Infirmiers interrogés :
Les infirmiers ont pour 78% entre 30 et 49 ans. 6% ont moins de 30 ans, et 16% plus de 50 ans.
L’ancienneté de l’exercice en secteur libéral est très variée, allant de 4 à 34 ans.
Infirmiers et soins palliatifs :
La place des soins palliatifs dans la pratique des infirmiers libéraux :
64 % des infirmiers admettent suivre parfois des patients dans le cadre de soins palliatifs. Souvent et très souvent : total de 36% .Aucun d’entre eux n’est jamais amené à effectuer des soins dits palliatifs.
Il semble donc que les soins palliatifs soient intégrés pleinement à la pratique des infirmiers libéraux. Cette catégorie de prise en charge se révèle être périodique et récurrente.
La fréquence des décès survenus à domicile, par année :
Les décès surviennent rarement au domicile du patient.
Aucun décès : 9
Un décès par an: 28
Deux décès par an: 24
Trois décès par an: 1
Les infirmiers relatent pour la plupart entre 1 et 2 décès par an à domicile.
Infirmiers et présence après le décès:
La disponibilité des infirmiers vis à vis de cet instant:
La majorité des infirmiers interrogés (61%) affirme proposer spontanément aux proches de les appeler lorsque surviendra le décès.
Il y a donc une proposition faite aux familles, l’infirmier évoquant la possibilité d’être appelé lors de cet instant.
Certains prennent l’initiative de donner leurs coordonnées téléphoniques personnelles afin d’être joignables plus facilement :
Si le décès survient la nuit, la majorité accepte de se déplacer au domicile (88%) :
Nous pouvons souligner l’acceptation des infirmiers à être sollicités sur un temps consacré à la vie personnelle, à savoir la nuit.
Le recours à l’infirmier lors du décès :
La famille a donc fréquemment recours à l’infirmier lorsque le décès survient.
Le temps consacré à cet instant :
Les infirmiers estiment rester au domicile pour la majorité entre 1H et 2H.
35% d’entre eux évaluent leur présence entre 30min et 1h.
Infirmiers et soins au défunt :
La réalisation de la toilette par l’infirmier :
Les infirmiers sont partagés concernant le fait d’effectuer une dernière toilette.
Les commentaires leur ont permis d’expliciter leurs divergences à ce sujet.
Commentaires libres :
Sachant que ce soin est effectué par les entreprises funéraires dès la prise en charge du corps, certains estiment qu’il n’est plus nécessaire de le réaliser : 12 récurrences.
Beaucoup expliquent avoir fait évoluer leurs pratiques ces dernières années, affirmant effectuer ce soin bien plus souvent par le passé : 16 récurrences.
A l’inverse, ceux qui continuent à la réaliser expliquent y voir une dernière marque de respect, un dernier hommage : 16 récurrences
La réalisation de la toilette du défunt est donc peu uniforme, selon le profil de chaque soignant.
Par contre, la présentation du défunt a une importance certaine à leurs yeux :
Importance de la présentation du corps du défunt :
Les soignants sont donc presque unanimes, approuvant l’impact que peut avoir l’image du corps sur l’entourage et la famille.
Commentaires libres :
Visage apaisé : 23 récurrences.
Visage serein : 8 récurrences.
Un beau visage : 5 récurrences.
Faire disparaître l’équipement médical du corps : 16 récurrences.
Le positionnement du corps, et des mains : 6 récurrences.
Influence des croyances sur les soins pratiqués :
81% des soignants prennent en compte les croyances lors des soins au défunt
Seul 19% affirment ne pas en tenir compte.
La majorité des infirmiers admet donc que les croyances ont un impact sur la réalisation des soins au corps.
Commentaires libres :
Ils évoquent la toilette (7), l’habillage du défunt(4), la position de ses mains(5), la présence d’objets symboliques(7) et de bijoux. La notion de religion(19) est évoquée.
Infirmiers et accompagnement des proches
Ancienneté de la relation :
97% des infirmiers ont suivi les patients dans le cadre de soins, avant la phase dite palliative.
Pour la plupart, la durée du suivi peut être estimée à plus de deux ans.
Les prises en charge tardives semblent plus rares.
Il apparaît que les infirmiers libéraux aient donc une relation ancienne avec les patients suivis en soins palliatifs, les ayant bien souvent accompagnés en amont lors de la phase dite curative.
Leur connaissance du patient se comptant parfois en années.
Ils ont donc un lien ancien avec la famille proche, présente au domicile.
Isolement des proches :
52% des infirmiers admettent se retrouver parfois avec un proche isolé, seul auprès du défunt.
29% admettent que cette situation se présente souvent.
Il n’est donc pas rare qu’un proche soit seul après le décès, sans avoir de famille venant l’accompagner dans cette étape.
Une aide pour les formalités administratives
La majorité des infirmiers interrogés est amenée à expliquer les formalités administratives aux proches.
D’après les infirmiers, la constatation du décès par le médecin est une procédure bien connue des familles (71%).
En revanche, les conditions de transport du corps par les entreprises de pompes funèbres le sont beaucoup moins. 90 % des infirmiers affirment que celles si sont mal connues des proches.
Commentaires libres
Sont mal connus : le délai de conservation du corps à domicile (12), le choix libre d’une entreprise de pompes funèbres (10), le lieu ou sera déposé le corps en attente de l’inhumation, ou la crémation (6).
Certains infirmiers relatent effectuer les démarches à la place de la famille : 23 récurrences
Ils en donnent plusieurs raisons :
Les familles sont perdues, incapables d’agir, paralysés, perturbés, en plein désarroi.
Le grand âge du conjoint survivant intervient.
Certains pensent important de décharger la famille, d’autres soulignent au contraire qu’il faut leur laisser effectuer ces démarches. Dans ce cas, les infirmiers affirment conseiller, orienter, être un appui, un soutien.
La mise en place d’un dialogue infirmier/ famille
42% des infirmiers ont sont souvent l’occasion d’établir une discussion approfondie avec les proches, après le décès.
Commentaires libres :
Ils évoquent des thèmes divers abordés lors de cet échange :
Le défunt : sa vie, son parcours, sa personnalité, les regrets concernant bons moments partagés, mais aussi les remords inhérents aux différents conflits familiaux
Le vécu de la maladie : le soulagement de la douleur, la souffrance morale, le délai écoulé avant le décès.
Les circonstances du décès : Durée de l’agonie, souffrance, « pensez vous qu’il se soit senti partir ? »
Le proche : Sa façon d’envisager l’avenir, la tristesse, le soulagement de voir se terminer une situation insupportable.
Les croyances : l’au delà, la vie après la mort, ou au contraire, la remise en cause de ces croyances.
Le sens : « pourquoi lui », « il n’a jamais fait de mal à personne », « pourquoi autant de souffrance. ». Recherche dans la vie menée d’une raison expliquant la souffrance subie.
L’importance des mots :
Presque la totalité des infirmiers (97%), estiment que les mots ont une portée, au delà de l’échange qu’ils ont eu avec la famille.
Mots difficiles à choisir pour 61% d’entre eux :
Commentaires libres :
Plus que les mots, le contenu du discours semble poser problème aux infirmiers : Certains ont peur de choquer (5 récurrences), d’avoir des propos maladroits (9 récurrences ). D’autres ne savent pas quoi dire face à la souffrance (15 récurrences ), ne trouvent pas les mots(3 récurrences ). Certains expliquent écouter le proche avant de parler à leur tour (22 récurrences), ne pas briser le silence (14 récurrences).
Suivi après le décès :
La majorité des infirmiers affirme revoir les proches à distance du décès.
Commentaires libres :
Cela survient de façon fortuite (dans la rue, les commerces), 34 récurrences.
De nombreux infirmiers précisent planifier une visite auprès du proche à distance du décès : 19 récurrences. L’objectif étant de dépister la détresse, l’isolement. De boucler, finaliser la prise en charge. Les proches ayant besoin d’évoquer la période palliative, le soulagement de la douleur.
Parfois, la famille convie l’équipe infirmière autour d’un repas ou d’un café pour remercier : 5 récurrences.
De nombreux infirmiers évoquent l’absence de suivi des proches après le décès du patient, et ressentent le devoir de visiter le proche à posteriori.
Plusieurs évoquent une faille au sein de la société dans ce domaine, voyant des proches livrés à eux mêmes, ne sachant vers qui se tourner pour obtenir de l’aide : 6 récurrences.
Infirmiers et approche de cet instant :
L’impact de l’infirmier sur l’ambiance qui règne au domicile
71% des infirmiers pensent qu’ils ont un rôle à jouer concernant l’ambiance régnant au domicile après le décès.
29% affirment n’avoir aucun impact dans ce domaine.
Commentaires libres :
L’ambiance globale idéale : La sérénité (8 récurrences), l’apaisement (10 récurrences), le calme (14 récurrences ) , sont des notions récurrentes dans leurs écrits.
La vision de la scène : L’aspect et l’installation du défunt (23 récurrences), le rangement de la pièce centrale (6 récurrences ), sa démédicalisation (21 récurrences), avec la disparition du matériel ayant trait aux soins.
La luminosité est évoquée : l’éclairage, la pénombre, les bougies, les volets mis clos : 3 récurrences
L’odeur est citée : 4 récurrences.
La relation entre le défunt et ses proches : le pourtour du lit doit être dégagé, afin de permettre la libre circulation des proches (9 récurrences). Le fait de disposer des chaises autour du lit.
La juste place de l’infirmier : la notion de disponibilité (11 récurrences ), de discrétion (9 récurrences ).
L’accompagnement : avec la notion d’écoute (26 récurrences ), d’accueil des proches arrivés sur le lieu du décès (8 récurrences ).
Le bruit, avec la nécessité d’en faire le moins possible (3 récurrences). L’usage de la musique à la demande de la famille (1 récurrences).
Leurs gestes dans ce domaine :
Attitude : Gestes calmes (28 récurrences), écoute attentive (16 récurrences), Respecter souhaits défunt(6 récurrences )
Discours : Rassurer sur la souffrance (11 récurrences), l’acceptation de la mort par le défunt(5 récurrences), discussion sur le fait de garder le corps au domicile plus ou moins longtemps (4 récurrences ).
Actions concrètes : Ménage chambre (8 récurrences ), élimination matériel(15 récurrences), toilette de défunt, installation avec ou sans l’aide de la famille.
Ambiance : réglage de la lumière (6 récurrences ), Musique de fond (1 récurrences), utilisation de parfum ou désodorisant si odeur désagréable (3 récurrences ).
L’attitude de l’infirmier :
Presque la totalité des infirmiers (97%) admet le fait que son attitude globale lors de cet instant est importante. Seul 3 n’abondent pas en ce sens.
Commentaires libres :
Etre calme, serein, posé, faire preuve de douceur : 26 récurrences
Faire preuve de disponibilité, sans toutefois se montrer envahissant : 20 récurrences
Ecouter activement, en faisant appel à la reformulation.19 récurrences
Rester professionnel et respectueux.13 récurrences
Savoir aider, soutenir les proches.12 récurrences
Rassurer les proches concernant l’absence de douleur, les réconforter : 9 récurrences
Atténuer les regrets : 3 récurrences
Respecter les désirs du défunt :3 récurrences
Vécu de cet instant par les infirmiers :
La majorité des infirmiers (74%), affirme apprécier cette présence auprès des proches, dans l’instant qui suit le décès.
Commentaires libres :
Les infirmiers soulignent le fait de devoir accompagner jusqu’au bout le patient et sa famille, même pour cette dernière étape.
Ils évoquent une relation humaine faite d’amitié (2 récurrences), le lien construit (12 récurrences), l’intimité avec la famille (8 récurrences), la compréhension (5 récurrences), le partage réciproque (7 récurrences), la notion d’accompagnement (16) récurrences.
Certains soulignent le fait d’apprendre beaucoup de ces moments de vie(6) récurrences.
D’autres évoquent le sentiment d’un travail achevé(8), une manière de clôturer la relation (5 récurrences).
Certains ont souligné le terme utilisé dans ma question, à savoir « aimez-vous » :
Ce mot n’était pas celui qu’ils auraient choisi (4 récurrences). Certains l’aurait remplacé par : plaisir d’un travail bien fait (1 récurrences), devoir vis à vis des proches (3 récurrences).
78% d’entre eux estiment que cela fait partie intégrante du métier que d’accompagner les proches après le décès du patient.
Gratuité des soins
La majorité des infirmiers déclare ne recevoir aucune rémunération pour le temps passé auprès des proches, les conseils, et l’aide apportée dans cet instant.
68% d’entre eux effectuent toujours cette aide gracieusement.26% souvent 6% parfois.
Il est donc question dans la majorité des cas d’un acte gratuit, d’un don de présence auprès des proches.
Commentaires libres :
Pour 12 infirmiers, la gratuité de cet acte est considérée comme évidente et normale. Les critères motivant cette démarche étant multiples :
Acte de soin ne relevant d’aucune prescription médicale, donc ne pouvant être l’objet d’honoraires. (15 récurrences).
Démarche entièrement volontaire et personnelle : 6 récurrences.
En accord avec des valeurs personnelles : 4 récurrences.
Infirmiers et questionnements :
La demande de formation
La question de la formation est nettement plébiscitée.
Ainsi, la grande majorité des infirmiers (71%) pense qu’une formation concernant l’après décès pourrait être bénéfique à leur pratique.
Commentaires libres :
Huit infirmiers ont malgré tout souligné le fait qu’établir une conduite à tenir rigoureuse serait absurde, retirant toute spontanéité, toute liberté dans cette prise en charge. La notion de protocole (5 récurrences)) a été utilisée, expliquant le peu d’autonomie que ceux ci laissent aux infirmiers.
D’autres ont évoqué une demande de connaissance concernant le choc initial (2 récurrences), et le travail de deuil du proche survivant. (9 récurrences)
Commentaires libres :
La notion de questionnement est apparue de façon significative dans le champ commentaires et témoignages libres.
Les infirmiers évoquent à maintes reprises le manque d’espace de parole (17 récurrences) pour évoquer et partager leurs expériences. Certains se remettent en question, et regrettent l’absence de supervision (6 récurrences) dans le secteur libéral. Selon eux, un débriefing (8 récurrences) au terme de certaines prises en charge serait salutaire, afin d’ajuster leurs attitudes. Beaucoup expliquent se réunir entre collègues au sein du même cabinet pour se questionner autour de leurs difficultés (12 récurrences).
D’autres cherchent un regard extérieur, en se mettant en relation avec des médecins et professionnels de santé connu de leur réseau (5 récurrences).
Plusieurs d’entre eux mettent l’accent sur la solitude inhérente à l’exercice libéral (8 récurrences).