogènes et des métaux lourds peuvent alors atteindre la nappe phréatique par infiltration du lixiviat, ou les eaux superficielles par écoulement des eaux de pluie souillées.
– Contamination du milieu marin et des eaux de surface par le déversement direct des déchets.
– Dégradation du paysage (pollution visuelle) : les paysages urbains perdent leur esthétique à cause de l’envol des papiers et des emballages plastiques contenus dans les tas des déchets stockés dans les décharges non contrôlées.
– Risque d’incendies : les déchets sont souvent facilement inflammables, ils peuvent s’enflammer par combustion spontanée, quand ils sont mis en tas sans précaution, avec production de fumées malodorantes.
– A long terme, l’entassement des déchets dans ces décharges provoque des échappements de gaz méthane CH4 (biogaz) qui, de par leur odeur et leur taux d’inflammabilité, sont dangereux (21).
II.1.2 Les effets des mauvaises techniques d’élimination des déchets sur la santé
Les différents procédés d’élimination des déchets peuvent être générateurs d’émissions polluantes spécifiques :
II.1.2.1 L’incinération
La combustion des déchets et des gaz qu’ils génèrent émet des oxydes de carbone, d’azote et de soufre, des acides, des poussières, des composés organiques volatils et des organohalogénés (22).
Ces substances émises en concentrations variables selon les procédés d’incinération et de traitement de fumées mis en œuvre, sont diffusées dans l’environnement, où elles se mélangent à celles émises par d’autres sources ; les substances spécifiques à l’incinération des déchets, susceptibles d’avoir un impact sanitaire sur les populations riveraines sont :
– le trichloréthane (effets systémiques divers),
– le benzène (cancérigène),
– le cadmium (effet rénal),
– le nickel (cancérigène).
Quant aux rejets liquides des unités d’incinération, ils sont susceptibles de contenir des résidus de métaux lourds, parmi lesquels le mercure et le nickel sont des toxiques spécifiques.
II.1.2.2 L’enfouissement
L’enfouissement mal contrôlé peut contaminer les sols et les eaux souterraines ; les lixiviats en s’infiltrant dans le sous sol entrainent une forte dégradation des eaux souterraines (23).
II.1.2.3 Rejet dans le cours d’eau
Les déchets solides et liquides déversés dans les cours d’eaux sont susceptibles de contenir des substances métalliques oxydées ou réduites, des composés organiques halogénés et des traces de solvants et de pesticides, dont les effets toxiques connus ne semblent pouvoir affecter que les organismes aquatiques directement exposés aux rejets.
20 Philippe Thonart et Sory Ibrahim Diabaté, guide pratique sur la gestion des déchets ménagers et des sites d’enfouissement technique dans les pays du sud, Les publications de l’IEPF, Paris 1997, p 346
21 LELO NZUZI, Kinshasa ville et environnement, Harmattan 2008, 5-7 Rue de l’école polytechnique, 75005 Paris, p 281
22 Ministère de l’agriculture et de l’enseignement « la voix du Congo profond 2010 »p 174
23 BLIEFERT CLAUS, PERRAUD Robert, 2001 ; Chimie de l’environnement air, eau, sol, déchet, de Boeck université ; Bruxelles, p477
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