Gagne de la cryptomonnaie GRATUITE en 5 clics et aide institut numérique à propager la connaissance universitaire >> CLIQUEZ ICI <<

Section 3. Les moyens d’action communautaire

Non classé

Si l’action communautaire se traduit par des actes politiques et juridiques, elle ne se conçoit pas sans la mise en œuvre des moyens en personnel, en matériel et financiers. L’étude du système institutionnel serait donc incomplète sans une présentation, fût-elle sommaire d’une part de la fonction publique communautaire ; d’autre part du régime budgétaire.

§1. Le personnel de l’EAC

Les institutions et les organes de la Communauté emploient un personnel globalement assez nombreux. Ce dernier est soumis à un régime conventionnel (130) faute de statut spécifique ; le Traité de l’EAC contient un certain nombre de dispositions destinées à régir le personnel travaillant au service des organes et institutions de la Communauté ; la Cour de Justice faisant office du tribunal administratif de la fonction publique de l’EAC. En effet, celle-ci est compétente pour connaitre des différends entre la Communauté et ses employés qui proviennent des termes et conditions ou de l’interprétation ou de l’application des règlements du personnel ou des conditions de service de la Communauté (131).

Les membres du personnel au service de la Communauté sont régis par des règles similaires à celles relatives aux fonctionnaires et agents internationaux. Ils jouissent sur le territoire de chaque Etat membre de l’EAC et quelle que soit leur nationalité d’un certain nombre de privilèges et immunités définies à l’article 73 du Traité (132).

Il s’agit pour l’essentiel de l’immunité de juridiction pour les actes accomplis par les intéressés en leur qualité officielle, de l’exemption des dispositions limitant l’immigration et régissant l’enregistrement des étrangers et de tous autres privilèges et immunités pouvant être déterminés par le Conseil.

En vertu de l’article 138 §3, « chacun des Etats membres s’engage à accorder à la Communauté et à ses fonctionnaires les privilèges et immunités accordées à des organisations similaires sur son territoire ».

Il ressort des dispositions de cet article que la Communauté, comme ses fonctionnaires dont l’effectif s’élève à plus de 120 employés (133), jouit sur le territoire de chaque Etat membre des privilèges et immunités. L’économie de cette disposition consiste dans le fait que les biens et avoirs de la Communauté ne peuvent faire l’objet de la contrainte sans l’autorisation du juge de la Cour (134). Ses locaux, bâtiments et archives sont à cet égard inviolables ; les opérations que la Communauté réalise bénéficient d’exemptions fiscales et douanières.

On remarque cependant que l’EAC ne dispose pas d’immunité de juridiction, la Cour de justice ayant reçu la compétence pour connaître de la quasi-totalité des litiges soulevés par son activité ; les juridictions nationales conservent, de surcroît, une compétence de droit commun tout à fait résiduelle.

§2. Le régime budgétaire (135)

Aux termes de l’article 132 §1 du Traité, il y aura un budget des organes et des institutions de la Communauté, sauf en ce qui concerne les institutions à comptabilité autonome.

Dès sa création, l’EAC est doté d’un système budgétaire. Si l’analyse détaillée de celui-ci – qui relève d’ailleurs de la technique financière – ne peut prendre place dans un exposé général du droit institutionnel, celui-ci doit néanmoins en présenter les grandes lignes dans la mesure où celles-ci participent de ce droit.

Après avoir examiné la question de ressources et des dépenses de l’EAC, nous verrons les problèmes de financement du budget de la Communauté avant de parler des caractères principaux de la procédure budgétaire.

1. La structure du budget

A. Les composantes

a) Les ressources

Les ressources de la Communauté sont utilisées pour financer ses activités telles que décidées par l’Assemblée et sur recommandation du Conseil. Il se pose la question de savoir comment est financé le budget de la Communauté, en d’autres termes, quelle est la consistance des ressources budgétaires?

Pour y répondre, nous voyons qu’à la lumière du paragraphe 4 de l’article 132 du Traité constitutif de l’EAC, les dépenses sont couvertes par des contributions annuelles des Etats membres, fixées suivant une clé d’égalité mais aussi des donations régionales et internationales tout autant que d’autres ressources qui peuvent être identifiées par le Conseil. Ainsi, il ressort de ces dispositions que le Conseil a la latitude de décider de l’opportunité de financer le budget de la Communauté notamment par le recours à l’emprunt. Par ailleurs, les rédacteurs du Traité ont prévu également des ressources extrabudgétaires comme autres ressources de la Communauté.

b) Les dépenses

Les dépenses de l’EAC pour chaque année ordinaire sont examinées et approuvées par le Conseil et doivent être couvertes par le budget (136). L’analyse du budget de la Communauté débouche sur la constatation que les dépenses se répartissent en deux catégories à savoir les dépenses de fonctionnement et les dépenses d’investissement.

Les dépenses de fonctionnement, c’est-à-dire les salaires et émoluments du personnel et des fonctionnaires ainsi que celles liées à l’acquisition des biens meubles et immeubles représentent 33,2% du budget.

Les dépenses d’investissement, c’est-à-dire celles liées à des actions et politiques de la Communauté représentent un peu moins de 66,8% du budget total
(137).

Toutefois, leur répartition n’est pas équilibrée. Ainsi, en crédits d’engagements pour l’année financière 2011-2012 :

-la promotion des ressources naturelles et la protection de l’environnement constituent l’une des priorités de l’EAC. Elle est la première dépense d’investissement avec 42 504 445 US$, soit 38,8% du budget ;
-la mise en application du protocole sur le Marché commun représente 10 274 605 US$, soit 9,4% du budget ;
-le développement et l’extension des infrastructures régionales occupent aussi une place importante avec 9 423 390 US$, soit 8,5% du budget ;
-l’exécution des recommandations et décisions des organes et institutions de l’EAC représente 3 851 188 US$, soit 3,6% du budget ;
-la promotion du commerce multilatéral représente 3 102 500 US$, soit 3,3% du budget ;
-les actions à mener pour le renforcement de la coopération en matière politique et de défense ainsi que la visibilité de la Communauté sont évaluées respectivement 1 634 135 US$ et 1 564 190 US$, soient 1,49% et 1,43% du budget.
-les dépenses relatives à la promotion de l’agriculture, la sécurité alimentaire et l’action contre le changement climatique s’élèvent à 604 260 US$, soit 0,6% du budget ;
-les dépenses relatives au processus de la conclusion du protocole sur l’Union monétaire en cours de négociation depuis janvier 2011 sont estimées à 604 010 US$, soit 0,5% du budget ;
-les dépenses relatives aux actions à mener dans le cadre de la stratégie de développement du secteur privé et de l’industrialisation sont estimées à 169 990 US$, soit 0,1% du budget (138).

B. Les problèmes de financement de la Communauté

Pour rappel, le budget de l’EAC, est en vertu de l’article 132 du traité, alimenté par les contributions annuelles des Etats membres ainsi que les donations régionales et internationales. Les contributions des Etats membres totalisent un montant inférieur à la moitié du budget général de la Communauté (139). Si l’on se réfère aux quatre dernières années fiscales, nous constatons que l’EAC dont le budget connaît chaque année un accroissement considérable, est souvent confronté à des difficultés liées à des irrégularités de cotisation de ses membres.

a) Les irrégularités de contributions

Pour l’année fiscale 2008/2009, sur un budget de 23 418 932 US$ prévu, seuls 7 858 651 US$ avaient été payés au 10 février 2009 étant entendu que l’année budgétaire de la Communauté commence le 1er juillet et se termine le 30 juin (140). A part le Burundi qui n’était tenu de donner qu’une contribution 1 000 000 US$, les autres pays membres devaient participer chacun au budget de la communauté à hauteur 5 604 733 US$ (141). La contribution du Burundi a finalement été payée par le Rwanda car la fragilité économique de ce pays ne lui permettait pas de s’acquitter de toutes ses obligations financières.

Dans tous les cas, seuls les trois pays fondateurs du bloc d’intégration régionale sont un peu réguliers.

b) L’accroissement budgétaire

La Communauté Est-Africaine connaît un budget qui s’accroît chaque année. Cet accroissement serait, à notre sens, lié à l’importance des priorités que l’EAC se donne pour son développement.

En effet, pour l’année fiscale 2009-2010, l’EAC a décidé d’augmenter son budget qui a passé de 24 418 932 US$ à 54 257 291 US$ (142), soit un accroissement de plus de 50%.

D’après M. MAKARULIZA, sur le budget dont 43,5% est apporté par les Etats membres et le reste par les partenaires du développement de l’EAC, 50,6 % ont été consacrés aux dépenses de développement tels que l’Union douanière, les négociations sur le protocole du marché commun, l’investissement, et le reste aux frais de fonctionnement et aux salaires (143). De même, pour l’année financière 2010-2011, le budget de la Communauté a connu une augmentation importante ; il a passé de 54 257 291 US$ à 77 664 443 US$,soit un accroissement de 31% tandis qu’il a passé de 77 664 443 US$ à 109 680 319 US$ pour l’année 2011-2012, soit un accroissement de 24% ; et de nouveau, cet accroissement s’explique non seulement l’élargissement de la Communauté, mais surtout, par l’importance des projets de développement et notamment, l’opérationnalisation du marché commun, le programme du développement du Lac Victoria, la conclusion d’un accord tripartite de la zone de libre échange du COMESA, EAC et SADC, le renforcement des capacités du Conseil Interuniversitaire d’Afrique de l’Est pour la promotion d’un système éducatif meilleur dans la sous région.

Dans tous les cas, la répartition du budget de l’EAC entre les différents secteurs, entre autres le traitement du personnel et des fonctionnaires, le fonctionnement et l’investissement laisse transparaître l’attention particulière que la Communauté en cours de construction réserve aux projets de développement.

2. La procédure budgétaire.

Telle qu’elle est aménagée par le Traité, la procédure relative au budget de la Communauté peut de manière classique être présentée en trois points dont chacun permet de situer la répartition du pouvoir budgétaire.

A. Préparation du budget

La procédure budgétaire s’inscrit dans le cadre destiné à limiter la croissance de certaines dépenses. En effet, toutes les dépenses de la Communauté doivent être couvertes par le budget et la préparation de ce dernier incombe au Secrétaire Général (144); cela ressort clairement de l’article 132 §2 qui dispose que « … un budget de la Communauté pour chaque année ordinaire est préparé par le secrétaire général, pour examen par le Conseil avant d’être approuvé par l’Assemblée ». A ce niveau, nous voyons que l’Assemblée joue un rôle primordial en matière budgétaire en ce sens qu’aucune dépense sur les recettes de la Communauté ne peut être effectuée sans l’approbation de cette institution. Ainsi, la déclaration des prévisions annuelles des dépenses et recettes de la Communauté est présentée au Bureau du Conseil à une date que la Commission des affaires internes désigne. A ce niveau, le président du Conseil doit dans le budget rendre compte du bilan financier ou relevé des comptes de la déclaration financière et des prévisions de dépenses de la Communauté respectivement à la Commission du budget et celle des prévisions (145).

B. La discussion et l’adoption du budget

La procédure de discussion et d’adoption du budget est complexe suivant les attitudes de l’Assemblée et du Conseil. En effet, le rôle du Conseil dans ce processus est d’examiner le budget préparé par le Secrétariat général tandis que le rôle primaire de l’Assemblée est celui de discuter et approuver le budget (146).

Faisons remarquer que chaque année, l’Assemblée doit d’abord examiner les problèmes liés à la mise en œuvre du budget ordinaire écoulé avant de s’atteler à l’examen du budget du prochain exercice (147). En effet, l’exposé des estimations des recettes et dépenses annuelles de la Communauté, à savoir le budget, est présenté par le Président du Conseil à l’Assemblée à une date décidée par la Commission des affaires internes. Pour être plus précis, le Président du Conseil a, dans le cadre du budget, affaire à plusieurs Commissions à savoir la Commission des voies et moyens à laquelle il présente l’état financier de la Communauté, la Commission du budget à laquelle il présente les prévisions des dépenses et la Commission des finances à laquelle il présente les prévisions budgétaires annuelles (dont l’examen ne peut pas excéder un délai de sept jours), les crédits additionnels (dont l’examen ne peut pas excéder un délai de deux jours et dont les débats sont limités aux dépenses autorisées par le budget supplémentaire) et les crédits provisoires pour un délai d’un jour. Après la clôture de l’examen de la proposition budgétaire, le président met au vote l’approbation des montants arrêtés (148).

La question qui se pose est alors celle de savoir ce qui adviendrait au cas où le budget ne serait finalement pas voté ; quoique le Traité soit muet à ce sujet, nous pensons que pour le bon fonctionnement de la Communauté, on pourrait recourir au régime des douzièmes provisoires.

C.L’exécution et le contrôle du budget

a) L’exécution

L’exécution du budget de la Communauté incombe au Secrétariat Général sous sa propre responsabilité dans les limites des crédits alloués et dans les conditions fixées par les règles de procédure budgétaire arrêtées par le Conseil. En effet, aux termes de l’article 71§1, c’est le Secrétaire Général qui est chargé d’administrer et gérer financièrement la Communauté ; cela équivaut au pouvoir d’exécution du budget qu’il prépare lui-même.

b) Le contrôle

Les fondateurs de la Communauté ont estimé qu’il serait bon que le contrôle financier de la Communauté soit exercé par une instance indépendante. C’est pourquoi une Commission de vérification des comptes a été mise en place en vertu de l’article 134 du Traité constitutif. Dans cette perspective, ladite commission n’est dans l’exercice de ses fonctions soumise ni à la direction ni au contrôle d’une quelconque personne ou autorité (149). Cependant les rapports de la commission de vérification sont soumis au Conseil qui, à son tour les présente à l’Assemblée dans un délai de 6mois pour un débat et pour toute considération ou action que l’Assemblée estime nécessaire.

Nous pensons à ce sujet qu’il revient à l’Assemblée d’exercer un pouvoir de donner décharge au Secrétariat Général de l’exécution du budget après débat sur les rapports de la commission de vérification lui présentés par le Conseil. A juste titre, l’article 72 des règles de procédure budgétaire dispose que l’Assemblée doit contrôler la mise en œuvre du budget par l’intermédiaire de la commission responsable du contrôle budgétaire et d’autres commissions pertinentes (150).

Schématiquement, la procédure budgétaire de l’EAC se présenterait ainsi :

La procedure budgetaire de l'EAC

130 Voir l’article 70 §1 du Traité
131 Voir l’article 31 du traité
132 Les privilèges, immunités et facilités accordés aux fonctionnaires et au personnel le sont dans l’intérêt exclusif de la Communauté pour éviter qu’une entrave soit apportée au fonctionnement et à l’indépendance de la Communauté.
133 http://www.eac.int/abouteac/eacnews consulté le 20 aout 2011.
134 Cette immunité d’exécution vise uniquement à éviter que des entraves ne soient apportées au fonctionnement et à l’indépendance de la Communauté.
135 Voir les articles 72, 73 et 132 du Traité.
136 Voir l’aricle132 du traité
137 D’après le Procès-verbal de la 22ème réunion du Conseil des Ministres tenue du 11-15 avril 2011 à Arusha en Tanzanie, le budget de l’EAC pour l’année financière 2011-2012 s’élève à 109 680 319US$, soit un accroissement de 24% par rapport au budget de l’année financière 2010-2011.
138 Voir aussi http//www.eac-plans/11 the eacnews/1059 « EAC plans a $109 million budget », consulté le 30 décembre 2011.
139 Selon le rapport du secrétariat général du 15 Avril 2011 sur les prévisions budgétaires pour l’Année fiscale 2011-2012, sur le budget de 109 680 319 US$, l’apport des Etats membres s’élève à peine à 33 666 700 US$ soit 32,4% du budget.
140 Voir l’article 132 §7 du Traité.
141 Rapport 2008/2009 sur les affaires financières de l’EAC
142 http://www.eac.int/about-eac/eacnews/443-press-release-eacbudget-estimates-for-fy. »EAC budget estimates for the financial year
143 Monique MAKARULIZA, Secrétaire du Conseil de Ministres de l’EAC, rapport, 2010.
144 Voir l’article 132 du Traité
145 Voir l’article 74 des Règles de procédure budgétaire.
146 Voir les articles 13 §2 et 49 §2 du Traité.
147 Voir l’article 72 des Règlement de l’Assemblée.
148 Voir l’article 76 du Règlement de l’Assemblée.
149 Voir l’article 134 §4 du Traité.
150 Voir l’article 72 du Traité.

Page suivante : CONCLUSION GENERALE

Retour au menu : ANALYSE DU SYSTEME INSTITUTIONNEL DE LA COMMUNAUTE EST-AFRICAINE